La Chine populaire fête ses 60 ans
1102009
Avec un défilé grandiose rassemblant 200.000 personnes, Pékin fait ce jeudi une démonstration de sa force mondiale.
Avec le défilé de jeudi, Pékin veut avant tout exalter le sentiment national, montrer l’œuvre accomplie et ainsi légitimer le Parti.
Soixante-six minutes exactement, pour 60 ans d’Histoire. Pour célébrer l’anniversaire de la naissance de la République populaire (RPC), le 1er octobre 1949, les autorités chinoises organisent jeudi matin un défilé grandiose, qui mobilisent au total quelque 200 000 personnes, militaires, étudiants, écoliers ou travailleurs. Sur la grande avenue Chang’an, des chars «thématiques» exaltent les progrès accomplis, dans le domaine technologique, l’informatisation, l’espace… Cela fait des mois que soldats et volontaires se préparent pour un défilé au cordeau, des semaines que Pékin est en proie à une fièvre de contrôle et d’embarras logistiques. Des mesures de sécurité sans précédent, bien plus strictes encore que pour les Jeux olympiques de l’été 2008. Tout incident, même mineur, serait une perte de face pour le Parti.
Cela fait des mois que soldats et volontaires se préparent pour un défilé au cordeau.
Ce Jeudi soir sera tiré le «plus grand feu d’artifice du monde», selon la presse officielle, avec un spectacle mis en scène par le cinéaste Zhang Yimou, l’homme de la cérémonie des JO.
Mais, contrairement aux JO, l’événement est cette fois-ci essentiellement à vocation interne. Il s’agit avant tout d’exalter le sentiment national, de montrer l’œuvre accomplie et ainsi de légitimer le Parti. Et encore, ce message à vocation interne sera surtout envoyé par écran de télévision interposé puisque les Pékinois ont été invités à rester chez eux. La fête ne sera pas populaire. Dans les hutongs, les ruelles du centre de Pékin, des affiches placardées sur les portes listent toutes les interdictions, de l’attroupement dans la rue au lâcher de pigeon. L’officiel China Daily reconnaissait mercredi que «pour la grande partie du public, approcher de la place Tiananmen sera mission impossible». Le défilé militaire a cependant aussi vocation à montrer au monde le «saut qualitatif» de l’Armée populaire de libération, selon les termes du ministre de la Défense. Selon le général Gao Jianguo, porte-parole de l’événement, vont être dévoilés «52 types d’équipements militaires 100 % chinois, dont près de 90 % pour la première fois» (lire ci-dessous).
2e économie mondiale
Plus qu’une commémoration historique, cet événement des 60 ans est plutôt la célébration d’un moment, celui de l’affirmation de la Chine sur la scène internationale après une époustouflante croissance économique. De fait, les dirigeants chinois peuvent s’enorgueillir d’avoir élevé le niveau de vie de toute la population chinoise, à des degrés certes très différents selon les strates sociales. La Chine est devenue la 2e économie mondiale, avec la possibilité de ravir la première place aux États-Unis à l’horizon 2020. On lui fait place et yeux doux aux sommets du G20 et sa diplomatie est une clé des grandes crises nucléaires du moment, Iran ou Corée du Nord.
Le grand thème de cette fastueuse célébration reste celui de «l’unité nationale», malmenée l’an dernier par les événements du Tibet et surtout récemment par les troubles du Xinjiang, qui ont provoqué de vifs débats à l’intérieur des cercles du pouvoir. Ce n’est pas un hasard si la place Tiananmen a été encadrée par 56 immenses colonnes rouge et or, une pour chaque minorité du pays. Et que le président Hu Jintao a présidé mardi une grande cérémonie mettant à l’honneur ceux qui œuvrent pour «l’harmonie ethnique». À cette occasion, il a exhorté les officiels issus de l’ethnie principale Han à des efforts supplémentaires pour bien comprendre les autres communautés. (Le Figaro-01.10.09.)
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EDITO—Il faut suivre avec attention le traditionnel défilé militaire du soixantième anniversaire de la République populaire de Chine. Chaque décennie, la parade du 1er octobre est l’occasion de célébrer les progrès accomplis et de faire étalage de la modernisation accélérée de l’Armée populaire de libération, pour la plus grande gloire des dirigeants du Parti communiste.
Cette année est spéciale.
Au moment où la Chine sort plus vite que prévu de la crise et va aider le reste du monde à s’en extirper, au moment où son avis est sollicité au G20 pour gouverner la planète, les images de chars, de fusées et de fantassins sur la place Tiananmen illustrent l’émergence progressive d’une nouvelle superpuissance, décidée à peser de plus en plus sur les affaires du monde.
Autant les Jeux olympiques de l’été 2008 célébraient le succès international d’un pays qui a réussi à faire sortir 350 millions de Chinois de la pauvreté pour se hisser au deuxième rang des économies mondiales, autant ce soixantième anniversaire est une démonstration de force contenue.
Les événements sont en train d’accélérer l’« émergence harmonieuse » de la Chine, que ses dirigeants voulaient maintenir dans une discrétion rassurante. Le déclin de l’Amérique, la paralysie de l’Europe et la crise de l’économie mondiale se conjuguent pour faire de la République populaire la puissance montante de notre temps. Les difficultés des autres ne font que souligner son propre succès.
Un succès qui a ses exigences. Avec ses besoins en énergie et en matières premières, la Chine multiplie les contrats d’approvisionnement en Amérique latine, en Afrique ou au Proche-Orient. Pour assurer sa croissance, il lui faut protéger des intérêts de plus en plus lointains et donc s’impliquer davantage dans les dossiers internationaux.
Les appels à un remplacement du dollar comme monnaie de réserve internationale,
l’annulation du sommet entre la Chine et l’Union européenne, l’an dernier, témoignent de la nouvelle assurance des dirigeants chinois. Conscients du prestige international de leur pays et déterminés à en user sur la scène intérieure, ils sont prêts à s’en donner les moyens.
La participation de la marine chinoise aux opérations antipirates dans le golfe d’Aden, le projet de construction de porte-avions et les équipements militaires dévoilés aujourd’hui lors du défilé sont autant d’indices de la volonté de puissance du dragon économique chinois.(Le Figaro)
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