Gouvernance
* La crise économique actuelle n’est pas la conséquence de la baisse du pétrole, mais de l’absence de vision des gouvernements algériens depuis l’indépendance
***Mohamed Haddef, président du MNE, homme politique lucide et intellectuel de sa génération, a accepté volontiers de répondre aux questions de L’Expression dans lesquelles il a abordé les sujets qui marquent l’actualité nationale.
*L’Expression: L’actualité nationale bouillonne, des échanges de propos houleux entre les pro-pouvoir d’un côté et l’opposition de l’autre se font entendre; où se situe le MNE dans ce débat?
—Mohamed Haddef: Effectivement, il y a un bouillonnement de l’actualité nationale, mais excusez-moi de vous dire que le niveau du débat entre les deux parties que vous avez citées,est très en deçà des évènements qui marquent l’Algérie et encore bien plus bas des attentes des citoyens. Les pro-pouvoir et l’opposition vous m’excuserez le terme, sont en train de commenter des faits divers et des questions banales. Les uns comme les autres sont en manque flagrant d’imagination et de propositions.
*Justement, ces deux parties s’apprêtent à organiser chacune de son côté son rassemblement pour unifier les rangs et décider des actions à engager à l’avenir. Etes-vous convié à ces rassemblements qui vont avoir lieu le même jour, à savoir le 30 du mois en cours exactement:
—Oui, j’ai eu des invitations de la part des deux parties. Mais, j’ai décidé de ne pas être présent dans aucun de ces deux rassemblements. Mes raisons pour ne pas assister au rassemblement de la Coupole, ont trait à mes convictions de quelqu’un qui s’est toujours mis du côté du peuple. Donc participer à ce rendez-vous, c’est en quelque sorte pour moi trahir la confiance que les Algériens ont toujours placée en moi et en outre, cela va en contradiction avec mes positions de quelqu’un qui est toujours resté loyal. Pour celui de Zéralda, mes raisons d’être absent ce jour-là, sont d’un autre ordre. Elles sont liées beaucoup plus au fait que parmi les invités qui seront présents à ce rassemblement, il y a des personnes à côté de qui s’asseoir m’est insupportable et irritant.Cela ne veut pas dire que je ne souhaite pas de la chance et du courage aux deux parties dans leurs travaux.
*Revenons à l’actualité nationale marquée ces derniers mois par la crise économique et financière facteur premier de la chute des prix du pétrole. Le gouvernement a pris des mesures et se dit qu’il a trouvé un nouveau modèle économique pour le pays. Que pensez-vous des décisions prises jusqu’ici?
—Au sujet de la crise économique, permettez-moi de vous clarifier une chose tout d’abord. La crise économique dont vous parlez n’est pas la conséquence première de la baisse des cours du pétrole, mais de l’absence de vision auprès des gouvernements algériens qui se sont succédé depuis l’indépendance et n’ont pas su trouver autre chose d’autre sur quoi compter que les revenus du pétrole. De là, il ressort que la crise économique que traverse le pays est avant tout politique et pour cela; il faut des solutions politiques. Le Premier ministre dit avoir trouvé un nouveau modèle économique De quel modèle parle-t-il? Pour sortir l’Algérie de la crise et la mettre à l’abri des crises qui se profilent à l’horizon, il n’y a qu’une solution, c’est celle de retrouser les manches et agir dans le sens d’orienter l’économie algérienne vers le développement des secteurs de l’agriculture, l’industrie, les services et le tourisme.Pour ce faire, je reviens encore une fois pour dire qu’il faut une décision politique.
*En plus de la crise économique, l’Algérie fait face à une situation sécuritaire très détériorée, notamment sur ses frontières avec les pays voisins. Pensez-vous que cette menace est réelle ou un petit peu exagérée?
—Cette menace certes se pose et est réelle, mais je ne crois pas du tout qu’elle est aussi grave que l’Etat l’a décrite. Les images que montrent les télévisions faisant état de l’arrestation des terroristes qui font rentrer des armes ne me convainquent guère qu’il s’agit de terroristes. Pour moi, c’est un réseau de trafiquants d’armes qui s’est développé ces derniers mois. Ce réseau est aussi vieux que nos frontières. L’Armée algérienne est l’une des plus professionnelles du monde. Elle n’a pas besoin de montrer ses exploits. Elle a besoin par contre du renforcement de ses équipements, de ses moyens et d’une assurance de la carrière de ses effectifs. L’Etat algérien qui se plaît à montrer ces images ne fait qu’augmenter la peur auprès des citoyens.
*Pour conclure cet entretien, le MNE prévoit-il des actions à engager à l’avenir et dans l’affirmative, quelles sont-elles?
—Le MNE compte organiser à l’avenir un congrès pour réunir tous ses militants et ce, dans le but de donner un nouveau souffle au parti. En plus de cela, je compte organiser un peu partout des conférences à travers le territoire national pour aller à la rencontre des citoyens de l’Algérie dont j’ai toujours été proche. *Par Madjid BERKANE - Lundi 28 Mars 2016/ L’Expression
***Sous le slogan de « L’Algérie appartient à tous les Algériens », le président du Mouvement national d’espérance a annoncé hier sa candidature à la présidentielle d’avril 2014 et s’engage à apporter sa pierre à l’édifice du pays.
S’exprimant lors d’une conférence de presse qu’il a animée à l’hôtel Es-Safir d’Alger, le Dr Mohamed Hadef ne cache pas ses intentions et ambitionne de surmonter l’étape de la collecte des signatures pour ne pas connaître la même mésaventure qu’il a vécue en 2009.
C’est pourquoi, il a appelé le ministre de l’Intérieur à mettre à la disposition de tous les candidats d’un nombre suffisant de formulaires des signatures et à surveiller de près le comportement de certains notaires et huissiers de justice dans l’opération de la légalisation de ces signatures du fait de leur appartenance partisane.
« Il est primordial d’assurer des élections propres, honnêtes et surtout justes et ce, dès le début du processus afin que les résultats soient incontestés. Ce qui induit la nécessité de mettre tout le monde sur un pied d’égalité à travers l’impartialité de l’administration et des médias lourds », a-t-il indiqué, plaidant au passage pour des critères objectifs pour tout candidat désirant entrer dans la bataille des présidentielles.
« Le Président de la République doit rassembler et unir toutes les forces vives de la nation et créer la confiance entre l’Etat et le peuple. C’est beaucoup plus un engagement qu’une multitude de promesses sans lendemains mais toutefois, le peuple a le droit de connaître tous les candidats », a suggéré le président du MNE. Revenant à sa candidature, le Dr Mohamed Hadef explique sa décision par son souci de ne pas être un observateur « passif » sur ce qui se passe sur le terrain politique et de son désir de faire barrage à ceux qui ont le « monopole » en politique.
« Le MNE n’est pas un comité de supporters pour soutenir tel ou tel candidat. Nous avons jugé utile de ne pas nous tenir à l’écart de cette bataille électorale et nous sommes de ce fait prêts à relever les défis, car l’Algérie a besoin de tous ses enfants », a-t-il réagi à une question concernant une éventuelle participation du Président de la République pour un nouveau mandat.
Et d’enchaîner : « Certaines voix s’élèvent ici et là et crient sur tous les toits que notre l’Algérie ne possède pas des hommes capables de gouverner notre pays. A ces gens, je dis et je le répète, les Algériens ne sont pas tous des idiots et il existe dans ce pays des femmes et des hommes sincères, honnêtes et capables de relever les défis », a conclu le candidat à la présidentielle.*mardi 14 janvier 2014/ Source de l’article : Elmoudjahid
S. A. M.
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*On a saboté, détourné et bradé des pans entiers de l’économie nationale
* improvisation, fuite en avant et incompétence arrogante
L’éminent professeur Omar Aktouf, économiste de renom, membre fondateur du groupe de recherche Humanisme et gestion, dresse dans cet entretien un diagnostic critique de la situation socioéconomique du pays et alerte sur les risques d’un scénario comparable à celui de l’Argentine en 2003. Il estime que «le proche avenir fait craindre une explosion de la rue ou, pire, une explosion accompagnée des chants de vilaines sirènes qui psalmodient le long de nos frontières».
**L’Algérie traverse une situation extrêmement difficile et complexe marquée par un blocage et un statu quo politiques auxquels s’est greffée une grave crise économique due à la baisse des revenus des hydrocarbures. Quel regard portez-vous sur la situation économique et sociale du pays ?
—Un regard attristé et pessimiste. Mais sans étonnement, car ce qui arrive était prévisible, crise pétrolière exogène ou pas. Cette dernière est la goutte qui accélère les choses et fait déborder un vase qui a atteint le trop-plein depuis longtemps. Ce trop-plein, c’est la permanence d’un régime de clans et de mâarifa, dictatorial, incompétent, illégitime et corrompu.
Ce régime que je dénomme «système Algérie» ne dissimule plus ni ses tares ni ses pratiques cyniques, jusqu’à s’octroyer des Constitutions sur mesure, selon ses besoins. Cette crise économique – et celle sociale qui l’accompagne inévitablement – peut autant être un déclencheur (mèche de mise à feu) qu’une source de grands désordres.
La situation difficile et complexe dont vous parlez couve depuis des décennies. Elle est le fruit de l’abandon progressif, au nom de «l’ouverture» vers l’«économie de marché», de politiques antérieures plus dirigistes et plus responsables. Politiques qui, vaille que vaille, étaient en train de fournir l’Algérie en main-d’œuvre qualifiée, cadres professionnels, programmes agricoles, biens d’équipement et de production.
Toutes les choses qui auraient pu nous mettre sur la voie d’un développement autocentré (Corée, Malaisie, Chine…) et de sortie de l’hyper-dépendance aux hydrocarbures. Au nom du dieu «marché» et de son archange, le «secteur privé», on a saboté, détourné et bradé des pans entiers des bases de l’économie nationale. On a abdiqué – cédant aux sirènes des ajustements structurels – toute responsabilité-souveraineté étatique sur l’économie. Le modèle néolibéral adopté n’a jamais fonctionné, point ! L’entêtement dans cette voie nous mène logiquement vers un état de quasi-chaos dès lors que les flux de dollars pétroliers rétrécissent.
**L’Algérie est déjà passée par des crises similaires et ses dirigeants avaient compté sur une hausse des prix du pétrole pour s’en sortir. Aujourd’hui, les meilleurs pronostics donnent encore deux années au Fonds de régulation des recettes (FRR) pour faire face aux dépenses publiques. Est-ce une perspective rassurante en vue de la situation très fragile et aléatoire du marché pétrolier ?
—Le contexte de la présente crise est plus grave que ceux des précédentes, y compris celle de 1985-1986. Aujourd’hui, l’Algérie fait face à la conjonction d’une triple crise aux ramifications autant endogènes qu’exogènes. La facette endogène est en grande partie celle dont je traite plus haut : la facilité de se contenter de vendre pétrole et gaz pour tout importer et acheter, y compris la paix sociale.
L’euphorie du prix du baril à plus de 100 dollars a démultiplié improvisation, fuite en avant et incompétence arrogante. Si on combine cela au fait que le «privé» compte pour moins de 2 à 3% dans l’activité économique globale, que la partie invisible de son iceberg est largement extravertie (import-import et exportation de profits), opaque et informelle (au moins à 50% : gouffre insondable de corruption, détournement, blanchiment). Avec les fortunes d’oligarques pesant des dizaines de milliards de dollars qui ne cherchent qu’à fuir un bateau qui coule, on a un portrait des plus inquiétants.
Comme je l’avais prévu et annoncé lors de la réunion du CNES en septembre dernier, autant le FRR que les réserves en devises fondent à grande vitesse, tandis que les déficits du budget, du Trésor, des paiements s’envolent. Je crois optimiste de penser que l’on peut encore tenir deux ou trois années ainsi. Le 6 janvier dernier, la Banque d’Algérie tirait d’inquiétantes sonnettes d’alarmes : le FRR fond de plus de 40% en un an (de 3000 milliards de dinars en 2015-2016 à moins de 1800 milliards), tandis que les réserves perdent 35 à 40 milliards de dollars, que le déficit commercial et les rentrées en devises prennent des directions inverses… La facette exogène, elle, est triple : dégringolade des prix pétroliers et morosité chronique de l’économie mondiale, d’un côté, et hausse d’agitations menaçantes à nos frontières de l’autre. Donc, hélas, je dis non pour l’optimisme. Les perspectives sont peu rassurantes !
**Le système rentier a plus que jamais montré ses limites. Le gouvernement vante aujourd’hui les mérites de l’économie diversifiée mais peine à lui donner corps. Est-il encore possible de sortir de la rente et comment ?
—Sortir de la rente des hydrocarbures ne peut se faire d’un coup de baguette magique. Vanter la diversification est une chose, la concrétiser en est une autre ! On n’aurait jamais dû ralentir, encore moins saccager (éparpillement des pouvoirs de l’ère Boumediène) les importantes installations de transformation pétrochimique, par exemple. Voilà un secteur où on aurait pu développer un immense terreau de diversification, les dérivés du pétrole se comptant en dizaines de milliers.
Par ailleurs, diversifier n’est synonyme ni de déchiqueter ni de brader. Par essence, le secteur privé cherche à «faire de l’argent», non à tisser une toile industrielle intravertie et complémentaire entre filières. Noircir le tableau des échanges interindustriels est le dernier de ses soucis. Or, sous la houlette du FMI et autres officines vouées à la défense des intérêts des multinationales, on a confondu privatiser et diversifier : le dieu «marché» s’en occuperait automatiquement.
Au moment où les succès de Trump et de Sanders ne s’expliquent pas autrement, le peuple américain crie fort qu’il en a assez du modèle néolibéral en général, et américain en particulier, nous continuons à recevoir en pompe des émissaires du FMI qui s’entêtent à nous donner des leçons à l’aide de la même pensée magique qui prévaut depuis 40 ans. Cela fait trois ou quatre décennies que ces gens défendent exclusivement les intérêts des patronats (économie dite «du côté de l’offre»).
On ne cesse d’en voir les effets désastreux et on continue ! Sortir de la rente, c’est d’abord sortir du néolibéralisme et du «système Algérie». L’absence de confiance en nos institutions explique l’échec du programme de «déclaration volontaire taxée à 7%» et handicape déjà celui de l’emprunt national à 5% annoncé.
**Les ressources en hydrocarbures ont toujours été perçues à la fois comme une bénédiction mais aussi comme une malédiction, tant elles servent l’économie rentière. Le froid qui touche aujourd’hui le thermomètre pétrolier est-il une chance pour en finir avec le système de la rente ?
—Hélas, c’est bien plus le côté malédiction que l’on voit. On a honteusement dilapidé les revenus de nos hydrocarbures comme des gamins et gaspillé les énormes potentialités qu’on aurait pu utiliser intelligemment pour planifier l’après-pétrole. Aujourd’hui, nous sommes face non pas à une «chance» mais à une «impasse» qui nous met dos au mur… sans avoir la moindre idée de la façon dont on pourrait franchir ce mur. Nous n’en avons pas non plus les moyens car un significatif rebond des prix du pétrole n’est sur aucun radar, tandis que nos quantités à l’exportation sont en baisse dangereusement tendancielle.
Ce «froid» du thermomètre des hydrocarbures ne nous sera d’un quelconque bénéfice que s’il sert d’abord à chasser, urgemment, ce «système Algérie» qui n’est plus que cynisme et gabegie. Ensuite, il faudrait mettre au pas ladite «économie informelle», rendre plus intravertis et plus «nationalistes» nos oligarques devenus Etats dans l’Etat.
Enfin, mettre sous contrôle de plans étatiques de grands chantiers prioritaires et «structurants». De l’agriculture à la technologie 4G en passant par la formation de main-d’œuvre productive… (et non de milliers de MBA et de pseudo docteurs en gestion dits DBA qui non seulement perpétuent indûment le néolibéralisme, mais vont finir, au rythme où se multiplient ces cursus, par devoir se gérer entre eux) !
Méditons ce qu’ont fait la Malaisie, la Russie sous Poutine, l’Islande avec son système financier étatisé depuis 2008, ou l’Argentine avec un strict contrôle des IDE depuis sa crise de 2003.
**Un risque majeur plane sur les entreprises publiques avec une loi de finances qui ouvre grand la voie aux privatisations. Qu’en pensez-vous ?
—Cela indique que les vieilles potions (ajustements structurels…) du FMI et ses satellites sont encore, malgré leur échec un peu partout, à l’ordre du jour. Je crains pour notre pays ce qui est arrivé à l’Argentine. Classée alors «meilleure élève du FMI», elle a sombré dans le chaos en 2003. Ce pays s’est retrouvé, dès la fin des années 1990, à n’être plus propriétaire de pratiquement rien de son économie et de ses services publics. Tout ce que générait son économie s’expatriait à grands flots.
La spirale est simple : comme il n’y a aucune personne morale ou physique propre au pays ayant accumulé suffisamment de «capital primitif», tout s’est retrouvé bradé, aux mains de clans liés au vampirisme des multinationales telles ITT, ATT, Vivendi. L’extraversion de l’économie avait atteint de telles proportions qu’en 2003, le pays était en banqueroute. Jusqu’à aujourd’hui, l’Argentine doit payer à des fonds vautours de Wall Street des sommes colossales en intérêts sur des rachats à la baisse de sa dette.
Je ne suis pas contre le principe de privatisation en soi. Mais qu’on privatise avec prudence, discernement… et sous conditions. Ce qui relève des besoins essentiels du citoyen, de la souveraineté de la nation, des ressources stratégiques, des biens publics ne peut être confié à des intérêts privés et encore moins étrangers.
Tout cela me semble primordial à rappeler, à l’heure où la presse occidentale titre un peu partout «Le constat d’échec des thèses libérales» (voir notammenthttp://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/464476/perspectives-echec-des-theses-liberales) citant les rapports de l’ONU, de l’OCDE, du PNUD… et du FMI lui-même (qui stigmatise les politiques d’austérité !).
**Le couple austérité-privatisation est pourtant ce que propose le gouvernement. Est-ce une réponse appropriée à la situation actuelle ? Le libéralisme sauvage peut-il être une option dans une situation géopolitique des plus sensibles ?
—Ce couple austérité (toujours sur le dos des plus vulnérables) et privatisation est la mortifère combinaison qui a conduit l’Argentine au chaos de 2003. Voulons-nous cela pour l’Algérie ? Regardons aussi l’Europe (les cas grec, espagnol, portugais, italien) qui, avec son arsenal d’assises économiques séculaires, d’institutions ancrées et huilées, sa pléthore d’experts, ne sait toujours pas, depuis 2008, où donner de la tête ; elle en est toujours à tâtonner pour se sortir de cette crise.
On y a tenté toutes les recettes de l’arsenal néolibéral, y compris le couple «austérité-privatisation» et même les plus contradictoires comme l’alternance entre rigueur, expansion monétaire, mesures de relance… rien n’y fait. A tel point qu’on a recours aujourd’hui à des mesures suicidaires dont les effets sont de véritables trous noirs. Les suicidaires relèvent de l’abdication sans conditions devant les forces transnationales de l’argent et des magouilles financières : Google, Facebook, Microsoft… qui fraudent le fisc, privant les Etats de titanesques revenus.
Ainsi, Londres vient d’annoncer, emboîtant le pas à l’Irlande qui taxe les profits à 13%, un taux maximal d’imposition de 17%… pour faire affluer, par exemple, des entreprises taxées à 30% en France. A ainsi se faire la lutte à qui taxera le moins le grand capital, toutes ces nations coupent les branches sur lesquelles elles sont assises. Les «effets trous noirs», eux, sont ces plongeons vers l’inconnu comme les taux d’intérêt négatifs ou les recours aux «hélicoptères à billets» (forcer le regain des prix par «arrosage» massif de liquidités).
Si pour la toute-puissante Europe tout cela ne fonctionne guère, comment espérer que cela fasse des miracles chez-nous ? Citons, à propos du «marché» et du «privé», le célèbre Adam Smith, qu’on ne peut soupçonner d’antilibéralisme : «Laissez trois businessmen faire du business sans surveiller ce qu’ils font et vous avez trois brigands !» ; «Les gouvernements doivent recevoir avec la plus grande défiance toute proposition venant de gens d’affaires. Celle-ci ne doit être adoptée ou transformée en règle ou en loi qu’après un long et sérieux examen, non seulement avec la plus scrupuleuse mais la plus soupçonneuse des attentions».
Avec un grand déficit budgétaire, un pouvoir autoritaire et décrié, un voisinage livré à l’insécurité, comment voyez-vous le proche avenir de l’Algérie ?
Combinons l’accélération des différents déficits, la décélération des revenus internes et externes, la baisse tendancielle des prix du pétrole et du gaz, la baisse vertigineuse du dinar, la hausse de la consommation interne en hydrocarbures et la baisse tendancielle de leur production, l’ampleur inconnue des fuites de capitaux du privé, des oligarques, des clans divers et de l’informel, l’indigence de nos capacités de substitution aux importations, l’indigence de nos capacités installées de production locale, de main-d’œuvre qualifiée, la non moins indigence de pensée économique, de légitimité et de compétence aux plus hauts niveaux, le ras-le-bol social… et nous sommes devant, au mieux, un fort probable chaos de type Argentine de 2003 ou, au pire, si on y ajoute les menaces à nos frontières, un scénario de type «printemps arabe».
On nous parle d’un imminent «nouveau modèle économique». Personnellement, je m’en réjouis puisque c’est ce que je prône depuis des décennies. Mais c’est sans doute trop peu et trop tard. Et puis, à lire les bribes qui filtrent de-ci de-là, je ne vois pas grand-chose de nouveau à revisiter des litanies creuses telles que «diversification», «économie du savoir», «nouvelles technologies», «renforcement des capacités managériales», «dynamisation de la Bourse», «libéralisation du commerce extérieur»…
Ce n’est qu’un éternel recommencement de la même chose, c’est-à-dire du vide néolibéral, du captage de la rente… Rien de sérieux ! Las ! Le «proche avenir» sous de tels auspices, me fait craindre une explosion de la rue ou, pire, une explosion accompagnée des chants de vilaines sirènes qui psalmodient le long de nos frontières. *Nadjia Bouaricha/ el watan/ mardi 29 mars 2016
**Qui est Omar Aktouf?
Cet ancien cadre supérieur dans l’industrie est bardé de diplômes, depuis la psychologie industrielle jusqu’au management, en passant par l’économie de gestion et le marketing.
*Né en 1944 en Algérie, Pr Omar Aktouf est l’un de nos compatriotes qui ont réussi individuellement en s’installant au Canada, au début des années 1980. Membre fondateur du groupe Humanisme et Gestion et militant pour une économie mondiale plus juste et plus solidaire, ce dernier a un parcours très atypique, à la fois, varié, interculturel et international. En une trentaine d’années, Omar Aktouf, qui est passé «du monde de la gestion, en tant que cadre, à celui des universités et de la consultation internationale», en se faisant une réputation de pourfendeur de la pensée néolibérale. Il est l’auteur de nombreux ouvrages universitaires et sociétaux, traduits en plusieurs langues, dont «Algérie : entre l’exil et la curée», «La stratégie de l’autruche» et «Halte au gâchis», réédités par la maison d’édition algérienne Arak. Ses travaux lui ont valu des récompenses et distinctions internationales. En 2011, il est déclaré penseur attitré de HEC Montréal, parmi les 75 personnalités les plus marquantes de l’histoire récente du Canada. Dans son livre «Algérie, entre l’exil et la curée», publié en 1990 chez L’Harmattan (France), Pr Aktouf, pur produit de l’université algérienne, qui s’est ensuite perfectionné sous d’autres cieux, apporte son témoignage sur les vingt premières années de l’Algérie indépendante, qui ont vu défiler premiers présidents de la République. Il parle de ses «rêveries» à l’indépendance, de sa vie et de la situation du pays, qui glissait déjà dans les abîmes, mais aussi de ses « illusions » et de son « exil volontaire » au Canada, en 1983, à l’âge de 40 ans «avec femme et 4 enfants, la mort dans l’âme, pour reprendre à zéro une vie, une carrière, une société…». Dans les deux autres ouvrages, «Halte au gâchis» (ed. Liber-Montréal, 2008) et «La stratégie de l’autruche», (ed. Ecosociété- Montréal, 2002), l’auteur nous éclaire sur le milieu des affaires et sur le «dieu marché», en mettant à nu « les traficotages des puissants ». Mais, son attention est portée sur l’éducation et surtout sur l’urgence de mener « une profonde et sérieuse autocritique et remise en question» de la pensée économique et managériale à l’américaine. Il s’en va régler également des comptes «intellectuels», en tentant de rompre avec le raisonnement «dominant», pour mieux démonter l’économie néoclassique-néolibérale, à l’origine de l’injustice faite à toute la planète. Une planète accablée par l’injustice, qui fait face à «225 milliardaires (possédant) l’équivalent de l’avoir de 2 milliards de personnes, (…) 51 sociétés (figurant) parmi les 100 premières ‘’économies’’ du monde», alors que 3 milliards d’individus, soit la moitié de l’humanité, vivotent avec moins de 3 dollars par jour. Signalons que «La stratégie de l’autruche» a reçu le prix du meilleur livre d’affaires, en 2003. La réédition algérienne comporte deux préfaces, celle de l’économiste- chercheur Abdelhak Lamiri et de Federico Mayor Zaragoza, ancien directeur général de l’Unesco. Dans un avis intitulé «Un ouvrage qui nous éviterait bien des déboires», M. Lamiri avertit que ledit livre est matière à réflexion en Algérie.*source: Liberté/ 26 février 2015
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* pour ne pas perpétuer l’amalgame entre pouvoir et Etat
*Des lois et de leur application
La loi la plus opportune ne peut donner plus que ce qui lui est demandé. Les lois fondamentale (Constitution), électorale, sur les partis politiques, la presse et l’audiovisuel organisent chacune – pour ce qui la concerne – le fonctionnement de la société et les rapports sociétaux. Dès lors, ces lois aussi congrues soient-elles, ne peuvent aller au-delà de leur décret d’application. Or, la congruence de la loi est le noeud gordien de toute bonne gouvernance. Cependant, ceux-là mêmes qui prônent la bonne gouvernance, l’Etat de droit et pour tout dire, la démocratie, agissent de telle sorte que ces pratiques qui font le citoyen et créent la citoyenneté, demeurent virtuelles. La gouvernance, les libertés, les droits de l’homme perdent-ils ainsi leur sens premier et leur signification pour une population dépossédée de ses droits les plus élémentaires de dire et d’agir. C’est de l’intérieur même de l’Etat que des actions sont diligentées pour perpétuer l’amalgame entre pouvoir et Etat, entre gouvernants et institutions, neutralisant de facto le fonctionnement normal de l’Etat. Or, ces hommes de pouvoir ont, en tout état de cause, des comptes à rendre de leurs actes de pouvoir aux citoyens qui les ont élus. Rendre compte, aux institutions qui les ont nommés, sur leur gestion des affaires de l’Etat. De fait, une certaine confusion est entretenue autour des droits et devoirs des hommes en charge des affaires du pays. Aussi, lorsque des hommes, en marge des lois de l’Etat, usent des moyens de l’Etat pour contrôler toute opposition, monopolisent les moyens de communication de l’Etat, il est alors opportun de s’interroger sur le fait que ces dysfonctionnements ne relèvent pas d’un Etat de non-droit. Il en est ainsi des affaires de redressement du FLN, de la manipulation de la justice, de l’assainissement de l’administration et des entreprises publiques, de l’usage à profusion des moyens et de l’argent de l’Etat. Des faits, que la presse, quelle que soit sa coloration politique, rapporte quotidiennement, qui jurent avec ce qui est attendu de la bonne gouvernance et de l’Etat de droit. Aussi, quels garde-fous prémunissent-ils l’Etat contre les dépassements de ses commis, préjudiciables à son crédit? Qui ne se souvient de l’aveu du juge qui eut le triste privilège d’invalider le 8e congrès du FLN, qui admettait:«Je ne veux pas jouer avec le pain de mes enfants». Est-il besoin de traduire ce qu’il entendait par là? Lorsque les choses arrivent à de telles extrémités c’est que la loi ne correspond pas, ne peut concorder avec l’intérêt général de la société dès lors qu’elle est mise au service d’individus. C’est l’indépendance des institutions de l’Etat qui est ainsi sérieusement bridée. Et ce ne sont pas les déclarations emphatiques, à consommation extérieure, qui valideront ou conforteront un Etat de droit dont les actes et les pratiques démentent chaque jour. En conséquence, il n’est point surprenant que le gardien de la constitutionnalité des lois et jugements admet que son mandat n’était pas de dire: «La Constitution, toute la Constitution, rien que la Constitution», dixit Mohamed Bedjaoui, ancien président du Conseil constitutionnel dans une réponse à Mohamed Djeghaba, à propos de la bataille autour du FLN. «Il est parfaitement absurde d’attendre d’une Institution, si haute soit-elle, dès lors qu’elle ne possède pas une compétence générale et que toutes ses attributions sont cadenassées (…), qu’elle aille redresser des dysfonctionnements ou suppléer des carences qui ont, au fil des années, affaibli notre Etat.»
M Bedjaoui, outre l’aveu de l’impuissance du Conseil qu’il a présidé, résume le mieux les limites d’une loi en rapport avec son décret d’application. Plus le décret est conçu dans l’esprit de la loi plus son applicabilité est positive, plus il est verrouillé plus ses attributions sont restreintes. La démocratie, outre l’esprit des lois, c’est singulièrement leur décret d’application qui la détermine. (L’Expression-05.05.2011.
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*Le nouveau gouvernement, conduit par le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune
*** jeudi 25 mai 2017
**Mokhtar Hasbellaoui, un clinicien ministre de la Santé
le 26.05.2017 |
Ministre de la Santé depuis 2013, Abdelmalek Boudiaf est remplacé par le professeur Mokhtar Hasbellaoui.
En réunion pour l’élection du président de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à Genève, le nouveau ministre est rappelé pour la passation de consignes, ce vendredi , avec l’ancien qui venait juste de quitter la capitale suisse. Mokhtar Hasbellaoui est l’actuel directeur de l’Institut national de la santé publique (INSP).
Un établissement qu’il gère depuis une année. Il vient juste aussi de décrocher le poste de chef de service ORL du CHU Mohamed Lamine Debaghine de Bab El Oued à Alger. Récemment, il assurait aussi l’intérim de chefferie de c-service de CHU Tizi Ouzou. Il est aussi président du conseil scientifique du CHU et de la faculté de Tizi Ouzou. «Nous considérons que ce changement était nécessaire, vu la situation du secteur de manière générale.
Un secteur marqué par des dysfonctionnements et ébranlé par plusieurs scandales (vaccins, RHB, pénuries de médicaments…)», déclare Lyès Merabet du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP). Pour le syndicaliste, le changement permettra le rétablissement du dialogue avec le partenaire social rompu avec le désormais ex-ministre. Merabet affirme la «disponibilité du syndicat» à travailler de concert pour construire des solutions aux problèmes du secteur. Pourvu que le nouveau ministre, clinicien, spécialiste en ORL, ne fasse pas la sourde oreille.
*el watan / vendredi 26 mai 2017
*****Il succède à abdelmalek sellal
Le pari difficile de Tebboune
Abdelmadjid Tebboune est depuis hier le nouveau Premier ministre. Sa nomination intervient moins de 24 heures après l’installation du président de l’APN, mettant ainsi fin à toutes les spéculations nourries ces derniers jours autour de la reconduction de Abdelmalek Sellal à la tête du gouvernement. L’ex-ministre de l’Habitat devrait constituer son gouvernement dans les tout prochains jours. D’aucuns avancent quelques changements de portefeuilles ministériels. Lesquels et selon quels critères ? La question reste posée.
Ni Abdelmalek Sellal ni Ahmed Ouyahia ! La chefferie du gouvernement a été confiée, finalement, à Abdelmadjid Tebboune. Une grosse surprise ! En effet, la présidence de la République a annoncé, hier après-midi, la nomination de l’actuel ministre de l’Habitat à la tête du Premier ministère en remplacement de Abdelmalek Sellal qui a présenté la démission de son gouvernement au chef de l’Etat.
«A la suite de la proclamation, par le Conseil constitutionnel, des résultats définitifs des élections législatives et de l’installation de la huitième législature de l’Assemblée populaire nationale, M. Abdelmalek Sellal, Premier ministre, a présenté ce jour à son Excellence, M. Abdelaziz Bouteflika, président de la République, sa démission et celle du gouvernement», lit-on dans un communiqué de la présidence, diffusé par l’APS. «Le président de la République a félicité Abdelmalek Sellal, Premier ministre sortant, et les membres du gouvernement pour le travail qu’ils ont accompli.
Conformément à l’article 91, alinéa 5 de la Constitution, le président de la République a, après consultation de la majorité parlementaire, nommé Abdelmadjid Tebboune, Premier ministre», indique la même source, précisant que le nouveau premier responsable de l’Exécutif prendra ses fonctions dès ce matin. En attendant la nomination du nouveau gouvernement, le chef de l’Etat, ajoute le communiqué de la Présidence, «a chargé les membres du gouvernement démissionnaire de vaquer aux affaires courantes de leurs secteurs respectifs». La désignation de Abdelmadjid Tebboune au poste de Premier ministre n’était pas, rappelons-le, prévue dans les «pronostics» des observateurs de la scène nationale.
Depuis les élections législatives du 4 mai dernier, les rumeurs évoquent tantôt la reconduction de Abdelmalek Sellal, tantôt son remplacement par le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia. Le désormais ex-Premier ministre avait même entamé des consultations avec des partis politiques en vue de la constitution du nouveau gouvernement.
Cette initiative a fait penser à de nombreux observateurs, y compris aux responsables des partis au pouvoir, que Abdelmalek Sellal allait être reconduit. Même le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbès, qui prétend être proche du président Bouteflika, avait affirmé que Sellal était maintenu. Il n’en est rien. Abdelmadjid Tebboune, dont le nom a été cité par le passé comme un prétendant au poste de Premier ministre, parvient ainsi à son objectif.
Quel gouvernement et pour quels objectifs ?
Le nouveau Premier ministre devra former son gouvernement dans les tout prochains jours, voire les prochaines heures. Mais quelle sera sa composante ? Il est fort probable que les partis au pouvoir, en l’occurrence le FLN et le RND, se tailleront la part du lion dans le staff de Abdelmadjid Tebboune.
Ayant obtenu la majorité des sièges à l’APN, ces deux formations ont toujours eu la majorité des postes dans le gouvernement. Le MPA de Amara Benyounès et TAJ de Amar Ghoul pourront aussi avoir quelques places dans la nouvelle équipe gouvernementale qui sera appelée à trouver des solutions à la crise économique actuelle qui s’exacerbe de plus en plus.
Trouvera-t-il des profils en mesure de booster les secteurs qualifiés de stratégiques, en l’occurrence le tourisme, l’agriculture et l’industrie ? Le nouveau Premier ministre débloquera-t-il la situation dans le secteur des BTPH, où les chantiers sont à l’arrêt en raison de la rareté des ressources financières ? En tout cas, le pari s’annonce difficile pour le prochain gouvernement.
Et pour cause, les recettes pétrolières n’augmenteront pas de sitôt, d’autant que les cours du pétrole tardent à rebondir sur le marché international. Ce qui constitue déjà un handicap pour l’Exécutif qui tente de diversifier l’économie nationale et sortir définitivement de la dépendance des hydrocarbures.
*Madjid Makedhi / el watan / jeudi 25 mai 2017
****Nouveau gouvernement :
Lamamra, Bouchouareb, Grine et Boudiaf out
La présidence de la République a dévoilé, aujourd’hui jeudi, les noms des membres du gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune. Plusieurs figures, qui avaient survécus aux derniers remaniements ministériels, ont été éjectés.
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« Boutéflika: un géant de la politique »
Le premier ministre devant les sénateurs
«J’apprends chaque jour de Bouteflika, qui était l’élève de Boumediène»
Je vous ai livré dans mon exposé les points forts et faibles de notre politique. Je n’ai jamais dit que tout était beau. Il existe des insuffisances que nous essayons de corriger chaque jour», a reconnu le chef de l’Exécutif qui s’estime heureux et chanceux de travailler avec un géant de la politique, Abdelaziz Bouteflika.
«J’apprends chaque jour de Bouteflika, qui était l’élève de Boumediène», a affirmé le Premier ministre, qui dit ne pas adhérer toutefois au raisonnement formulé par Mme Zohra Drif Bitat du tiers présidentiel et vice-présidente du Conseil de la nation, lors des débats.
«L’Etat algérien n’a jamais menti sur les chiffres. L’institution qui donnait un taux de chômage de 30% il y a quelques années est la même qui avance aujourd’hui un taux de 10%. Pourquoi, à l’époque, personne n’a remis en cause le chiffre de 30%, voire plus ?» s’est défendu, hier, Ahmed Ouyahia lors de ses réponses aux interrogations des membres du Conseil de la nation à l’issue du débat autour de la déclaration de politique générale. Dans sa plaidoirie de deux heures, le Premier ministre a balayé d’un revers de la main les accusations de certains sénateurs quant à la non-prise en charge de la jeunesse algérienne, des phénomènes de la harga, de la corruption ou des problèmes dans le secteur de l’éducation.
S’agissant de l’émigration clandestine, M. Ouyahia a fait remarquer qu’il ne faut pas s’attendre à ce qu’il y ait, au niveau du gouvernement, une personne qui légitimera les harraga, arguant que «celui qui se jette à la mer, s’il ne meurt pas ou n’est pas fait prisonnier, est embauché comme saisonnier, alors que l’Algérie offre des emplois saisonniers à 2000 DA la journée qui ne trouvent pas preneurs. Ce n’est pas normal». Et de souligner que la responsabilité des «grands», des sages et des parents, aujourd’hui, consiste en le devoir de pondération et en la nécessité de porter le message et de faire parvenir la préoccupation et l’intérêt. «Je ne suis pas un donneur de leçons, mais il faut nourrir l’espoir à la place de la violence. Il faut informer nos jeunes qu’en raison de notre insouciance, du gaspillage et du populisme, nous avons perdu notre souveraineté économique lorsqu’on a eu recours au rééchelonnement. Il faut apprendre aux jeunes comment revaloriser sa richesse pour mieux faire», a-t-il noté. Le Premier ministre ne nie pas que la question de la jeunesse représente un «enjeu majeur» pour l’avenir du pays et nécessite une prise en charge et une «attention particulière».
La culture de l’espoir contre celle de la violence
En abordant la responsabilité à l’égard de cette jeunesse, il rappelle avec amertume : «On a poussé nos jeunes au terrorisme, ce qui nous impose aujourd’hui de les raisonner pour qu’ils ne commettent plus d’erreurs à l’avenir, comme ce fut le cas pour la génération d’Octobre 1988 qui a attisé le feu de la fitna.» L’erreur, de l’avis du Premier ministre, était qu’on a fait croire aux jeunes, à l’époque, «qu’ils iraient au paradis». Selon l’intervenant, l’Algérie «n’est ni un pays riche ni un pays pauvre et ses enfants nourrissent de grandes ambitions», a-t-il indiqué, précisant que l’Etat avait commencé à prendre en charge ces ambitions grâce à sa «bonne gouvernance», en s’acquittant de ses dettes et en retrouvant son autonomie de décision.
Sur un autre chapitre, M. Ouyahia a défendu bec et ongles la réforme du système éducatif en estimant que la bataille de la quantité ayant été gagnée, reste la bataille de la qualité.
Abordant le chapitre de la corruption, l’intervenant a relevé que l’Etat, dans le cadre de la lutte contre le crime économique, a créé un office de lutte contre la corruption, la réévaluation des projets à la charge des secteurs économiques de la police judiciaire et élaboré une série de mesures pour tracer l’argent. Ces mesures ont trait, essentiellement, à la «modification de la loi sur le mouvement des capitaux transfrontaliers, modification de la loi sur le crédit et la monnaie, obligation faite aux opérateurs économiques d’utiliser des chèques pour toute transaction de plus de 500 000 DA et l’introduction du crédit documentaire ainsi que le nouvel identifiant fiscal», a-t-il indiqué. (El Watan-23.12.2010.)
** «Oui, l’argent sale existe»
Dans un discours fleuve de plus de deux heures, le Premier ministre a répondu globalement à toutes les questions des sénateurs.
Le Premier ministre, qui manipule admirablement les mots, a fait, hier, un tour d’horizon sur presque tous les sujets d’actualité lors de ses réponses aux sénateurs dans le cadre des débats sur la Déclaration de politique générale du gouvernement. De la jeunesse à l’agriculture, en passant par la corruption, les collectivités locales, la santé, l’éducation… Ouyahia n’a oublié aucune question. A propos de la corruption et de l’exécution de la dépense publique d’abord, le Premier ministre a répondu, non seulement aux sénateurs mais aussi à la commission que préside Farouk Ksentini qui a estimé, dans son dernier rapport, que la corruption mine les fondements de l’Etat.
«L’Algérie n’est pas gangrenée par la corruption», a-t-il affirmé, saluant au passage les cadres de l’Etat qui assument pleinement leur responsabilité. Cependant, M.Ouyahia a reconnu l’existence de ce phénomène que l’Etat n’hésitera pas à combattre. «Oui, l’argent sale existe», a-t-il toutefois nuancé.
Pour justement lutter contre cet argent sale, le Premier ministre est revenu sur la batterie de mesures prises par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre ce phénomène. Il a mis en exergue la décision de suivi de l’argent public, la régulation du transfert des capitaux transfrontaliers, la loi sur la monnaie et le crédit, le crédit documentaire (Crédoc) et la coordination entre la police et la douane en matière d’échange d’information. Selon lui, la bataille lancée contre ce fléau a commencé à porter ses fruits.
Dans le même ordre d’idées, le Premier ministre est revenu sur la directive présidentielle n°3 de décembre 2009. Il a évoqué, entres autres, la réévaluation du rôle de l’Inspection générale des finances (IGF), l’élargissement des prérogatives de la Cour des comptes, le cadrage des marchés publics et l’introduction de la déclaration de probité morale aux opérateurs pour l’obtention de marché public et la création de pôles de la police judiciaire et de l’organisme de lutte contre la corruption.
Le Premier ministre a, en outre, souligné que le gouvernement vise à travers l’exécution de la dépense publique, quatre objectifs. Il s’agit de donner la priorité aux entreprises nationales, lutter contre le gaspillage et les atteintes aux deniers publics, l’obligation de terminer l’étude technique des projets avant le lancement des travaux et l’accélération dans le rythme des travaux.
Par ailleurs, M.Ouyahia a longuement abordé la question des collectivités locales avec tous les problèmes auxquels elles sont confrontées.
M.Ouyahia a affirmé, dans ce sens, que l’Etat prendra en charge le manque d’encadrement au niveau des collectivités locales à travers le recyclage de près de 5000 cadres dans les différentes spécialités et le recrutement de 10.000 universitaires.
Le Premier ministre a précisé que le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales avait récupéré l’Ecole nationale d’administration et le réseau des centres de formation administrative en pleine expansion en vue de pallier le manque enregistré.
Concernant la carence de moyens au niveau des communes, M.Ouyahia a rappelé que l’Etat avait effacé les dettes des communes à deux reprises durant les dix dernières années, soulignant que l’Etat prendra en charge de nombreuses doléances des citoyens à travers le programme quinquennal 2010-2014.
Il a rappelé également que l’Etat contribue au financement des APC à travers les Plans de développement communal (PCD) à raison de 60 milliards de dinars par an. «La commune doit pouvoir assurer ses propres revenus, être autonome financièrement et dans la prise de décision», a-t-il expliqué, soulignant que le cahier des charges des communes devrait prévoir, à l’avenir, le drainage des investissements et des programmes de développement local.
M.Ouyahia a, par ailleurs, exhorté les élus locaux à travailler en coordination avec les représentants de l’administration.
«Il ne faut pas monopoliser le pouvoir mais il faut une complémentarité entre les élus et l’administration locale», a-t-il soutenu. Il a suggéré aux élus locaux de demeurer en contact avec les citoyens qui les ont élus. (L’Expression-23.12.2010.)
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*la sacralité de l’acte de rendre justice…
Si les hommes prenaient conscience de la sacralité de l’acte de rendre justice, il n’y aurait point d’injustice. La grandeur d’une nation se mesure quant à elle au rang accordé à la justice afin de garantir que nul ne soit au-dessus des lois. ….
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*une mutation censée produire un modèle d’économie productive régie par les lois du marché…
Il est beaucoup plus facile de commenter l’histoire a posteriori que de l’écrire. Les candidats à ce type d’exercice sont légion et la polémique est facile. Le gouvernement actuel ne gère pas une crise mais une mutation censée produire un modèle d’économie productive régie par les lois du marché. La démocratisation des institutions au sens libéral du terme attendra encore si tant est qu’elle soit l’aspiration profonde d’une majorité d’Algériens, ce dont il est permis de douter. Jusqu’à ces dernières années, les Algériens revendiquaient essentiellement une répartition plus équitable des revenus de la rente; il importait peu qu’ils eussent à se partager, et ce jusqu’à son épuisement, une richesse octroyée par une Providence généreuse. Depuis les prodromes de l’économie de marché, l’Algérie dynamique, entreprenante et ambitieuse (hélas, minoritaire) appelle de ses voeux une plus ferme intervention de l’Etat pour réguler le marché, faire respecter les droits de propriété et instaurer de réelles pratiques concurrentielles. Rompre avec la logique rentière n’est pas seulement affaire de volonté politique. Certes, il est indispensable qu’il y ait unité de pensée et d’action au sommet de l’Etat pour que soient posés les linéaments de cette rupture. Mais cela ne suffira pas. Aujourd’hui, en 2010, l’Etat central est confronté à de sérieuses difficultés organisationnelles qu’il a de plus en plus de peine à surmonter et qui limitent l’efficacité de son action.
Défaillance de type organisationnel
On en citera deux. Le premier concerne la bureaucratie locale qui prend de plus en plus la forme de féodalités de commandement évoquant presque irrésistiblement (la part étant ici réservée à l’anachronisme) les agents de l’administration régionale de l’époque turque (bey, caïd, hakems et cheikhs), cependant que les contrôles a posteriori diligentées par l’Etat central manquent d’efficacité (à quoi servent encore les chambres régionales des comptes, si tant est qu’elles aient un seul jour fonctionné?). Le deuxième concerne la faible incitation à l’effort qui prévaut aussi bien dans les administrations publiques que dans les entreprises d’Etat, alors que celles-ci sont théoriquement soumises à la commercialité mais reproduisent, en réalité, les mêmes schémas de gouvernance des ressources humaines que l’administration.
Ce phénomène délétère recèle un double effet pervers: les agents les plus efficaces ne sont pas récompensés à hauteur de leur dévouement et de leur disponibilité, cependant que les parasites ne sont pas sanctionnés au regard de la gravité des manquements à leurs obligations professionnelles. Quant aux processus de promotion, ils sont totalement inadaptés, et à mesure que se multiplient les proclamations officielles sur l’inéluctabilité de l’adhésion de l’Algérie à l’OMC, ces processus tournent carrément le dos à l’esprit d’entreprise et d’innovation; ce qui nous expose désormais au risque de manquer notre insertion dans la mondialisation.
Légitimité et rationalité de l’état
Enfin, on relève que le périmètre de l’état, lui-même, souffre d’inertie. C’est parce que l’état constitue une organisation publique qu’il ne s’est pas fissuré. Une organisation privée inefficace ne pourrait pas survivre car elle serait éliminée soit par le jeu du marché soit par la volonté de ses actionnaires. Une organisation publique n’est pas tenue de satisfaire à des mécanismes de sélection externe qui l’amèneraient à se réformer ou à reconsidérer son périmètre en fonction des performances escomptées. Cette situation existe même dans les démocraties libérales où le citoyen exerce, à travers le suffrage universel, son droit de désigner ses représentants. Mais ce droit n’affecte qu’à la marge l’Etat comme organisation. Ceux qui, ici ou là, répètent à l’envi qu’il suffirait d’élargir l’espace politique et d’agréer toute nouvelle association politique qui en ferait la demande, mésestiment profondément cet aspect socioculturel et historique. En Algérie, comme ailleurs, l’Etat reste soumis à toutes sortes de contraintes et d’aléas politico-financiers comme le montrent à satiété les difficultés rencontrées par certains de nos ministres les plus dynamiques, à l’instar de A.Sellal (pour lutter contre la fraude à l’eau), N.Moussa (pour inciter les promoteurs immobiliers et les collectivités territoriales à s’impliquer davantage pour la livraison dans les règles de l’art et dans les délais de tous les types de logements) ou encore K.Djoudi (pour convaincre les opérateurs économiques du bien-fondé et de la justesse de la LFC pour 2009). Enfin, il existe une autre difficulté que l’Etat algérien doit surmonter, c’est celle des limites de sa propre rationalité. Là-aussi, il faut se garder de croire qu’une décentralisation plus audacieuse ou un découpage du territoire national, en régions plus ou moins autonomes, constituerait la panacée. Certains de ceux qui critiquent systématiquement nos gouvernants, leur attribuant la responsabilité intégrale des dysfonctionnements -nombreux, il est vrai- qui affectent la gouvernance de l’état, n’ont pas l’honnêteté intellectuelle et morale de reconnaître que partout, à travers le monde, l’état évolue en avenir incertain. L’état ignore par exemple, de quelle façon vont réagir les agents économiques aux politiques qu’il met en oeuvre ou au type de régulation qui lui paraît le plus approprié. Depuis l’adoption des premiers instruments juridiques de l’économie de marché, l’Etat algérien intervient positivement ou au contraire s’abstient dans un contexte qui a toujours été caractérisé par une information imparfaite. Il agit, selon une loi d’airain, à laquelle aucun Etat ne semble pouvoir échapper (la crise financière mondiale de 2008 en a été le cruel révélateur), en vertu de laquelle l’amélioration de la qualité de la gouvernance est indissolublement liée au principe de l’«essai-erreur». Il ne s’agit pas ici de faire l’éloge du pilotage à vue. Mais, sans la prise en compte de l’ensemble des hypothèques qui pèsent sur le fonctionnement d’un Etat, et qui transcendent souvent la bonne volonté de ses serviteurs, il n’est pas de critique ni juste ni instructive. (L’Expression-14.07.2010.)
** Asseoir de nouvelles relations entre l’administration et le citoyen
Le plan d’action du gouvernement, qui sera présenté devant les députés par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, le 25 septembre, prévoit la création d’un observatoire des relations entre les pouvoirs publics et les citoyens.
Un tel organe, dont la date de création n’a pas encore été arrêtée, est issu des recommandations du dossier de «la gouvernance locale et les attentes du citoyen». Cet observatoire permettra à l’Etat de disposer d’un système de veille et d’alerte précoce sur le climat général entre l’Etat et la société et les tendances d’évolution. L’objectif visé par le gouvernement est d’asseoir de nouvelles relations entre l’administration et le citoyen et le renforcement de la confiance, qui a de tout temps fait défaut entre administration et administré. Dans ce plan, l’action du gouvernement privilégie l’amélioration et la réhabilitation des grands services publics.
Mais alors, comment compte-t-il s’y prendre ? Il envisage, à cet effet, la poursuite de la lutte contre la bureaucratie. Comment ? On ne le sait pas, mais nous n’ignorons pas que ce phénomène gangrène toujours notre société et fait fuir les investisseurs… Parallèlement, l’administration centrale intégrera, dans ses organisations, des mesures concourant à la reconquête et à la consolidation de la confiance des citoyens à l’égard de l’Etat par une meilleure écoute ainsi que par la gestion et l’amélioration qualitative des espaces publics. Dans le même contexte, une attention soutenue sera accordée aux services publics locaux de proximité, plus particulièrement ceux chargés de l’hygiène et de la salubrité publiques. L’action coordonnée et concertée qui sera conduite visera à redonner à nos villes et campagnes une image autre que celle qu’elles présentent aujourd’hui.
Ainsi, outre le lancement d’opérations d’envergure d’hygiène à très court terme, le moyen terme permettra, grâce aux mesures réglementaires, organisationnelles et humaines, d’engager nos collectivités locales dans une dynamique irréversible de transformation durable des comportements. Il est également prévu la formation des différents corps de l’administration territoriale. Les premiers concernés par cette formation seront les nouveaux exécutifs communaux qui seront issus des élections du 29 novembre prochain. S’agissant de la coordination entre le Parlement et le gouvernement, ce dernier initiera la révision de la loi organique du 8 mars 1999 fixant l’organisation et le fonctionnement de l’APN et du Sénat ainsi que leurs relations fonctionnelles avec le gouvernement.*El Watan-20.09.2012.
***les mêmes promesses égrenées dans une fuite en avant …
Les ministres passent et ne se ressemblent pas. Pourtant, leurs discours semblent tous sortis d’un même cours appris par coeur. Il n’y a que le rythme, la diction, la voix qui changent. Le même vocabulaire emballe les mêmes promesses égrenées dans une fuite en avant éperdue. Il n’y a rien de mieux pour faire oublier une promesse que d’en faire une plus grande, avec force couleurs et sertie dans un programme qui promet (toujours des promesses!) de faire du passé table rase, de faire appliquer la loi avec la plus grande rigueur et de poursuivre les délinquants qui se sont engouffrés dans les failles de textes législatifs ou dans les interstices d’une bureaucratie désorganisée à bon escient. Ce sont toujours les mêmes qui saisissent le fil d’Ariane dans le labyrinthe des démarches administratives. Le 11 juillet, consacré Journée de la population, a été l’occasion pour certains journaux de porter à l’attention de l’opinion publique, qui le sait déjà depuis longtemps, la mauvaise politique, ou plutôt l’absence de politique d’aménagement du territoire et d’occupation des sols qui a été le lot des gouvernements et des administrations lors des précédentes décennies. La spéculation foncière effrénée, la gestion hasardeuse des différentes APC, la dilapidation du patrimoine foncier pendant les années de terrorisme, jointes à une urbanisation sauvage ont défiguré pour longtemps le littoral algérien, objet de toutes les convoitises, et le visage des villes dont le développement tentaculaire gagne comme une lèpre les espaces verts avoisinants. Il faut dire que les Algériens, traumatisés par une crise du logement qui dure, (enfin rappelons que tout le monde n’est pas logé à la même enseigne et que ceux qui savent saisir le fil d’Ariane n’ont jamais eu de problèmes pour se loger…) depuis, depuis…
Impossible de mettre une date précise sur la naissance de cette fameuse crise que tant de ministres nommés ad hoc, n’ont pu résoudre. Que d’institutions ont été créées pour venir à bout de cet insoluble problème que vivent certains citoyens très moyens depuis leur naissance. Ils sont tombés dedans et désespèrent de savoir que c’est le seul héritage qu’ils laisseront à leur progéniture. Ils ne se bercent plus d’illusion quand le dernier ministre annonce de nouvelles réformes pour faciliter l’accès à la propriété du logement: ils en ont vu d’autres. Un célèbre Premier ministre, lors d’une conférence de presse télévisée, avait fait du problème du logement, son cheval de bataille: il avait promis pas moins de 100.000 logements par an à une population qui en demande dix fois plus. Mais il semble que le ver est dans le fruit: la pieuvre qui s’étend sur le secteur se rit des textes, des institutions ou des réformes. Ni les épargnants, qui attendent déjà depuis 16 mois une réponse à un dossier déposé auprès des services concernés, ni les candidats aux diverses formules enveloppées dans les lettres de l’alphabet latin ne comptent trop sur les promesses… Justement, en parlant de pieu-vre, il serait plus judicieux que les grandes décisions à prendre soient soumises à la perspicacité du poulpe Paul (on peut le baptiser d’un nom bien de chez nous!): tous les choix, politique, économique, nominations devraient lui être soumis. Peut-être que nous nagerons avec lui dans le bonheur…(L’Expression-14.07.2010.)
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Essayons de retenir trois critères d’analyse de la bonne gestion :
1er critère : le processus par lequel les gouvernements sont choisis, contrôlés et remplacés,
2ème critère : la capacité du gouvernement de formuler et de mettre en œuvre, efficacement, des politiques fondamentales,
3ème critère : le respect des citoyens et de l’Etat pour les institutions qui gouvernent l’économie et le social ainsi que leurs interactions. A chaque critère, adossons deux indicateurs. Les deux indicateurs du premier critère sont :
La voix et l’imputabilité (accountability en anglais et moussa’ala en arabe). Cet indicateur se réfère aux différents aspects du processus politique, les libertés civiles et les droits politiques.
Il mesure l’étendue avec la quelle les citoyens sont capables de participer aux choix des gouvernants. Ceci inclut, également, l’indépendance des médias et la liberté de la presse.
La stabilité politique et l’absence de violence. Cet indicateur mesure la perception de la vraisemblance que le gouvernement au pouvoir pourrait être déstabilisé ou destitué par des moyens violents et/ou non constitutionnels, y compris la violence intérieure et le terrorisme. Les deux indicateurs du deuxième critère sont :
L’efficacité du gouvernement. Il s’agit de la qualité des services publics, la qualité de la bureaucratie, la compétence des fonctionnaires, l’indépendance de l’administration par rapport au processus politique, la crédibilité de l’engagement du gouvernement dans ses politiques.
La capacité du gouvernement de produire et de mettre en œuvre de bonnes politiques et délivrer les biens publics. De même que la qualité de la régulation (contrôle de la qualité, contrôle des prix, supervision adéquate des banques, climat des affaires…). Les deux indicateurs du troisième critère sont :
La primauté du droit. Elle mesure l’étendue à laquelle les citoyens ont confiance dans les règles de la société et leur restent fidèles : criminalité, efficacité et prévisibilité de la
justice, environnement sain, respect du droit de propriété.
Le contrôle de la corruption. La corruption est définie comme l’utilisation du pouvoir public pour des gains privés. Il est aisé d’apprécier le niveau de bonne gestion dans un pays donné à partir de ces trois critères et ses six indicateurs. par rapport à son potentiel et en comparaison à d’autres pays, l’Algérie reste mal classée par rapport à l’ensemble de ces critères. D’où la nécessité de travailler à l’ancrage de ces critères et de ces indicateurs dans la gestion courante des affaires publiques et dans la gestion de nos entreprises. C’est aussi, un appel à plus de transparence, plus d’information, plus de débats publics, plus d’ouverture des médias lourds à toutes les composantes de la société. Ce sont les moyens privilégiés et déterminants pour rétablir le début de confiance des citoyens dans leur Etat. C’est également l’occasion de l’ouverture d’un débat le plus large possible entre toutes les composantes de la société, plus particulièrement les élites, sur la stratégie d’ancrage de la bonne gestion. En conclusion : La nation est réellement en danger. Chaque institution et chaque citoyen sont placés devant leurs responsabilités. C’est le moment de travailler à la préparation, la conception et la mise en œuvre d’une Nouvelle Politique de Développement. L’Algérie a besoin d’un régime capable de construire l’avenir et capable de prévenir les crises et d’y faire face par sa stabilité et sa légitimité enracinées dans le peuple et dans l’économie, en opposition avec ce qui existe aujourd’hui, à savoir l’éternelle reconstruction de l’échec par la mauvaise gestion, sans jamais en tirer les leçons. Par le Dr Ahmed BENBITOUR
(publié dans El Khabar-13.05.2012.)
***************************************Point de vue
La bipolarisation de la violence légitime
*Remplacer l’arbitraire et « une guerre de chacun contre chacun », par un Etat de droit.
L’histoire nous a appris que l’humanité n’a pu, ne peut et ne pourra osciller lamentablement qu’entre deux états : l’état de nature, ère de servitude où l’homme se livre lui-même en otage à ses pulsions et à ses passions, sombre période où chacun agit, selon sa propre volonté, usant de tous les expédients qui lui paraissent convenir aux buts qu’il recherche. Il est inutile de rappeler que cet état originel et primitif est indigne de l’homme, car c’est un état de guerre permanente, une guerre, comme disait Hobbes «de chacun contre chacun». Cette violence et ce chaos insupportables, en-dehors d’une autorité consentie, respectée et crainte par tous, ont poussé les hommes à opter pour la seule échappatoire possible : l’Etat de droit. Cette violence originelle et chaotique, cette instabilité et insécurité permanentes inhérentes à cet «état de nature» ont poussé les hommes à repenser à réorganiser leur vie commune sous le règne d’une seule et même autorité qu’eux-mêmes choisiraient pour agir en leur nom et représenter leurs intérêts. Une autorité qui aura la légitimité et surtout la force nécessaire pour « assujettir » légalement tout le monde et pour le bien de tous.
«Les hommes ont inventé l’Etat pour ne pas obéir aux hommes», dira Burdeau, et faudrait-il ajouter pour que les uns ne puissent pas se soumettre à l’arbitraire terrifiant des autres. Et c’est ainsi que la notion de «volonté générale» ou de «contrat social» est née. Rousseau la résumera ainsi : «Une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé.» Bien entendu, cette nouvelle forme du «vivre ensemble», à laquelle tout le monde y consent, suppose une forme «d’aliénation» positive. Désormais, et condition sine qua non à ce pacte social, «chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ; et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout».
Jusque-là, les choses paraissent cohérentes, convenables, pour tout un chacun, puisque cet «état de droit» est né pour garantir et protéger l’intérêt de tous. Néanmoins, tout le monde sera tenté par la suite d’oublier qu’en se dessaisissant de nos «volontés particulières» égocentriques et belliqueuses au profit d’une «volonté générale» plus protectrice, on a forcément mandaté cette autorité qui parle et agit au nom de tous du monopole à user de la violence pour assurer notre bien-être même lorsque celui-ci n’arrive pas à se réaliser pour diverses raisons. «L’Etat ne peut donc exister qu’à la condition que les hommes dominés se soumettent à l’autorité revendiquée chaque fois par les dominateurs.» (Max Weber)
Cet état de droit ne peut se réaliser que si «les gouvernants qui reçoivent la compétence pour gérer les affaires publiques, détiennent le pouvoir et la force coercitive» et que si «la puissance étatique qui est la force, l’énergie du pouvoir institutionnalisé, influe sur le comportement du groupe de manière à obtenir de lui qu’il se soumette à l’idée de droit formulé par le souverain». (Burdeau)
Coercition, soumission, obéissance, modulation des comportements, tels sont les mots-clés et la panacée d’une paix sociale. «S’il n’existait que des structures sociales d’où toute violence serait absente, le concept d’Etat aurait alors disparu et il ne subsisterait que ce qu’on appelle au sens propre du terme, l’anarchie. La violence n’est évidemment pas l’unique moyen normal de L’Etat, cela ne fait aucun doute, mais elle est son moyen spécifique.»
(M. Weber). Si l’Etat a acquis légalement ce droit et ce monopole d’utiliser une violence qui ne peut être que légitime, il arrive souvent de voir que d’autres agents viennent à lui disputer ce droit et cet usage. Essentiellement antinomiques, ces deux états (de nature/de droit) ne peuvent pas et ne doivent pas coexister. Du moins, c’est ce qu’il semblait être jusqu’à ce que émergent face à l’Etat ou parallèlement à l’Etat une, voire plusieurs formes de violences qui amenuisent et remettent en cause chaque jour cette souveraine, pleine et intégrale puissance étatique.
On est passé de l’utilisation de la violence (légitime de l’Etat) pour la préservation de l’intérêt général au recours à la violence ou aux violences multiples (violences urbaines, délinquances, incivilités…) pour la satisfaction d’intérêts particuliers ou tout simplement comme moyen d’expression. Certains spécialistes, faisant l’économie d’analyses plus approfondies, imputent au terrorisme qui a sévi pendant la décennie noire la cause de toute cette violence qui nous assiège quotidiennement. Ni la France ni les Etats-Unis n’ont pourtant connu de terrorisme, et c’est d’ailleurs bien là que les affrontements les plus violents ont eu lieu entre des populations civiles et les forces de l’ordre ou l’Etat. Combien il est aisé de tout mettre sur le dos du terrorisme, cela permet d’exonérer tout le monde et de considérer les déviances actuelles comme résultante fatale, inexorable et tout à fait naturelle d’où précisément notre inclination à justifier et tolérer par la suite la propagation de cette anomalie sociétale et à agir en conséquence avec plus d’indulgence et de laxisme vis-à-vis des auteurs de ces faits hautement répréhensibles.
En réalité, la pusillanimité de l’Etat est davantage déterminée par des considérations politico-politiciennes. Quant au système judiciaire et pénal, lui aussi, est amené à circonscrire considérablement son champ d’intervention et amenuiser sa force répressive et punitive faute de pouvoir ou de vouloir conférer à tous ces actes déviants l’incrimination et le châtiment qui leur convient sinon l’engagement d’autres thérapies ou politique plus constructives et porteuses de paix sociale.
Depuis déjà une décennie, nous voyons lamentablement se substituer à la violence terroriste d’autres formes de déviances non moins dommageables pour le corps social et notamment lorsqu’il s’avère délicat sinon difficile de légaliser les ripostes nécessairement violentes, les mêmes que celles qui ont prévalu lors de la décennie noire. Un bus de transport urbain vient d’être assiégé ces jours-ci à Mostaganem, ses passagers ont été détroussés, cela s’est passé en plein Ramadhan, en plein jour et en pleine ville. Les Mostaganémois, les victimes surtout, ahuris et terrifiés, sont confrontés pour la première fois à une forme de violence qui était pourtant là depuis déjà bien longtemps, latente et à l’affût du moment propice. Certaines parties de la ville deviennent «zones interdites» à cause des batailles rangées qui s’y déroulent où tout simplement à cause des dangers potentiels qu’elles représentent ou de la peur qu’elles suscitent. Au lieu de piété, de compassion et de don de soi, ce mois sacré est devenu par excellence le mois de tous les abus, de toutes les dérives, de toutes les anomies. Islam ! Vous avez bien dit Islam ?
Déjà, l’année passée, et pendant le mois de Ramadhan, cette même ville fut le théâtre de batailles rangées mémorables. Le journal Réflexion du 25 août 2011 narre cette épopée médiévale : «Affûtez vos sabres, on revient au Moyen-Age.» Ces événements et cette terreur ne sont pas des faits inédits ni des aberrations propres à une région particulière. Des chroniques similaires sont le lot quotidien des Algériens depuis une bonne décennie. Normalisée, banalisée, cette violence devient omnipuissante et menace tout le monde. Aujourd’hui proéminente, scandaleuse et trop ostensible pour être tue et ignorée, elle n’est que la manifestation paroxystique d’une violence bien enracinée dans nos mœurs et que l’Etat feint d’ignorer.
En 2002, la criminalité (débauche, proxénétisme et meurtres) font main basse à Bordj El Kiffan. Tout le monde fait son beurre jusqu’au jour où une expédition punitive procède à l’incinération de cinq dancings. Les uns comme les autres accusent avec virulence le laxisme de l’Etat. (El Watan du 24 juillet 2002). En 2006, un reportage effectué par le journaliste Mustapha Benfodhil narre la terreur qui pétrifiait les Algérois (vols de portables, de bijoux, de portefeuilles) même en plein Ramadhan. (Quotidien Liberté du 16 octobre 2006). Le journal El Khabar du 7 septembre 2010 rapporte le quotidien d’une autre ville «Annaba sous l’emprise de porteurs de sabres et de couteaux».
Depuis quelques années, à Tébessa, les contrebandiers mènent la vie dure aux douaniers et aux gendarmes : courses poursuites et accrochages avec attaque du parc douanier et autres actes subversifs. Les forces de l’ordre se malmènent comme des diables pour préserver la puissance étatique et sauver leur peau en même temps. En 2010 «une centaine d’individus ont attaqué, dans la nuit du lundi à mardi, l’hôpital de Tébessa pour récupérer en force un contrebandier arrêté quelques heures auparavant par une patrouille». Ces faits ont été relatés par le journal El Watan du 13 novembre 2010.
Toujours en 2011, la guerre des gangs fait rage à Alger et installe un climat de terreur. Bab El Oued se révolte et les riverains descendent dans la rue. «L’absence de l’Etat est une insulte à notre égard», vocifèrent les victimes. (El Watan du 24 juillet 2011). Une enquête menée par le même journal essaye de faire la lumière sur ce phénomène que «les services de sécurité tentent de démystifier» et sur lequel, bien entendu, ergotent nos doctorants en criminologie pour savoir quelle sémantique coller à ces «déviances sociales» (violence urbaine, délinquance, criminalité, guerre des gangs ?) (Alger sous l’emprise des bandes rivales, El Watan du mercredi 10 août 2011). septembre 2011, la Madrague, à Alger, vivra une nuit de terreur, suite à une campagne punitive orchestrée par une bande de forcenés qui, sous le prétexte de venger un des leurs, saccagent tout sur leur passage ; magasins, restaurants, voitures et profitent pour détrousser passants, touristes et automobilistes.
Oran. Ramadhan 2011. Les commerçants de gros entament une grève et manifestent sur la place Bendaoud pour interpeller les pouvoirs publics sur les exactions qu’ils subissaient quotidiennement par des bandes criminelles qui portent à la fois atteinte aux activités commerciales et à la sécurité des biens et des clients.
Juillet 2012. Les habitants de la cité Aïn Melha, dans la banlieue sud d’Alger, vivront une nuit d’enfer. Pillage, saccage, vandalisme pendant que l’Etat regarde ailleurs. «La seule casquette qui se hasarde ici c’est celle du facteur», ironisera un locataire. (El Watan du 3 juillet 2012). Hélas, il faudrait toute une encyclopédie pour égrener ces faits ignobles et révoltants que pas un jour la presse n’en fait écho depuis dix ans. Si l’intérieur de nos centres urbains est devenu un véritable cloaque, nos autoroutes quant à elles n’ont pas été épargnées par ces razzias ; le tronçon Réghaïa-Boudouaou est devenu pour un certain temps assez célèbre par les agressions qu’automobilistes et passagers de bus subissaient effrontément chaque jour dans l’impunité la plus totale.
Parfois, les embuscades s’effectuaient à quelque 10 m d’un barrage de gendarmerie. Cette folie et cette audace nous rappellent étrangement le caractère suicidaire ou rassuré qui prévalait chez nos terroristes il n’y a pas longtemps. Le tronçon de l’autoroute Est-Ouest (Aïn-Defla-Relizane) a également permis à une bande de dégénérés de semer la terreur avant que les forces de l’ordre daignent les appréhender pour permettre à la civilisation de suivre son cours, car que serait le pays si le réseau routier tombait entre les mains de criminels qui ont fini par créer un péage propre à eux ou à s’initier eux aussi dans la dîme révolutionnaire.
Les choses deviennent davantage inquiétantes, car si cette «violence légitime de l’Etat» censée submerger et étouffer toutes les autres violences pour notre salut à tous semble complètement décharnée et nulle, si cette «puissance étatique» qui devait influer sur nos comportements de manière à obtenir une «soumission» semble s’essouffler, la religion ne semble pas pour autant avoir des effets moralement dissuasifs ou coercitifs au point de constituer cet autre rempart à nos pulsions dévastatrices. Que restera-il donc pour empêcher justement que «l’homme ne devienne un loup pour l’homme».
Bien évidemment, et pour rationaliser, dépassionner le débat et minimiser l’ampleur de ce phénomène qui d’ailleurs n’épargne aucun pays, même les plus civilisés, on dira à propos de ces escadrons de la mort que ce ne sont pas des gangs au sens sociologique ou juridique du terme, des gangs qui s’adonnent de manière régulière et organisée à des activités criminelles. Ce seraient plutôt des communautés de quartier ou des groupes fédérés par des affinités aléatoires. Néanmoins, ces bandes (quelle que soit la définition juridique, sociologique ou anthropologique qu’on s’amuserait à leur coller pendant que la population se consume de terreur dans l’indifférence la plus totale) disposent de cette capacité extraordinaire à se coaliser spontanément et à constituer le temps éphémère du «projet» qui les assemble (bataille rangée, campagne punitive, actes de brigandages sporadiques…) une force de désordre et de subversion qui présente de sérieux dangers pour la sécurité publique et la paix sociale.
L’insécurité comme la sécurité ne se mesurent pas au sang des victimes innocentes qui coulera dans les caniveaux ni à cette proportion dérisoire d’arrestations que les services de sécurité affichent chaque année. L’Algérien ne se plaint plus, sachant que l’Etat ne raffole que du flagrant délit. Des centaines d’affaires liées aux «crimes et délits contre les personnes et les biens» ne seront jamais élucidées et leurs auteurs continueront à caracoler librement jusqu’au jour où un mauvais sort les happera ailleurs. L’Etat est rarement là où le crime sévit. Une politique sécuritaire basée sur la prévention et la prospective, sur la proximité et le renseignement, sur le redéploiement et la reconquête de ces zones de non-droit, toutes ces procédures bourgeoises ne sont pas encore à l’ordre du jour. L’Algérien en fait peut-être tout un ramdam pour des peccadilles dont souffrent tous les pays du monde. L’esprit arabe rompu à toutes les formes de violence (verbales, physiques, politiques, dialectiques) aura du mal à reconnaitre ce «seuil de tolérance zéro» qui l’incitera enfin un jour à manifester plus de commisération à l’égard de ses semblables.
Le philosophe français Yves Michaud confirmera en 1998 lors de ses recherches sur la question de la violence sociale : «Une grande partie de la violence que ressentent les habitants des zones urbaines tient aujourd’hui aux atteintes à la
propriété, au vandalisme quotidien, aux incivilités qui gâchent la vie (insultes, menaces, bruits, petits larcins, mendicité agressive)». En effet, ce sont les petites rivières qui font les grandes crues. Les peccadilles d’aujourd’hui feront forcément le lit de la barbarie de demain. Le philosophe Yves Michaud parlait en 1998 d’incivilités et de larcins. Mais en 2010, lors des violences urbaines de Villeneuve (Grenoble), on se met à tirer sur les forces de l’ordre, détruire les abribus, les tramways et à brûler les voitures. En 2012, la guerre des gangs à Marseille présente un assez triste bilan : 7 meurtres en cinq mois et une jeunesse qui, jadis cantonnée aux «incivilités», se retrouve aujourd’hui à faire la loi avec des kalachnikovs.
Le sociologue de la délinquance Sébastien Roché estime qu’il existe une forte corrélation entre les phénomènes perceptuels et la réalité délictueuse : «En fait, incivilité, sentiment d’insécurité et violence sont liés. Plus d’incivilité, c’est plus de sentiment d’insécurité, plus de défiance à l’égard des institutions et, à terme, plus de délinquance.» Prenons les choses à rebours. En effet, plus l’Etat est démissionnaire, plus le sentiment d’insécurité sera grandissant et plus cette impunité transformera ces petites frappes en grands caïds. Les forces de l’ordre public, puisque c’est ainsi qu’on les appelle, contraintes à se dépouiller subrepticement de leur pouvoir de répression et de maintien de l’ordre qui faisait jadis leur gloire et leur raison d’être, se retrouvent désormais réduites, à leur corps défendant, à jouer aux «arbitres» et aux «réconciliateurs» entre des puissances déchaînées.
La police ordinaire ne possède plus ni les ressorts psychologiques ni les atouts physiques et logistiques nécessaires pour endiguer cette violence exponentielle et inédite dans l’histoire et pour neutraliser et mater ces meutes. Quant aux forces antiémeutes, il me semble qu’elles furent à l’origine conçues, de par leur attirail, à livrer bataille contre des éléments qui évoluent assez lentement et dans des espaces «gérables» sur le plan topographique et tactique. Leur configuration quasi-militaire ne leur permet guère de s’adonner à toutes ces acrobaties urbaines dans lesquelles excellent ces électrons libres que sont ces cohortes de l’enfer.
Les formations de combat de nos centurions ont du mal à virevolter, tournoyer et se mouvoir avec la même rapidité diabolique dont font preuve avec brio ces hordes criminelles très dynamiques et insaisissables.
Dans l’état actuel des choses, il faudrait sérieusement penser à repenser la nature et la structure de la représentation/incarnation de cette puissance étatique qui, sur le terrain, serait amenée à s’imposer et à imposer la force de l’Etat. Le citoyen a l’impression de se faufiler dans une jungle.
Les policiers sont tournés en ridicule, malmenés, peu nombreux, circonspects, intimidés, voire éberlués. C’est déjà miraculeux s’ils arrivent à préserver leurs uniformes et leurs armes. Partout dans le monde, c’est le même constat qui se profile. La police n’est plus en mesure de nettoyer ces écuries d’Augias, tâche insurmontable pour laquelle elle n’a jusqu’à présent pas été reformatée. Cette vision onirique du policier, du gardien de la paix, du garde-champêtre débonnaires, assurés de leur autorité et qui déambulaient fiers, coquets, inspirant respect et crainte uniquement par l’uniforme qu’ils arboraient avec assurance, fait désormais partie de toutes ces images d’Epinal, ces reliques ou gravures symboliques que l’on retrouve sur des timbres-postes, des cartes- postales ou des lithographies et dont le seul effet est de susciter en nous quelques réminiscences et nostalgie doucereuses.
Le cas de l’Algérie est spécifique eu égard à la proportion de sa jeunesse, sachant surtout que nous sommes en train de parler d’une jeunesse qui a réprimé en elle, à tort ou à raison, toutes les rancœurs et tous les ressentiments possibles. Il ne s’agira donc plus pour nos autorités de penser circonscrire cette jeunesse imprévisible et potentiellement dangereuse dans des ghettos semblables à ceux des Etats-Unis (le Bronx, Harlem, le Queens, Highland Park…), de France (les banlieues parisiennes, lyonnaises et marseillaises), ou carrément d’abandonner et de capituler face à de nouvelles zones extra étatiques telles les favelas de Rio (Brésil), ou des villes comme Ciudad Juarez et Tijuana (Mexique).
Il ne s’agit pas également de rêver à un type nouveau de réaménagement urbain où l’on pourrait rêver d’un monde partagé en zones, celle de l’opulence (nantis et privilégiés) et celle de la paupérisation endémique (exclus et damnés). La colonisation de notre territoire par les autochtones a été faite de manière si chaotique que l’on aura du mal à confiner ces lépreux incontrôlables dans des zones périphériques ou suburbaines comme celles du film Banlieue 13. L’extrême proximité topographique qu’il y a entre deux castes fondamentalement différentes (les nantis et les exclus), voire leur indécente cohabitation dans le même espace, compromet sérieusement une paix sociale pérenne. (Hydra face à Diar-Echems, Club des Pins et ses gourbis avoisinants, Haï Dallas face au bidonville El Kerrouche…)
Bref ! On ne trouvera nulle part chez nous un Neuilly algérien qui n’ait pas en face de lui un bivouac du type des minguettes lyonnaises, prêt à phagocyter ces rupins de malheur. C’est un exemple édifiant de ces «contraires» qui flirtent au son des trompettes de l’apocalypse. Un mariage explosif et nihiliste de la matière et de l’antimatière. Avec toute la bonne volonté du monde, et à dessein d’avoir une paix durable, on ne peut transformer tous les Algériens en millionnaires. On ne peut non plus se mettre à leur tirer dessus ou à les embastiller, car les conjonctures actuelles ne s’y prêtent pas, on vient tout juste de sortir d’une décade de barbarie et il faut s’estimer heureux que ce maudit printemps arabe nous ait épargnés. Il ne nous reste donc que la troisième solution : la théorie du chaos. Il faut laisser les Algériens se bouffer entre eux, cet exutoire national permettra à toute cette énergie négative que recèle le peuple algérien de se déverser dans le même réceptacle : la société, et de tourner en boucle dans la rue. Il s’agit de «dépénaliser» tacitement tout ce qui est informel, manifester moins de rigueur à l’égard de la contrebande, du trafic des stupéfiants, de la prostitution.
Bref, lâcher la bride à toutes les activités illicites qui se sont substituées au ministère de l’Emploi et de la Solidarité par leur capacité à entretenir des milliers de familles et à créer des réseaux de solidarité et des liens sociaux très solides. Pour l’Etat, et en ces temps qui courent, la seule sécurité qui mérite que l’on utilise la violence sans parcimonie ou scrupules, c’est bien celle de l’Etat et non celle de la société comme si les deux étaient facilement dissociables sans risque certain de déboucher sur des aléas fort fâcheux pour tout le monde. Mais l’Etat est conscient que s’il y a une chose qui caractérise ces criminels, c’est bien leur lâcheté. Imitant les modèles de la violence terroriste, ils se contentent de pratiquer leurs exactions à «l’horizontale», c’est-à-dire s’en prendre à leurs semblables, aux victimes qui sont à proximité de leurs coups scélérats et vils (vieillards, femmes, jeunes filles et tous les autres gogos qui n’ont pas encore réalisé que le pays appartient désormais au crime.) Les priorités sécuritaires stratégiques sont revues à la baisse. La sécurité de l’Etat est alors réajustée pour se cristalliser enfin sur des cibles névralgiques (les institutions de l’Etat, les biens de la ploutocratie et ce pétrole qui nous permet de survivre et empêche notre extinction).
«La violence urbaine s’observe dans la plupart des sociétés modernes. Cependant, les manifestations comme les causes de cette violence varient d’une société à l’autre», dira la politologue et spécialiste en violence urbaine S. Body-Gendrot pour mettre en garde ceux qui seraient tentés en France de faire des parallèles entre la violence ou la guerre des gangs propre aux Etats-Unis et un ras-le-bol exprimé par une population d’émigrés marginalisée, exclue et paupérisée et dont la violence n’est assez souvent orientée que vers les symboles d’un Etat insouciant à leurs malheurs.
S’il est vrai que les causes varient d’une société à l’autre, on peut dire qu’en Algérie, la violence est fondamentalement alimentée par deux facteurs : la perte de confiance dans les institutions (chose que l’on a pu remarquer dans les démocraties occidentales), et le mépris que les citoyens ont développé à l’égard d’institutions corrompues qui ont généré un long règne d’iniquités multiples et des disparités sociales ignominieuses.
Néanmoins, chez nous, chose plus grave encore, le citoyen ne se contente pas uniquement de brûler et de saccager les biens ou les objets ayant un rapport avec les institutions, mais bien plus encore, chose inconcevable, il s’arroge une forme de souveraineté qui lui confère un certain droit de s’approprier par la violence un du qu’il estime lui revenir (trottoirs, places et jardins publics, plages, abords des marchés, économie informelle, constructions illicites…). On feint souvent d’ignorer que ce qu’il tente de s’approprier n’est en définitive que le bien de l’Etat et surtout du peuple. A moins que ces espaces publics, ce vaste domaine, ne relève plus des biens de l’Etat. Il serait également très prudent de ne pas avoir recours à ce que le criminologue français Xavier Raufer nomme «la culture de l’excuse», cet alibi fumeux qui consiste à tolérer cette anomie perverse sous prétexte que ce sont les défaillances et les démissions de l’Etat qui ont produit cette sous-humanité.
Ainsi, cette dette à leur égard absoudra leurs forfaits et dépénalisera pour un temps leurs activités illégales. Néanmoins, le black-out ou le stand-by de l’Etat est motivé par deux mobiles assez tenaces. Chez nous, l’excuse est double et plus contraignante : en plus d’une victimisation reconnue par tous (Etat et exclus), la chute des dictatures arabes et l’extrême fragilité des pouvoirs en place constituent un second motif d’atermoiement et de laxisme. J’ai évoqué au début de cet article cette terrible dichotomie entre «l’Etat de nature» et «l’Etat de droit».Jean Jacques Rousseau trouvait le vocabulaire de Thomas Hobbes quelque peu alarmiste et inapproprié lorsque cet Anglais parlait de «guerre de chacun contre chacun». Quatre siècles plus tard, les politiques réutilisent les mêmes concepts et phraséologie va-t-en guerre.
En Amérique latine, les politiciens considèrent que c’est désormais «une guerre» avec ses moyens appropriés que l’Etat aura à mener contre une criminalité génocidaire. En 2010, suite aux graves violences urbaines survenues dans le quartier populaire de la Villeneuve (Grenoble), l’ex-président français, Nicholas Sarkozy dira : «C’est une guerre que nous avons décidé d’engager contre les délinquants et les trafiquants.» Une fois que l’on a eu la lucidité et le courage d’utiliser pour ces fléaux sociaux la seule «sémantique politique et juridique» qui vaille, les pouvoirs publics seront sommés d’engager les mesures qui correspondent. En Amérique latine, on a déjà commencé à impliquer l’armée dans la lutte contre la criminalité et les cartels de la drogue. Ne pas crier au loup ne fera pas pour autant disparaître ou amoindrir la menace.
Les gangs de Marseille et de Paris commencent, n’en déplaise à certains spécialistes, à reproduire sur le sol français les mêmes canevas criminels que l’on croyait spécifiques aux Etats-Unis ou aux pays d’Amérique latine (guerre de gangs et de cartels, assassinats, blanchiment d’argent, contrebande d’armes, collusion avec le terrorisme…).
Certains politiciens envisagent le recours à l’armée ; cela viendra un jour. Cette violence multiforme et exponentielle ainsi que cette criminalité qui ravagent notre pays et auxquelles nous restons inattentifs, calés dans nos fauteuils et soucieux de nos personnes insignifiantes dans l’espoir que cette peste ne décimera que la tourbe, finiront tôt ou tard par se muer, devenir plus élaborées, structurées, complexes. Le fléau sera inextricable si on persiste à user de stratégies aussi dérisoires et hypocrites que celles qui ont cours en ce moment.
Références :
*Georges Burdeau, L’Etat, édition du Seuil, 1970
*Thomas Hobbes, Leviathan (1-651), trad. F. Tricaud, éd. Sirey, 1971
*Jean Jacques Rousseau, Le contrat social, éd. Flammarion ,2006
*Max Weber, Le Savant et le Politique, traduit par Julien Freund, Paris, Plon, 1963
*Yves Michaud, La violence. Une question de normes, sciences humaines, décembre 1998
*Sébastien Roche, Le sentiment d’insécurité. Paris. Presses iniversitaires de France. 1993
*Sophie Body-Gendrot «L’insécurité. Un enjeu majeur pour les villes», Sciences Humaines n° 89, décembre 1998.
* Par: Mohamed Mazouzi : universitaire(paru dans El Watan-11.08.2012.)
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*Violences, Arbitraires et Peurs en France et ailleurs
Combien le tamis serait-il large, il ne saurait cacher la lumière du soleil
*La domination se combat, la liberté s’acquiert
Violence de l’occupant, violence du mode de vie, violence de l’exclusion, violence du préjugé, violence de l’injustice se rejoignent et forment l’affront le plus grave à la société dite démocratique..Des enfants assassinés en Palestine ; de leurs souffrances « physique et psychologique », nous gardons un sentiment de tristesse mélangé à de la colère, contre l’injustice et l’impunité du régime israélien. Mais est-ce que l’on peut prétendre que nous sommes « libérés » de cette violence, qui nous touche dans notre humanité ? Pas seulement comme simples « partisans » d’une cause mais bien au-delà, dans notre sensibilité d’êtres humains en quête de justice et d’égalité. Difficile dilemme. Difficile distanciation !
La violence n’est pas seulement le propre des pays où sévissent guerres et occupations militaires, mais devient le cancer des soi-disant démocraties. Au cœur de la modernité, resurgit la violence, s’imbrique à notre insu à tous les niveaux de la vie favorisant peur et rejet.
Quel est le rapport entre la violence en Irak, la violence au Japon liée au suicide collectif ou/et la double violence « effective et symbolique » de l’exclusion de jeunes filles -qui choisissent « le voile »- en France ? Les productions écrites et télévisuelles sur l’islam et les musulmans, participent-elles du débat ou de l’alimentation d’une violence insidieuse et perverse ?
on peut résumer les évènements de ces dernières années dans le couplet « violence et arbitraire » sur la scène nationale, comme sur la scène internationale, l’Irak « explosé et
explosif », les témoignages sur les scènes de tortures à la prison Abougharib continuent et les rapports affluent. Combien le tamis serait-il large, il ne saurait cacher la lumière du soleil ; désormais le visage colonial est démasqué par ses propres protagonistes.
Nous sommes toujours dans le jeu des contradictions, de la rhétorique : liberté, démocratie et justice à l’américaine ne sont que le pendant soft de la dictature, la répression et la torture. La Palestine et les exactions extrajudiciaires de l’armée de l’occupation se poursuivent
impunément, les attentats suicides, échec humain et ultime « espoir » condamné au désespoir, la symbolique ratée du 10ème anniversaire du Rwanda et le timide rapport de l’ONU sur le
génocide de Srebrenica, la Tchétchénie meurtrie et oubliée, le faux débat sur « la candidature vieillissante » de la Turquie, le regain de violence en Côte d’Ivoire, au Togo, le ballet diplomatique lors de la crise en Ukraine et la liste est longue. Au-delà des évènements de l’actualité, la violence restera au coeur de l’expression malheureuse de l’homme.
« À force de façonner ainsi le dehors, nous atteindrons le dedans, et par le civisme extérieur nous préparons le civisme intime » Emile Boutmy
Voilà le beau tableau que nos enfants contemplent au quotidien et devant lequel aucune pédagogie ne s’avère efficace ! Ou très peu.
L’explication se noie souvent dans la justification de la « débilité humaine ». Expliquer à un enfant le meurtre des innocents par un procédé non innocent, faire fi de sa subjectivité pour lui dire que la loi du plus fort l’emporte injustement, et cela résonnera comme un coup de tonnerre dans son for intérieur, ébrèchera son innocence, le conduira et l’induira dans la violence symbolique. Une violence qui s’invite de plus en plus dans les cours de récréation de nos écoles.
Ecoles de ghettos, où les enfants sont livrés à eux-mêmes dans une nouvelle pédagogie de la débilisation qui consacre le défoulement et qui remplace la géométrie et la syntaxe par les jeux de Pokémons et du ballon à toutes les heures. Lisez moins, débranchez vos neurones,
divertissez-vous beaucoup et libérez vos pulsions, futurs consommateurs de demain, nous resterons vos maîtres pour toujours, nous penserons à votre place pour votre bien. Le redoublement est fortement conseillé. Bel hymne !
Ecole pour tous, un beau slogan, et une belle initiative,mais aussi un espoir gâché et confronté au cauchemar de la réalité de nosétablissements scolaires, lieux de paupérisation et de gestion de la misère. La vigilance doit être plus que jamais de mise sur tous les champs, l’enjeu de l’école est capital, il est impératif de restaurer et l’autorité et la qualité de l’école pour tous, qui est en principe le premier lieu de formation des futurs citoyens. L’école a besoin de moyens, d’un projet audacieux, mais surtout d’une vision claire (loin des ballottages politiques, de la ségrégation handicapante des quartiers et des esprits revanchards).
L’école se doit de recevoir tous les élèves sans distinction religieuse ou/et ethnique.
Violences, engagements et résistances
« De toutes les habitudes, c’est celle du mal que l’homme contracte avec le plus de facilité »*Ibn khaldoun.
La violence n’est pas seulement le propre des pays où sévissent guerres et occupations militaires, mais devient le cancer de nos démocraties. Au cœur de la modernité, resurgit la violence, s’imbrique à notre insu à tous les niveaux de la vie favorisant peur et rejet. De plus en plus, dans nos démocraties, la violence façonne le comportement, conditionne les parcours
et les cheminements des individus et des groupes, et présente des conséquences irrémédiables sur nos concitoyens. D’où la nécessité d’une stratégie de résistance à toutes formes de violence. Une nouvelle approche plus exigeante, notre effort de résister doit être accompagné d’interrogation et d’évaluation permanentes afin de le pérenniser au-delà des circonstances de crise, ou d’évènements émotionnels.
Des enfants assassinés en Palestine ; de leurs souffrances « physique et psychologique », nous gardons un sentiment de tristesse mélangé à de la colère, contre l’injustice et l’impunité du régime israélien. Mais est-ce que l’on peut prétendre que nous sommes « libérés » de cette violence, qui nous touche dans notre humanité ? Pas seulement comme simples « partisans » d’une cause mais bien au-delà, dans notre sensibilité d’êtres humains en quête de justice et d’égalité. Difficile dilemme. Difficile distanciation !
« L’histoire du monde est, pour une large part, une histoire de guerre. Les grands hommes d’Etat qui jalonnent cette histoire écrite sont généralement des hommes de violence »*John keegan, Histoire de la guerre, trad., Paris, Dagorno, 1996, p.459
Encore plus difficile, avec la réélection et l’investiture à la tête de la première puissance militaire, de G.W.Bush. Le Président de la guerre, de la haine et de la peur. Une réélection qui donne écho à une terrible violence. Drôle de victoire et attentisme déçu, Bush II est toujours
sur la scène internationale avec son engouement fanatique. Ce scrutin, à la fois « attendu et craint » par les chancelleries européennes et l’opinion mondiale, est tombé comme un couperet. Mais il s’agit plutôt d’un simulacre. Qui aujourd’hui peut honnêtement parier sur un changement radical de la politique internationale du gouvernement américain, avec un département de l’Etat gangrené par des lobbies de tous bords.
Quant au citoyen américain, dans sa fragilité et son ignorance d’appréhender le monde extérieur, il reste encore sous le choc du 11septembre, date traumatique, mais aussi alibi fourre tout. Piégé par la peur, il concède ses droits élémentaires à un homme ivre d’une foi de guerre, entouré de stratèges de la mort. Les faucons soutiennent des régimes dictatoriaux, excellent dans la promotion de la thèse du choc des civilisations, poursuivent impunément la terreur en Irak, et distribuent les primes aux soldats. Comble du comble l’exécution froide et inhumaine d’un résistant irakien, déjà blessé et désarmé par un marine dans l’enceinte de la mosquée.
Quel message de liberté et de paix ! « Faire violence aux gens, en leur enlevant leurs biens, a pour effet de leur ôter tout intérêt à en acquérir.. Ainsi le pays se dépeuple et se vide, ses villes
tombent en ruine » comme l’indiquait en son temps l’historien Ibn Khaldoun, Le livre des exemples (vers 1390), trad., Paris, Gallimard, 2002, p.612.
De l’autre coté du miroir
Pire encore, les consciences tombent en ruine, voilà l’objectif de tout pouvoir colonial, voilà l’irréparable. Ce qui se passe outre atlantique ne doit pas inspirer la condamnation et la répugnance seulement, mais aussi l’intérêt et l’étude car nous ne sommes pas à l’abri des mêmes mécanismes de la peur et de la violence.
Certes comme européens, on peut se flatter de notre histoire et de nos « expériences douloureuses » et enrichissantes avec les autres nations. Mais à force de crier au loup parmi nous, de faire des talk-show sur les concitoyens de confession musulmane, de distiller la
méfiance dans l’opinion publique, et de spéculer sur l’allégeance de ces mêmes concitoyens, l’air est devenu vicié et le vent chaud a tourné à notre insu.
Cette approche soupçonneuse alimentée par la rumeur montre ses limites, à nous de ne pas nous enfermer dans le fossé de la « justification », de ne pas verser dans le registre du « misérabilisme » et de ne pas se réduire à des impuissants « dominés ». La thèse de la « domination » fait malheureusement partie d’un héritage historico-culturel, mais il ne faut
pas qu’elle justifie notre dérobade, ni qu’elle devienne un constituant intellectuel de notre mentalité. Méfions-nous, quel que soit notre bord, de la polémique sur la domination, nous faisons partie du corps social ; être à la marge n’est pas être « dehors », être en difficulté, ce n’est pas perdre le combat des principes et de l’avenir. La domination se combat, la liberté s’acquiert
Le discours de la haine
ne s’agit pas là de la promotion du dernier livre d’André Glusckman, ni de celui de Pierre André Taguieff les « prêcheurs de la haine », un procès partisan de 950 pages, loin de là, mais plutôt de pointer l’hypocrisie politique des acteurs de la scène politique nationale.
Phénomène de mode, tout le monde parle de « la peur des citoyens », La classe politique découvre une passion pour les phobies, mais personne n’ose qualifier sa propre responsabilité dans la diffusion, voire l’installation de cette peur, tout le monde, glose en « vers de poésie » sur l’indispensable « vivre ensemble », mais personne n’est là quand il s’agit de prendre des mesures concrètes en vue de l’apaisement social, de lutte contre les discriminations et de l’arrêt des politiques sécuritaires outrancières. Politiques ciblées visant à museler des intellectuels qui ont commis l’insupportable : un franc parler qui bouscule les grilles de lectures néocolonialistes et les schémas préétablis concernant les citoyens de confession musulmane.
Le problème est avant tout celui d’une « minorité politique gouvernante par rotation » qui est en mal de proposition d’un réel projet « démocratique » qui répond aux attentes de tous les
citoyens. La classe politique continue de faire fi, des dérives xénophobes dont souffre tout un pan de la société. La vraie question c’est la crise sociale liée à la panne politique : exemple en
est aujourd’hui, que l’on va être réduit à envoyer des CV de Robot, des « CV anonymes » sans nom, ni adresse, ni date de naissance : bricolage risible ! C’est que « le nom » d’une
personne qui constitue sa première identification, sa première sensibilité affective, socle de sa compétence « psycho-identitaire ». Son nom donne accès à sa mémoire.
Cessons les mesurettes mettant de la poudre aux yeux .
Les gouvernements successifs depuis 25 ans ont toujours évité le débat de fond. De la « discrimination positive », on parle de « volontarisme républicain », c’est bien poétique ! Mais dans La République française, l’égalité n’est pas sujette au volontarisme des uns ou à la
paresse des autres, elle s’applique. Dans La République, la liberté n’est pas celle du fantasme ou de la phobie des uns et des autres, elle est promotion de l’esprit de justice, garantie de l’expression et respect des lois, dans notre république la fraternité n’est pas seulement celle d’un match de foot mais d’une solidarité bienveillante et d’un épanouissement dans le lien qui nous unit comme français. Sinon il va falloir faire le nécessaire pour redonner à la devise républicaine son véritable sens.(…)*oumma.com-15.07.2005.)
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*Amar Ghoul: L’homme qui marie l’ambition à la modestie
Les différents postes de responsabilité assumés dans sa carrière lui ont permis de se forger une stature d’homme modeste, accessible, et surtout proche du peuple.
Réputé pour être un bosseur infatigable, Amar Ghoul est parmi les rares ministres algériens qui sont toujours appréciés par les citoyens. Les différents postes de responsabilité assumés dans sa carrière lui ont permis de se forger une stature d’homme d’Etat doublé d’une modestie à vous désarçonner. Affable et accessible, il a surtout la qualité d’être très proche du peuple. Lors de ses différentes sorties sur le terrain pour inspecter l’état d’avancement des travaux de son secteur, les routes notamment, Amar Ghoul a réussi à s’approcher davantage des citoyens. Il ne rechigne jamais à échanger une poignée de main, un sourire ou échanger des propos avec le plus simple des citoyens qu’il rencontre. A chaque visite d’inspection, -en sa qualité de ministre des Travaux publics-, M.Ghoul ne manque jamais de «chambouler» le programme de la visite pour aller prendre un café dans la place publique ou casser la croûte dans un restaurant populaire. Le contact direct avec les Algériens ne se limite pas seulement dans la vie professionnelle d’un ministre, mais aussi dans la vie personnelle d’un «citoyen ordinaire». Parlant de l’homme ordinaire, il ne rate jamais l’occasion pour disputer un match de football dans un stade de proximité situé dans un quartier populaire, à Bab El Oued notamment. Ce n’est pas tout, il pratique sa vie religieuse avec tous les autres fidèles, en se rendant à la mosquée sans protocole aucun. C’est autant de marque de modestie et de sympathie qui ont permis à M.Ghoul de marquer de bons points en termes de popularité. La preuve? A lui seul, il a raflé 13 sièges lors des dernières élections législatives en sa qualité de candidat d’Alger pour la liste «Alliance de l’Algérie verte». Elu député d’Alger, Amar Ghoul, comme cinq autres ministres d’ailleurs, s’est vu retirer la responsabilité de son poste de ministre des Travaux publics par le président Bouteflika. Mais cette victoire a donné des sueurs froides au président du MSP, Bouguerra Soltani, qui voyait en lui non seulement un concurrent mais une menace pour ses visées islamistes. En effet, il est connu que Amar Ghoul est un nationaliste jusqu’au rachis, ce qui dérange les desseins de M.Soltani qui, à la veille des dernières législatives, se voyait régnant sur un Etat islamique en Algérie.
N’ayant pas accepté la décision de son ancien parti, le MSP, de ne pas figurer dans le prochain gouvernement, Ghoul a décidé de couper le cordon ombilical avec cette formation. Il était appelé à choisir entre le parti et le gouvernement, M.Ghoul a répondu par cette terrible phrase: «Je suis au service de mon pays, l’Algérie, et je crois en la démocratie comme idée et comportement civilisé.» Une phrase lourde de sens qui renseigne sur la qualité de l’homme d’Etat qu’est M.Ghoul. Pour l’entourage de l’ancien ministre, ce n’est point les privilèges qu’offre le poste de ministre qui ont motivé un tel choix, mais il s’agit, plutôt, d’une profonde conviction de l’intéressé qui veut être au service du pays et affiche, ainsi, son attachement à l’Algérie et surtout prouver son patriotisme. Issu d’une famille de paysans modestes, Amar Ghoul est né le 21 février 1961, dans la localité d’El Abadia, dans la wilaya de Aïn Defla. Il a assumé plusieurs postes de responsabilité. Il obtient son Bac de mathématiques au lycée de Miliana en 1980. En 1986, il occupe le poste d’ingénieur d’État en génie civil à Rouiba. En 1989, il part pour la France où il obtient en 1991 un doctorat en génie nucléaire. En 1998, il est diplômé à Oran où il est fait docteur d’État en génie mécanique. Ce père de 3 enfants, s’est fait également un parcours politique. Il a été élu à plusieurs reprises député à l’Assemblée populaire nationale. Ancien chercheur dans une université française dont il était enseignant, il a aussi occupé le poste de ministre de la Pêche et des Ressources halieutiques avant d’être nommé ministre des Transports et désigné à deux reprises ministre des Travaux publics. Dans ce poste, il a offert à l’Algérie l’un des plus grands projets du siècle, à savoir l’autoroute Est-Ouest ainsi que d’autres réalisations qui hissent l’Algérie au rang de plus grand pays africain doté de grandes infrastructures routières. (L’Expression-28.07.2012.)
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Very effectively written information. It is going to be worthwhile to anyone who usess it, including myself. Sustain the nice work – for certain i’ll take a look at extra posts.
Wohh precisely what I was looking for, thanks for putting up. « Never say that marriage has more of joy than pain. » by Euripides.