Du hawzi, de la nostalgie et du talent
23 09 2009Après son passage à Blida, la semaine dernière, la talentueuse chanteuse Saloua a donné, vendredi soir à la salle Ibn Zeydoun de Riadh El Feth, un remarquable récital de musique.
Saloua, cette grande dame de la chanson algérienne, a enchanté l’assistance en cette vingt-huitième soirée du Ramadhan.Tous ses fans étaient présents pour revoir sur scène cette icône de la chanson hawzi. A l’ouverture de la salle de spectacle, il fallait jouer des coudes pour se frayer un chemin : manière subtile d’accaparer un ou d’éventuels sièges au niveau des premières rangées. C’est dire l’effet que cette chanteuse fait sur les mélomanes. Une sexagénaire confie que pour rien au monde elle ne raterait un concert de cette envergure. « Saloua incarne ma jeunesse. Comment voulez-vous que je fasse abstraction d’un tel rendez-vous alors que c’est mon idole ? » Un couple algérois révèle sur un ton fier et nostalgique que Saloua était un élément incontournable dans les mariages et les circoncisions. « La dernière cérémonie en date est le baptême de notre fils Rediane, il y a 35 ans à Alger. Elle avait animé une après-midi inoubliable. Elle a une voix unique. Nous lui sommes reconnaissants pour tout ce qu’elle a pu donner à la musique algérienne. »
La soirée est étrennée dans un premier temps par un succulent istikbar, joué par l’orchestre attitré de Saloua. Parmi cette huitaine de musiciens chevronnés qui suivent l’artiste à chacun de ses concerts, citons le pianiste et le chef d’orchestre Perkioui Smaïl, Sid-Ahmed Zerdoud au banjo, Guendouz Hamid au premier violon, Réda Tabit au deuxième violon, Madjid Khatli au troisième violon, Rabah Slim au violoncelle, Mustapha Rahal et Aziz Ouadah à la percussion. Tout de suite après ce prélude musical, Saloua fait une entrée majestueuse sur scène. Avec toute l’élégance qu’on lui connaît, elle avance à pas mesurés au-devant de la scène. Vêtue d’un karakou rouille en fetla, porté sur une jupe droite longue bouffonnée sur le côté gauche, elle salue magistralement son cher public à qui elle voue un respect indéfectible. D’une voix presque timide, elle ne manquera pas de souhaiter aux présents un bon Ramadhan tout en espérant qu’ils passeront une belle soirée en sa compagnie. Comme le veut la tradition algéroise, elle entamera son répertoire par l’incontournable Rana djinek, sous un tonnerre de youyous. Dès lors, la plupart des présents sont confrontrés au même sentiment, celui des souvenirs de jeunesse où il faisait bon vivre. Des silhouettes commencent même à se déhancher timidement. De sa voix cristalline, l’artiste revisitera les plus grands standards de la chanson algérienne, entre autres, Mel h’bibi malou, Ya bil el akdar, Haba ghalbi, Ya ghayeb, Ghalb sali, Wahd el ghiziel…
Après une pause d’une demi-heure, la chanteuse rejoint la scène, sapée d’une nouvelle tenue – une robe longue vert amande en soie sauvage, rehaussée de strass et une chorégraphie. Elle entamera d’autres langoureux morceaux musicaux signés par des figures de proue de la musique algérienne comme Fadhila Dziria où Cheikha Tetma. Un hommage particulier sera rendu à la chanteuse Latifa à travers un des titres de la regrettée, Chehel Oua ana netradjek. Un autre hommage appuyé sera rendu aux femmes à travers une composition personnelle, Ya moulate l’hayek, laâdjar ou talhifa. Une chanson qui a été mise en valeur par une scénographie appropriée, à savoir le passage d’une femme vêtue du voile traditionnel algérois, courtisée par un homme arborant également le costume de l’ancien Alger. Des titres aussi entraînants les uns que les autres seront à l’honneur avec Ala oulidi hjab allah, Kif rayi hamalni. La soirée s’est achevée aux alentours de 1h du matin avec la mélodieuse chanson Abkaw âala khir. Au terme de ses deux heures et demie de concert, Saloua – cette dame au talent inégalé et à la voix unique – n’avait plus rien à prouver car sa notoriété est bien assise.
Il est à noter qu’en aparté, Saloua nous confiera que sa nourriture spirituelle est son public : « Je suis contente de me retrouver avec des gens qui apprécient ma musique. C’est un immense honneur d’être là ce soir face à un public connaisseur. » (El Watan-22.09.09.)
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