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A Paris, la parole raciste libérée

12 01 2010

« Et le baptème de Clovis ? » Ce mardi matin se tenait le débat parisien sur l’identité nationale au lycée Louis-le-Grand. Malgré les volontés de poser des cadres, la parole raciste s’est, comme ailleurs, libérée, offrant une tribune inespérée à l’extrême droite. Les dénégations d’Eric Besson n’y changent rien.

Il y a d’abord un lieu. Au lycée Louis-le-Grand, les organisateurs du débat parisien sur l’identité nationale ont eu le souci du prestige et du symbole. En sortant le débat des préfectures, il s’agissait de poser un nouveau cadre à ce débat ; en l’introduisant dans le prestigieux lycée, la volonté était claire de le rattacher à ses célèbres élèves, figures de proue d’une certaine idée de la France. Joël Vallat, son proviseur, évoquera notamment Diderot, Voltaire, Hugo ou Aimé Césaire. Pourtant, au regard des dérapages qui ont, malgré les précautions, émaillé le débat, c’est plutôt le nom d’un autre élève du même lycée qui vient à l’esprit : celui de l’écrivain collaborationniste Robert Brasillach.

C’est donc dans un « esprit de courtoisie républicaine » que devait se dérouler la discussion, selon les termes de Jean-Philippe Moinet, ancien secrétaire général du haut-conseil à l’intégration. L’ambiance n’était d’ailleurs pas loin de celle d’une IIIe République lorsque, se succédant, les intervenants louaient tour à tour les « valeurs » de la France, l’apprentissage culturel et l’intégration par l’école. Daniel Canepa, le préfet de Paris, se présentera d’ailleurs comme « un petit-fils d’immigré italien », fier de travailler avec Malika Benlarbi, sous-préfete de la ville. IIIe République également, lorsque, à plusieurs reprises, les valeurs de la France, nous dit-on, sont universelles. Françoise Quillien, inspectrice de l’éducation nationale, rappellera pour sa part que « la montée des individualismes et le développement de la société de consommation » constituent bien des menaces à l’identité nationale, avant de proposer de manière un peu naïve qu’un corps d’ambassadeurs des valeurs de la République ou de simples citoyens « qui pourraient avoir en charge la promotion de ces valeurs » tiennent lieu de garde-fous. Aurait-il également fallu tiquer lorsque l’évêque de Paris, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, relevait que le projet politique français s’était construit « en vis-à-vis avec l’Église catholique » ? C’est au moment ou la salle a disposé du micro que la parole fut néanmoins plus délicate.

Ainsi, Roland Curtet, militant du MNR, (Mouvement national républicain, fondé par Bruno Mégret) ne voit pas « en quoi la République définit l’identité française. Différents pays disposent d’une république pour régime ! » Et Patrice Huiban, secrétaire général de l’Elan nouveau des citoyens, de lui rappeler que la République est bien un « phénomène endogène » qui n’a pas été calqué sur un modèle étranger. C’est ensuite autour de Martine Lehideux, membre fondateur du Front national de s’exprimer. Si la gauche parisienne avait décidé de boycotter le débat, l’extrême droite était bien là : « Vous avez oublié le baptême de Clovis, qui reste fondateur. » dira-t-elle avant d’être remerciée par l’animateur : « Merci de faire la promotion de la monarchie. » Dans la même lignée, Isabelle Laraque, professeur de philosophie et militante du MNR réagira vivement : « Les personnes qui se disent musulmanes sont forcément respectueuses de cette religion, qui, elle-même, est incompatible avec la France. » Ce à quoi un représentant de la fédération laïque des citoyens de sensibilité musulmane répondra : « Je ne me bats pas pour le choc des civilisations mais contre le choc des ignorances. »

De son côté, Bernard Kanovitch, professeur de médecine, explique que « l’obligation de se définir est très agressive » avant de citer Lévinas : « Parler de l’identité, c’est déjà l’avoir perdue . » Le philosophe, Jean-François Mattéi, relèvera pour sa part que « la liberté, l’égalité et la fraternité ne sont pas des valeurs mais des principes fondateurs ; tandis qu’une valeur est une notion économique ou financière. Un principe est par essence indémontrable et ne dépend de la subjectivité de quiconque, fût-il président. » C’était avant qu’il suggère que les contrôles d’identité « sont une question de sécurité, de défense nationale et donc nécessairement des contrôles au faciès. » Dans cette veine, Paul-François Paoli, journaliste au Figaro littéraire notera dans une envolée sur l’assistanat, que, pour beaucoup, la nationalité est une simple « réalité juridique et administrative », qui se proclame lorsque l’on doit « toucher le RMI à la fin du mois ». Enfin, Ivan Rioufol, éditorialiste au Figaro, rappellera que « le multiculturalisme est le cheval de Troie de l’islamisme ; la France n’est pas une page blanche sur laquelle on écrirait tout sous prétexte de multiculturalisme ». (L’Humanité-11.01.2010.)

 


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2 réponses à “A Paris, la parole raciste libérée”

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