Algérie,le guépard saharien menacé
12022010
L’accueil se fait par un poème : « Ce désert que sillonnent les chèvres et que parcourt la vieille au dos courbé ne constitue point un obstacle pour l’étalon, encore moins pour le porteur du voile. » Le musée de L’Office du Parc national de l’Ahaggar (OPNA) est désormais accessible au public à Tamanrasset. Cela permet au moins de se faire une idée précise sur les richesses d’un parc national qui fait presque dix fois la surface de la Suisse, soit 450 000 km2, et dont le patrimoine, autant naturel que culturel, remonte parfois à plus de 3 milliards d’années, à l’aube de l’humanité ! L’OPNA, qui existe depuis 1987, est également un vaste terrain de recherches scientifiques dans plusieurs disciplines comme la préhistoire, la géologie et l’archéologie. Farid Ighilahriz, directeur de l’OPNA, revient sur les menaces qui pèsent sur certaines espèces et sur les mesures prises pour lutter contre le braconnage et le pillage. Tamanrasset * A quand remonte l’ouverture du musée de l’Office du Parc national de l’Ahaggar (OPNA) ? Le musée est ouvert depuis le 11 décembre 2009. C’est un musée dédié d’une manière générale au patrimoine du Sahara. Il y a un projet d’un autre musée de dimension nationale dont l’infrastructure a été réalisée sur la route de l’Assekrem. Une étude d’aménagement est en cours d’exécution pour cette structure. On l’appellera probablement Musée national du Sahara. On préfère être large et ne pas se limiter à l’Ahaggar seulement. L’aménagement pourrait durer deux ans. Il y aura des maquettes et des reconstitutions. Il sera un musée thématique et didactique avec une scénographie particulière qui permettra une bonne accessibilité des informations au grand public. Cela dit, le parc national est un lieu de pratique du tourisme culturel et scientifique.Mais, c’est également un important terrain de recherche scientifique dans tous les domaines : géologie, archéologie, anthropologie socio-culturelle, zoologie, botanique, etc. Il y aune forte demande de la part d’institutions, de centres de recherche, d’universités, de laboratoires algériens et étrangers. Nous invitons les étrangers à passer par une institution nationale. La recherche se fait par le biais d’une convention établie avec cette institution. Nous participons à la recherche sur le terrain. Et comment procédez-vous pour engager vos recherches ? Nous utilisons le système d’informations géographiques qui nous permet d’avoir des données et de les traiter avec les moyens informatiques et avec beaucoup de précision. Le parc est habité. Le défi est de lier les exigences du progrès avec les impératifs de conservation du patrimoine. Ce n’est pas facile. Cela dit, nous sommes à chaque fois associés par les autorités locales à toutes les décisions relatives au développement. Nous avons reçu beaucoup de moyens matériels depuis 2003, mais nous avons un manque en matière d’encadrement.
Justement, où se situe le besoin en matière d’encadrement ?
Nous avons besoin immédiatement de spécialistes en écologie, zoologie, botanique, archéologie et en anthropologie. Il n’y a pas de mesures incitatives. Considérant les salaires, la cherté du billet d’avion et l’éloignement, les diplômés ne sont pas intéressés pour venir à Tamanrasset. Au niveau local, on ne trouve pas ces personnes qualifiées. On commence à ressentir les conséquences du manque d’encadrement. Toutes les institutions ici, souffrent de cette carence. Ceux qui sont venus, il y a dix ou quinze ans, commencent à partir. Je tire la sonnette d’alarme donc. Le parc emploie actuellement 500 salariés dont 97 % sont des locaux. Le parc est le plus grand employeur de la région. Nous avons besoin de gens qui ont une connaissance particulière du terrain. Nous avons une bonne collaboration avec le Parc national du Tassili. Nous avons des programmes annuels communs liés à des missions de terrain ou d’inventaires. Le parc recèle beaucoup de richesses en faune et en flore et des vestiges archéologiques.
Quelles sont les menaces qui pèsent sur ce patrimoine ?
Le parc lui-même est une mesure de protection. Au sein de sa superficie, il y a des monuments, des vestiges archéologiques, des éléments de la faune et de la flore ayant une grande importance sur le plan scientifique, qui sont rares et qui sont menacés de disparition ou d’extinction. Les sites archéologiques le sont également. La particularité des vestiges archéologiques du Sahara est qu’ils se trouvent en surface. Il n’y a pas de sédimentation par rapport au Nord où il faut creuser. Ici, les vestiges et les outils préhistoriques sont au ras du sol. Il suffit de connaître, de se baisser et de ramasser. D’où ce caractère fragile des vestiges sahariens. Les plantes et les animaux vivent dans un milieu aux conditions climatiques extrêmes. Ils sont dans de petites niches écologiques. Il suffit de perturber ces niches et c’est toute la chaîne qui est déstabilisée. Le guépard, qui a fait sa réapparition dans l’Ahaggar, est fortement menacé également.
Le guépart est donc menacé ?
Absolument. C’est un prédateur qui se trouve à la tête de la chaîne trophique. Il est vrai qu’il n’a pas de concurrent, mais il est menacé par l’homme. L’homme pense que le guépard est un danger pour son cheptel de chèvres ou de chameaux. Une recherche effectuée par un étudiant algérien fait ressortir l’existence d’une trentaine de guépards dans l’Ahaggar. Il peut y en avoir plus. Nous n’avons pas de chiffres précis. Le guépard saharien vit dans un territoire isolé des autres bêtes, du reste de l’Afrique, comme celles du Niger ou de la Namibie. Cette situation est due à la barrière saharienne. Le guépard de l’Ahaggar n’a pas subi de croisement. C’est ce qui fait son importance.
C’est une souche pure qui vient de loin. Il y a aussi cette pratique du braconnage et de la chasse à l’aide de projecteurs qui menacent les espèces même si elle a baissé en intensité du fait d’une sensibilisation continue des autorités et de la population. Il y a deux types de braconnage : à l’arme à feu et au projecteur et aux pièges. Il y a une quantité considérable de pièges. La chasse traditionnelle est toujours tolérée. Cette chasse sélective participe à la préservation. Les jeunes bêtes et les femelles ne sont pas chassées.
Faut-il adopter une loi sévère contre le braconnage ?
La loi nationale existe et protège différentes espèces menacées. Les animaux sont répertoriés sur une liste. L’amendement de la loi 83/251 en 1996 a autorisé le rajout de certaines espèces comme les chauves-souris. Il y a aussi les lois universelles. Il y a un projet de loi pour la protection de toutes les espèces qui existent en Algérie, au Sahara, dans les montagnes et dans la mer. Ce texte, qui est en préparation, portera une liste complète dressée par le ministère de l’Environnement. Le braconnage n’est pas propre à l’Algérie. Il faut penser peut-être à d’autres moyens par exemple des chasses organisées quand c’est possible. Il faut que les autorités, à tous les niveaux, s’impliquent davantage dans l’application de cette loi et dans la sensibilisation.
On ne protège pas contre la population mais avec. Sans l’aide de la population, on ne peut pas couvrir un territoire de 500.000 km2. Cette aide permet de limiter le phénomène du braconnage et l’atteinte aux végétaux. Il y a un abattage des arbres qui touche surtout les acacias. Cet arbre n’est pas menacé, mais sa destruction est massive. Nous avons l’avantage, ici dans l’Ahaggar, d’avoir des forêts d’acacia. Il y a des endroits où il n’y a aucune atteinte grâce à l’implication de la population. Il ne suffit pas d’avoir des lois ou des agents de surveillance.
Le pillage des œuvres a-t-il baissé ?
Les touristes tendent, il est vrai, à ramasser des objets. La plupart des visiteurs du parc passent par l’aérogare de Tamanrasset. A la sortie, il y a un contrôle des bagages par les policiers et les douaniers. Ils sont assistés par des agents de l’OPNA. Nous avons installé depuis trois ans un poste où nos agents sont omniprésents. On récupère tous les objets. Il s’agit souvent de cailloux ayant des formes ou des couleurs particulières prises comme des souvenirs. Il est vrai que ce n’est pas méchant, mais nous sommes obligés d’être un peu extrêmes pour préserver le patrimoine. Nous ne tolérons pas à ce qu’un grain de sable sorte du parc.
La première année de l’installation du poste, nous avons récupéré énormément d’objets. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Je suppose que cela est dû à la sensibilisation. Il faut que les agences de tourisme s’impliquent dans la sensibilisation des touristes qu’elles ramènent en visite au parc. Nous ne cessons pas de mener des actions. Il existe des agences de voyages qui respectent l’environnement et qui récupèrent ou détruisent les déchets laissés après les bivouacs. Malheureusement, ce n’est pas la cas de toutes les agences. Et là, nous sommes obligés d’organiser, avec la collaboration de certaines agences, des campagnes de nettoyage du site.(El Watan-07.02.2010.)
*** Après l’étude-pilote dans le parc national de l’Ahaggar
Des photos inédites du guépard du Sahara
Jamais nous n’aurions imaginé avoir autant de photos ! » L’émotion de Farid Belbachir, chercheur à l’université de Béjaïa et doctorant à la société zoologique de Londres, est encore intacte. Son étude-pilote – la première en Algérie – menée d’août à octobre 2008 dans le parc national de l’Ahaggar a permis de réunir 300 clichés du guépard saharien, grâce à un dispositif d’une quarantaine de pièges photographiques répartis dans une zone de 2800 km2. C’est exceptionnel, car ces animaux sont insaisissables ! Sur certaines photos, nous ne voyons que des parties du corps du guépard, précise-t-il. Malgré cela, nous avons pu identifier trois mâles différents sur la base de l’arrangement des taches du pelage, unique à chaque individu, et un quatrième animal qui pourrait être une femelle. » Présent dans le désert saharien mais aussi dans les savanes d’Afrique occidentale – Niger, Mali, Bénin, Burkina Faso et Togo –, le guépard du nord-ouest de l’Afrique (acinonyx jubatus hecki) est encore méconnu. Considéré comme l’un des mammifères les plus menacés d’Afrique du Nord, son statut a été revu de « en danger » à « en danger critique d’extinction » sur la liste rouge des espèces menacées publiée en octobre dernier. « Les populations de cette sous-espèce sont réduites et très fragmentées, mais il est probable que l’Algérie abrite la plus grande population, estimée à 250 adultes, précise M. Belbachir. Voilà pourquoi cette étude va nous fournir les données de base capitales qui, plus tard, mises en comparaison avec de nouvelles études, permettront de dire si l’espèce est en progression ou en régression. » La recherche comprend, en plus de l’analyse des photos, celle des excréments collectés sur le site, nécessaire pour déterminer le régime alimentaire des guépards. Enfin, un troisième volet est consacré à une enquête auprès des pasteurs touareg afin d’évaluer la perception des prédateurs par la population locale. Après ce premier test, le chercheur, soutenu par la Wildlife Conservation Society (WCS) Panthera, l’Office du parc national de l’Ahaggar, la Société zoologique de Londres et la faculté des sciences de la nature et de la vie de l’université de Béjaïa, reviendra l’été prochain pour placer de nouveaux pièges photographiques. L’utilisation de ces appareils a par ailleurs apporté de précieuses informations sur… les mammifères locaux. « Plusieurs clichés confirment la présence du très secret chat des sables, s’enthousiasme Farid. Les appareils ont aussi saisi le passage de fennec, renard de Rüppell, chacal, mouflon, gazelle, hérisson du désert ou encore goundi. Encore plus fabuleux, nous avons trouvé sur la zone d’étude une corne d’oryx algazelle, grande antilope éteinte à l’état sauvage. » Une découverte d’une grande importance compte tenu de l’absence d’observations historiques relatives à l’espèce dans cette région. « S’agit-il d’une vieille corne ou trahit-elle la présence de l’oryx ? Rien ne permet de le dire », ajoute-t-il. La corne est conservée au musée de l’Office du parc national de l’Ahaggar. (El Watan-28.02.2009.)
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Sur les traces du guépard de l’Ahaggar
Soudain, il était là. Devant moi, à me regarder sans me voir. Sa silhouette efflanquée à l’arrêt, son odeur fauve puissante.
Je pouvais presque le toucher, plonger ma main dans son pelage moucheté. Le vent sifflant dans la zribat, la caresse rugueuse du sable sur ma peau ou la lune à son dernier quartier y sont peut-être pour quelque chose. Cette nuit-là je rêvais du guépard de l’Ahaggar. Lui que tous rêvent de croiser et que seuls les Touareg rompus aux longues marches dans les lits d’oueds à acacia ont le privilège d’apercevoir depuis que la nuit est nuit. La veille, à Mertoutek, un village à 230 km au nord-est de Tamanrasset, dans la région de la Tefedest, Chounka Khanoufa, agent de conservation au parc national de l’Ahaggar, chèche jaune et djellaba verte, m’avait raconté. La bête prête à attaquer le chamelon. Une femelle, sans doute. Et puis, le berger est arrivé. Amayas (le « peureux »), comme on l’appelle ici, s’est enfui. En réalité, le guépard saharien n’est pas endémique à l’Ahaggar. « En Algérie, on le sait aussi présent dans le Tassili n’Ajjer et dans l’Immidir, explique Farid Belbachir, enseignant à l’université de Béjaïa, actuellement chercheur à la Société zoologique de Londres (Royaume-Uni) dans le cadre de la préparation d’un doctorat sur les aspects de l’écologie des grands félins et les interactions avec les communautés humaines dans le Sahara algérien. « Sa présence est encore possible dans l’ouest de l’Atlas saharien (où certains habitants de la région d’El Bayadh et de ses environs l’auraient peut-être aperçu), les ergs et la région de Tindouf, mais aucune preuve physique ou indices de présence ne sont actuellement disponibles pour l’affirmer avec certitude. » Dans la contrée sahélo-saharienne, l’espèce est également présente avec certitude dans le massif du Termit au Niger, et vraisemblablement dans l’Aïr-Ténéré (Niger), dans l’Adrar des Iforas (Mali) et dans le massif de l’Ennedi (Tchad). Considéré comme l’un des mammifères les plus menacés d’Afrique du Nord, le guépard figure sur l’annexe I de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvage menacées d’extinction (Cites), à laquelle l’Algérie a adhéré en 1982. Cette annexe correspond au plus haut degré de menace et interdit donc tout commerce de l’espèce. Par ailleurs, l’Algérie a récemment mis le guépard sous la protection de la loi sur la chasse de 2004 confortée par l’ordonnance de juillet 2006. L’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN) a enfin classé l’espèce comme « vulnérable » et la sous-espèce présente en Algérie, Acinonyx jubatus hecki, « en danger d’extinction » (voir encadré). Car on sait finalement peu de choses sur lui. Quelques indications sur son biotope – il fréquenterait les grandes vallées et les montagnes où se replier en cas de menace – et sur son comportement – s’il s’approche quelquefois de certains campements, il ne rentrerait pas dans les villages.
Traque punitive
Le reste est encore flou. A commencer par la sous-espèce elle-même, dont l’existence n’a pas encore été étayée par analyse génétique. « Sur la base des observations faites par le photographe animalier Alain Dragesco-Joffé dans le Sahara central du Niger, le guépard nord-africain apparaît plus petit (1,70 m de longueur) et moins lourd (40 à 45 kg) que ceux de l’est et du sud de l’Afrique », précise Farid Belbachir. Son pelage serait aussi plus pâle, avec des taches non pas noires mais ocres, et les anneaux de sa queue seraient moins marqués voire inexistants. Comme il a été rappelé en 2006, lors de la deuxième réunion de l’Observatoire du guépard en régions d’Afrique du Nord (Ogran), il faudrait clarifier en priorité l’identité génétique de la sous-espèce nord-africaine par rapport à celles de l’Iran et de l’est et du sud de l’Afrique. Impossible aussi d’avancer un chiffre sur la population réelle de guépards dans le Sahara. En 1993, Alain Dragesco-Joffé l’a estimée de 300 à 500 individus répartis au Niger, au Tchad et au Mali. En 1989, Koen de Smet, docteur en agronomie, l’a quant à lui évaluée à plusieurs douzaines dans les massifs centro-sahariens. En 2000, un inventaire d’une durée de dix jours dans l’Ahaggar a conclu à au moins 20-30, voire 30-40 individus. « Mais ces estimations ne sauraient refléter fidèlement l’abondance des populations, nuance Farid Belbachir, car elles ne sont le reflet que d’une estimation subjective et non le résultat fondé sur une méthodologie scientifique d’échantillonnage sur le terrain. » Quant à son comportement, rien n’est sûr. « Certains témoignages ne collent pas avec le comportement du guépard tel qu’il est décrit dans d’autres régions d’Afrique », remarque Djazia Ouchen, zoologue à l’Office du parc national de l’Ahaggar. Il se déplacerait en groupe de deux à trois mâles, mais dans le Sahara, certains témoignages le disent solitaire. Dans l’Ahaggar, et toujours d’après les témoignages, le guépard serait un chasseur crépusculaire et nocturne. « Mais on ne peut pas exclure que l’espèce puisse chasser également tôt le matin et l’après-midi quand il ne fait pas très chaud », avance Farid Belbachir. Pour toutes ces inconnues – et les menaces qui le mettent en péril : sécheresse, rareté des proies, dégradation de son milieu naturel – le guépard fait l’objet d’un programme spécial sur la biodiversité en Afrique du Nord et de sensibilisation des populations (voir interview). « Gérer la présence des félins à proximité des populations locales est primordial pour la survie du guépard », insiste le spécialiste. La perte d’un animal domestique entraîne des réactions violentes de la part des bergers touareg qui n’hésitent pas parfois à organiser des traques punitives à l’encontre des prédateurs coupables. « Notre action de sensibilisation, ajoute Farid Ighilahriz, directeur de l’Office du parc national de l’Ahaggar, s’accompagne d’ailleurs d’un projet de compensation financière pour les animaux perdus. » (El Watan-22.05.2008.)
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ENVIRONNEMENT
Étourneaux : du spectacle aux dégâts
Des nuées d’étourneaux peuplent le ciel hivernal dans la région du Tell algérien lors de leur envol vers quelques oliveraies, offrant à nos regards ébahis des chorégraphies d’une rare esthétique et des tableaux changeants d’une incroyable ingéniosité, mais sans vraiment réussir à faire oublier les dommages que ces oiseaux peuvent provoquer sur leur passage. En volant vers leurs habitats, les étourneaux se meuvent en bandes avec une harmonie et une précision étonnantes, un véritable régal pour les yeux. Ces mouvements d’une rare beauté offrent des numéros déroutants, alimentant les plus folles imaginations.Tantôt ils prennent la forme d’oiseaux légendaires géants, tantôt celle d’un monstre sorti de nulle part. Mais le charme, magique et immuable, opère à tous les coups. En Algérie, l’étourneau, qui est une espèce grégaire, vit durant la saison migratoire qui débute fin septembre pour se terminer en avril, dans les oliveraies de la région de Kabylie et à Alger. Il opte le plus souvent pour les villes à grande densité de population. En observatrice avisée des mouvements migratoires animaux, Samira Baya Maziz, ingénieur d’État en protection de l’environnement au Centre cynégétique dans la zone humide de Réghaïa (30km à l’est d’Alger) localise la concentration d’étourneaux à Alger, chaque année du côté du Palais du peuple et, non loin de là, au boulevard des Martyrs pendant l’hiver à leur retour des forêts, où ils auront pris leurs provisions. Pour cette spécialiste en protection de la faune et de la flore au lac de Réghaïa, qui présente un intérêt écologique certain dès l’instant où quelque 203 espèces d’oiseaux y vivent dont 82 aquatiques et 55 classés espèces protégées conformément à la législation algérienne, «le comportement des étourneaux et autres oiseaux est instinctif, car ils reproduisent les mêmes gestes et fréquentent toujours les mêmes lieux». L’étourneau fait partie des espèces non protégées. Il est chassé en grand nombre pour sa chair très prisée. De couleur noire verdâtre, l’étourneau possède deux ailes courtes, triangulaires et pointues et une queue carrée. Il mesure entre 17 et 21 centimètres et pèse 60 à 95g. Son bec jaune est conique, long fin et pointu, ses pattes sont longues brunâtres à rosées et ses yeux marrons. Son plumage est noir moucheté de blanc dans le dos et le bas du ventre. Il vit en bande pouvant regrouper des millions d’individus dans une seule ville. Il salit et provoque des dommages. Le chant des mâles présente d’importantes variations pendant la saison des amours. C’est un pépiement gazouillant à la tonalité aiguë, peu musical, entrecoupé de sifflements, appels, chants imités et cliquetis. l se nourrit de fruits notamment les olives, les cerises et les raisins. Il est peu apprécié par les cultivateurs du bord de la Méditerranée, mais il est apprécié par ceux d’Europe de l’Est, car il y est essentiellement insectivore.
Campagne de surveillance Au regard des nuisances provoquées par ces volatiles, le ministère de l’Agriculture a tenté une large campagne de surveillance des forêts où les étourneaux élisent domicile. Les agents relevant de la direction des forêts de la wilaya d’Alger, a indiqué Abdelghani Boumessaoud, chef de service de protection des forêts, travaillent à déloger ces oiseaux de leur habitat durant plusieurs nuits consécutives pour les chasser de ces forêts ou réduire leur nombre car «le danger de ces oiseaux réside dans leur multitude ». C’est familier aux villes, l’étourneau a pris possession de certains endroits d’où il est difficile de le déloger. Sa préférence va à l’environnement urbain et tout particulièrement l’éclairage nocturne. En effet, c’est un oiseau diurne qui dispose d’une très mauvaise vision nocturne.Yahi Karima, conservatrice au Jardin d’essais du Hamma a, pour sa part, estimé que ces oiseaux habitent en hiver au jardin anglais du parc qui se distingue par des arbres aux branches très grandes qui peuvent supporter un grand nombre d’oiseaux. Pourtant, «quand on regarde au loin la venue de ces bandes d’étourneaux, en masse noire compacte, une joie immense envahit les coeurs», s’enthousiasme MmeYahi tout en déplorant la mort de beaucoup d’entre eux lors de cette cohue. Cette spécialiste confie que l’étourneau a contribué à la pousse d’oliviers au Jardin d’essais (Alger) sur 30 ha du fait qu’il ramène les graines dans son estomac lors de ses passages dans les oliveraies de Kabylie. Mais les dommages causés par ces oiseaux (fientes, branches d’arbres cassés, moissons détériorées) ont conduit les spécialistes en environnement et les ornithologues à étudier leur comportement afin de mieux prévenir les dégâts qu’ils peuvent occasionner sur leur passage, et certains pays européens organisent régulièrement des campagnes pour les chasser de leurs lieux de nidification. (Le Courrier d’Algérie-07.02.2010.)
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