Festival national du théâtre professionnel.Alger
** 8e Festival national du théâtre professionnel -du 24 mai au 02 juin 2013
17 troupes sont inscrites en compétition officielle
El djamilate ouvre le 8e Festival national de théâtre professionnel

Al Sawt (la voix), pièce en compétition du Festival
Le huitième Festival national du théâtre professionnel se déroule à Alger jusqu’au 2 juin 2013.
L’anti-héros a peu de place dans l’histoire de la guerre de Libération nationale en Algérie. C’est déjà le cas aussi pour d’autres guerres et d’autres conflits. Mais en Algérie, «la légitimité révolutionnaire», véritable carburant des pouvoirs politiques successifs a fait que les gens simples, embarqués malgré eux dans le mouvement de l’histoire, n’existent pas. Dans Al Sawt (la voix), pièce en compétition au 8e Festival national du théâtre professionnel qui se déroule au Théâtre national Mahieddine Bachatarzi à Alger, Ali Djebara tente de redonner la parole à un homme qui n’a rien demandé à personne. A partir d’un texte de Khaled Bouali, Ali Djebara a mis en scène cette pièce tout en interprétant le premier rôle, celui d’Ahmed Marrouche.
En 1957, quelque part en Algérie, des paras français débarquent dans la maison d’Ahmed et l’enlèvent. Ils le soupçonnent de collaborer avec les moudjahidine en cachant des documents importants. Ahmed sera soumis à la torture (une grande spécialité du régime colonial). Ses doigts seront coupés. Sa jeune épouse, Hizia, qui a tenté de résister, a été assassinée par les militaires français. Ahmed perd la raison et va vivre dans un rêve circulaire. Ses douleurs remontent à la surface et ses troubles du sommeil dérangent sa mère. C’est une tourmente presque permanente. «J’ai peur de la nuit», crie-t-il.
La scénographie bâtie sur un arc qui représente une maison décorée par des arcades et des cercles exprime donc cette rêverie et ses tiraillements psychologiques autant que la lumière qui est peu utilisée pour intensifier la dramaturgie. L’idée du croissant est également présente à travers la scénographie pour suggérer, peut-être, un certain idéal patriotique. «Lorsqu’on évoque la guerre de Libération nationale, on parle de Six, des Vingt-Deux, des hommes à la moustache portant des armes. Tous les Algériens ont souffert. Il y a eu beaucoup d’Ahmed Marrouche en Algérie. On n’en a jamais parlé. Ils n’ont eu ni carnet ni pension, rien.
Cette grande catégorie de la population a été ignorée. A Batna, le personnage d’Ahmed Marrouche a réellement existé. Il n’est plus de ce monde. L’histoire aurait pu se dérouler à Constantine, Batna, Alger ou ailleurs. On peut même élargir la réflexion à l’époque du terrorisme. Beaucoup d’Algériens ont payé les pots cassés, dépouillés de leurs biens, blessés, perdu des membres de leur famille sans avoir un quelconque lien avec ce qui se passait», a expliqué Ali Djebara à la fin de la pièce. Al Sawt se veut donc l’expression d’une certaine révolte contre l’écriture conventionnelle et lisse de l’histoire. Les héros anonymes, écrasés par l’oubli, comme Ahmed Marrouche, retrouvent une certaine voix, une petite visibilité, d’où le titre de la pièce. «Nous avons toujours peur d’écrire notre histoire. Il y a certains héros qui sont intouchables. Il faut un peu d’audace, en finir avec la langue de bois. Il faut oser. Aujourd’hui, avec internet, les jeunes connaissent beaucoup de choses», a plaidé Ali Djebara.
Ali Djebara, qui participe pour la première fois au Festival national du théâtre professionnel comme metteur en scène, regrette la mise à l’écart du dramaturge et poète Khaled Bouali. «Malheureusement, Khaled Bouali est marginalisé dans son pays. On refuse de monter ses textes. Il a écrit la pièce Jugurtha en 2007. Après quatre spectacles, la pièce a été rangée dans les placards», a-t-il dit. Al Sawt est une pièce produite par le Théâtre régional de Batna. Dimanche après-midi, le théâtre régional d’Oum El Bouaghi a présenté sa nouvelle pièce, Oumssiya fi baris (une soirée à Paris). Hier, les théâtres régionaux de Mascara et de Constantine ont présenté également leurs nouvelles productions.**Fayçal Métaoui-El Watan-28.05.2013.
**L’amertume des jours d’après
La pièce Al Kelma de Allaoua Zermani présentée à Alger
Pour Allaoua Zermani, metteur en scène et comédien, il est temps de dresser le bilan, cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie.
La parole a une valeur. En Algérie, au Maghreb, c’est une culture. Ne pas respecter la parole équivaut à une trahison, une lâcheté, un reniement. Dans Al Kelma, pièce présentée lundi soir au Théâtre national Mahieddine Bachatarzi à Alger, à l’occasion du 8e Festival national du théâtre professionnel, cette idée revient comme une revendication profonde. A partir d’un texte de Djamel Dekkar, Mohamed Tayeb Dehimi et Abdelhamid Boutouha, Allaoua Zermani a mis en scène une pièce en s’appuyant sur les techniques du théâtre classique pour raconter l’histoire d’un village de l’Est algérien.
Dans ce village, situé dans les Aurès, à l’époque coloniale française, les habitants tentaient de résister à la faim, à l’oppression et au désepoir. El Mokhtar (Mohamed Tayeb Dehimi), son épouse, Oldja (Chahinez Negouache), sa fille, Dhaouia (Najla Tarli), El Caïd, (Antah Hellal), Boudjemaâ, (Ahcène Ben Aziz), Mohamed Salah Hamlaoui, (un gendarme français), El Cabrane, (Zoubir Izzam), et d’autres encore vivaient au rythme de la peur, de la trahison, de l’arbitraire, de la misère, du dénouement… Quand la vache d’El Mokhtar est tuée par un colon, ce fut le désastre. Et quand le distributeur algérien des bons de rationnement alimentaire, qui se prend pour un colon, martyrisait les villageois, ce fut la consternation. Les militaires, qui, parfois, sortaient du bar voisin où l’on entendait chanter Edith Piaf, humiliaient, insultaient, frappaient la population. Ils étaient appuyés par El Caïd et les colons. Des colons qui montaient au créneau à la vue des premiers tracts appelant au soulèvement contre l’ordre colonial…
La révolte allait finir par arriver. Chacun retrouvera son camp. Des morts, des orphelins, des terres brûlées, des villages détruits…et puis l’indépendance. Et après ? El Mokhtar constate, avec douleur et amertume, que le village a été abandonné, oublié, par les nouveaux pouvoirs d’après 1962. «Les voilà, ils arrivent avec leurs voitures noires. Ils vont prendre le chemin du village… Non, ils ne viennent pas», se lamente le vieux. Son épouse reprend la parole : «Ils sont armés. Ils vont faire la chasse.» «La chasse à Chaabet el halouf», précise El Mokhtar. «Ils ont étalé des draps sur l’herbe et déposé de la nourriture», insiste Oldja. El Mokhtar décide alors d’écrire une lettre à ces «libérateurs» oublieux, ingrats.
Il le fait au nom de «ahd el dem» (le pacte du sang) : «Au nom du sang qui a coulé, au nom de la première balle, au nom de chacun personne qui a affronté l’ennemi avec une pierre, un bâton ou un mot, au nom de ceux qui ont marché pieds nus,…» Il s’adresse aux moudjahidine qui n’ont pas pris la lutte contre le colonialisme pour «une attestation» pour accéder aux privilèges (sont-ils nombreux ?).
Al Kelma est une pièce bavarde avec une scénographie statique. Le jeu des comédiens reste correct autant que l’exploitation de la lumière. Le metteur en scène a utilisé la chanson de Aïssa Djermouni, Bqaw Beslama ya arab Merouana, comme intermède, sans doute pour rappeler l’époque durant laquelle la pièce se déroulait. Cette chanson portait déjà une certaine contestation de la part de Aïssa Djermouni, qui avait annoncé avec fracas son départ de la ville de Merouana. A partir des années 1940, Aïssa Djermouni était la voix la plus écoutée dans les cafés et les foyers de l’Est algérien.
«Le texte de la pièce est inspiré d’une histoire vraie, racontée par un moudjahid (représenté par El Mokhtar, ndlr). C’est un texte riche qui peut être inscrit dans le registre du théâtre populaire. Je ne me suis pas trop fatigué pour l’adapter. La sincérité et l’honnêteté du texte m’ont beaucoup plu», nous a déclaré Alloua Zermani après la représentation. «Nous sommes en retard déjà, mais le moment est venu de dresser le bilan de la guerre de libération. On nous a toujours dit que ce n’était pas le moment, mais je pense qu’il faut le faire, avant que les témoins de l’époque ne disparaissent et n’emportent leurs souvenirs», a ajouté Allaoua Zermani.**Fayçal Métaoui-El Watan-29.05.2013.
**7e Festival national du théâtre professionnel (FNTP)
**Le coup d’envoi du Festival national du théâtre professionnel (Fntp) a été donné samedi à Alger par la présidente du l’édition 2012, l’actrice algérienne Sonia, en présence de la ministre de la Culture, Khalida Toumi.
La présidente de la 7e édition a déclaré ouvert le Fntp qui se tient jusqu’au 27 septembre au théâtre national Mahieddine Bachtarzi lors dئune cérémonie d’ouverture marquée par la présentation d’un montage poétique de l’auteur Toufik Ouamane ainsi qu’un hommage rendu à des personnalités du 4ème art, avant l’entrée en compétition de la troupe du théâtre régional d’Oran, concourant parmi 17 troupes de plusieurs régions d’Algérie.
La directrice du théâtre régional d’Annaba a rappelé dans son allocution d’ouverture que la 7e édition du Fntp coïncide avec les célébrations du cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie et a relevé à l’occasion la « transmission féconde entre les générations » de comédiens en cinquante ans de théâtre algérien.
Pour marquer cette célébration du cinquantenaire, des comédiens ont interprété un spectacle titré « Boubchir », conçu sur un texte aux accents patriotiques de l’auteur algérien Toufik Ouamane.
La troupe du théâtre régional d’Oran a ensuite ouvert la compétition avec la pièce « Hasla », une comédie sociale sur le monde du travail écrite par Benamara Mahi et mise en scène de Mdjahir Habib qui a trouvé un écho très favorable du public.
La compétition qui réunit 17 troupes de plusieurs régions d’Algérie se poursuit jusqu’au 27 septembre à raison de deux représentations par jour.
Des troupes algériennes et étrangères donneront des représentations en marge de la compétition à Alger ainsi qu’à Tlemcen, Tizi-Ouzou, Médéa, Annaba, Maghnia et Koléa.
Outre les pièces théâtrales, le colloque « cinquante ans d’indépendance, cinquante ans de théâtre » abordera la question de l’archivage et la documentation dans le théâtre du 22 au 24 septembre à la salle Atlas (Alger) et réunira des universitaires algériens et étrangers ainsi que des écrivains à l’instar de l’auteur Wassiny Laâredj.
Une journée d’étude sera par ailleurs organisée le 20 septembre à la salle El Mougar (Alger) autour de la vie et l’œuvre de Kateb Yacine. Des ateliers d’écriture et de théâtre sont également prévus, en plus de rencontres littéraires et de spectacles de rue.*Djazair50.dz
**Le coup d’envoi du 6e Festival national du théâtre professionnel est prévu pour mercredi sur les planches du Théâtre national algérien (TNA). La cérémonie d’ouverture officielle a été effectuée mardi soir. Les compétitions officielles de cette manifestation annuelle seront inaugurées par la pièce « les nuits de la mort » du théâtre régional de Sidi Belabbes, qui a remporté le prix du meilleur spectacle théâtral du dernier festival.
Selon la tradition suivie par les organisateurs, le coup d’envoi du festival national est donné par le meilleur spectacle du dernier festival avec la participation des troupes amateurs à la compétition officielle dont la coopérative « Eddarb al Acil » de Laghouat avec sa pièce « Le mur » qui a remporté le premier prix du dernier festival régional de Annaba.
L’Algérie abrite tout au long de l’année des festivals dédiés au 4e art (théâtre professionnel et amateur) auxquels sont venues s’ajouter deux nouvelles manifestations consacrées au théâtre amazigh à Batna et Tizi Ouzou.
« Les nuits de la mort » se trouvera en concurrence avec « la nuit des nuits » du théâtre régional de Constantine qui aspire à retrouver sa gloire grâce à cette pièce et à d’autres oeuvres en cours de finalisation , a déclaré dernièrement son nouveau directeur général. L’annonce par le nouveau directeur du théâtre régional de Tizi Ouzou de sa participation au festival a eu un effet de surprise. Sa participation était incertaine au vu des problèmes internes qui ont été à l’origine de la démission de l’ex-directrice.
« Business is Business » du théâtre régional de Tizi-ouzou entrera en compétition avec 14 autres oeuvres réalisées par les théâtres régionaux. Ainsi, il sera difficile pour le théâtre de Sidi Belabbes de reproduire le succès de l’année dernière au cours de laquelle il a remporté le prix du meilleur spectacle avec sa pièce « Séducteur des étoiles ».
Le public et les critiques attendent avec impatience la nouvelle pièce du théâtre régional de Skikda « Aam el Habl » mise en scène par la comédienne Sonia qui a obtenu l’année dernière le prix de la meilleure mise en scène. Les théâtres régionaux ont été renforcés au cours des deux dernières années par l’ouverture de nouveaux théâtres à Guelma, Skikda, Oum el Bouagui et Mascara.
Le directeur du TNA, M’hamed Benguettaf a indiqué qu’il oeuvre pour la création d’une nouvelle institution théâtrale à caractère national qui aura des objectifs et des moyens de travail autres que ceux dont disposent les théâtres régionaux dont la transformation de l’actuel « TNA » en un théâtre régional d’Alger. Le public et les critiques attendent avec impatience les pièces qui seront présentées par les nouveaux théâtres régionaux d’Oum El-Bouaghi, de Guelma et de Mascara.
La compétition promet d’être rude entre les quatorze (14) troupes en lice pour décrocher l’un des dix (10) prix du festival qui seront remis lors de la cérémonie de clôture prévue le 7 juin. Le programme hors compétition prévoit la participation de neuf (09) troupes algériennes et de dix (10) troupes étrangères, dont huit (08) troupes arabes, une troupe d’Afrique centrale et une autre française.
Ce programme prévoit aussi d’autres espaces à Alger (salle Hadj Ameur, salle El-Mougar, Palais de la culture Moufdi-Zakaria) et dans certaines wilayas limitrophes, alors que les planches du Théâtre national algérien (TNA) sont réservées aux pièces théâtrales en compétition. L’Egypte sera présente avec « El-brova el-akhira » (l’ultime répétition) de la troupe « Maison artistique du théâtre » et la Tunisie avec « Zeriât Ibliss » (la race de satan) de la troupe « Art des deux rives ». Des troupes du Maroc, d’Irak, de Jordanie, de Syrie et de Palestine participent également.
Le festival sera aussi marqué par l’organisation d’une rencontre sur la critique théâtrale du 28 au 30 mai et de onze (11) ateliers sur l’art théâtral, outre la consécration d’un espace aux arts plastiques et d’un autre à l’art oratoire. Des hommages seront rendus, à cette occasion, à des personnalités algériennes et arabes du théâtre.
La manifestation créative « La poésie s’invite au théâtre » est la nouveauté de ce festival. Trois nuits de la poésie seront ainsi dédiées à la mémoire de Abou El-Kassem Echabi, de Abdallah Rekibi et de Abdallah Benkriou. Ces soirées seront animées par de grands noms algériens et arabes, dont Azradj Omar et Tayeb Leslous (Algérie), Hiyam Yared (Liban) et Idris Allouche (Maroc).
Institué en 2005 en vertu d’un arrêté du ministère de la Culture, le Festival national du théâtre professionnel s’attache à développer les arts du théâtre national, à encourager les expériences pionnières et les recherches en matière de théâtre, notamment à travers l’organisation de rencontres, et à encourager l’émulation créative dans le domaine théâtral.
Le commissariat du festival est dirigé par le directeur du TNA. Il jouit d’une administration indépendante et d’un budget permanent du ministère de la Culture. Le Festival national du théâtre professionnel a joué, aux côtés des autres festivals nationaux et régionaux dans les domaines des arts et de la création, un rôle crucial dans la diffusion de la culture.*APS-
**La pièce « Imra min waraq » presentée au festival national professionnel du théâtre
Imraâ min waraq, de Sonia Mekiou et Mourad Senouci, a rappelé au public du Festival national du théâtre professionnel les douleurs d’un passé algérien pas très lointain…
Moments d’émotion mardi après midi à la salle du Théâtre national Mahieddine Bachtarzi (TNA) lors de la présentation de la pièce Imraâ min waraq (Femme en papier) au septième Festival national du théâtre professionnel (FNTP). Mise en scène par Sonia Mekiou à partir d’un texte de Mourad Senouci, adaptée du roman de Waciny Laredj, Ountha Al Sarab (Femme mirage), la pièce a replongé les présents dans l’univers violent des années 1990. Certains spectateurs ont pleuré. «J’ai senti l’émotion du public, je n’ai pas pu résister moi-même», nous a confié Sonia après le spectacle retenant difficilement ses larmes. L’histoire racontée par la pièce est simple et dense à la fois. Un écrivain crée un personnage féminin, Mériem, qui l’accompagne pendant 25 ans dans ses écrits.
La présence de «Mériem al hourouf» (Mériem des lettres) dans la vie du romancier finit par susciter les soupçons de son épouse, celle qui s’est établie en terre étrangère pour partager sa vie de bohême. Mériem est-elle réellement une femme en papier ? Sur scène, l’épouse de l’écrivain (Lydia Laârini), vêtue de noir, est plongée dans les pages éparpillées d’un livre ou de plusieurs livres. Elle a allumé un brasero pour en brûler quelques-unes comme pour oublier des souvenirs douloureux, des moments de mélancolie. Elle évoque le coma de son époux dans son exil parisien, le courage de sa fille Nada et remonte dans le temps, l’époque des premières retrouvailles avec l’écrivain, appelé «El oustad».
Soudain, on frappe à la porte. Une femme, habillée en blanc, se présente. C’est Mériem (Raja Houari), la femme-mirage, la femme en papier. Mais là, elle parle à l’épouse du romancier, elle lui rappelle des faits passés, des petites histoires intimes. Du concret ! L’inquiétude de l’épouse augmente. «Comment peux-tu connaître tout cela ?», se demande-t-elle. «Je suis l’héroïne de tous ses livres. El oustad aime les secrets. Je suis un de ses secrets», réplique Mériem. Elle lui rappelle que l’écrivain a choisi ce prénom pour son héroïne en hommage aux femmes algériennes et à leur courage. L’épouse est dans tous ses états : «Je pensais que c’était une simple idée ce personnage !»
La discussion se prolonge. Mériem parle de la rencontre de l’épouse avec le romancier en 1985 lors d’une pièce de Abdelkader Alloula. Alloula qui sera assassiné en mars 1994. La pièce, s’appuyant sur une image projetée en arrière-fond, évoque, à chaque passage, les noms qui ont marqué la vie culturelle nationale : M’hamed Issiakhem, Yacine et Mustapha Kateb (décédés le même jour, le 28 octobre 1989), Djamel-eddine Zaïter, assassiné devant la tombe de sa mère en 1994 à Gydel, dans la région d’Oran. Dans son adaptation, Mourad Senouci a rappelé l’enterrement oranais de Abdelkader Alloula, marqué par une forte présence. Sonia a choisi une photo montrant la foule criant sa colère et la Une d’Alger Républicain : «Le lion d’Oran est mort ». «Ils ont tué Garcia Lorca, décapité Bashar Ibnou Bord, mis en prison Nazim Hikmet et coupé les doigts de Victor Jara. Mais qu’ont-ils fait ? Rien ! La plupart des héritiers du sang meurent de maladies. Leur tyrannie ne les a pas sauvés ! La plupart d’entre eux ont été tués par leurs propres amis, décédés dans l’isolement ou en exil. Qui se rappelle du bourreau de Ahmed Zabana ou du fasciste qui a tué Azzeddine Medjoubi ?», lance une voix off à la fin de la pièce. Blanc/noir, noir/blanc, les couleurs de la pièce suggèrent cette idée de réalité/imagination. Sonia n’a pas oublié d’introduire une certaine poésie au spectacle, appuyé par la scénographie de Yahia Benamar faisant appel à la lumière et à l’ombre.
Des feuilles blanches sont accrochées comme dans un arbre aux mille souvenirs et dansent au rythme d’un vent invisible. «Ce n’est pas parce qu’on évoque des choses graves et terribles qu’on ne peut pas le faire dans un cadre esthétique. J’ai laissé le doute. Au spectateur de savoir si Mériem est réelle ou pas», a expliqué Sonia après la représentation, assaillie par les journalistes. La dramaturgie conçue par le metteur en scène a fait oublier au public cet aspect. Lydia Laârini et Raja Houari ont joué leur rôle avec sincérité et ont donné à la pièce toute la valeur et l’émotion qu’elle exigeait.
«J’aime bien travailler avec Lydia Laârini. C’est une comédienne engagée, très pointilleuse dans son travail, chargée d’émotion», a confié Sonia, qui a repéré Raja Houari lors d’un spectacle pour enfants. «J’ai voulu prendre des risques avec elle. Et j’ai eu raison, je crois (…). Je travaille avec Mourad Senouci sur ce projet depuis deux ans. Ce qui m’a interpellée dans le texte, c’est qu’il revient sur notre histoire récente, les années terribles que nous avons vécues. Nous n’avons pas le droit d’oublier. Si on oublie, on risque de recommencer. Il était important de rendre hommage à nos amis disparus et au peuple resté debout pendant ces années. C’est une pièce que j’ai montée avec le cœur, pas avec la tête», a souligné Sonia.
Lydia Laârini a, pour sa part, confié avoir aimé son rôle. «Tellement aimé parce que cela évoque l’Algérie, la décennie noire, les créateurs et artistes morts. J’apprécie bien le travail théâtral qui m’oblige à faire des recherches», a-t-elle dit. Sur scène, Lydia Laârini n’a pas maîtrisé ses larmes, pleurant lors de l’évocation des funérailles de Abdelkader Alloula.
Elle a transmis sa douleur et sa tristesse au nombreux public présent. Sonia, qui est actuellement directrice du Théâtre régional de Annaba, évoque Abdelkader Alloula. «Il était un repère pour moi. De son vivant, je n’ai jamais fait un travail sans avoir son avis. Dommage que les jeunes ne connaissent pas Alloula. Cet homme était exceptionnel de générosité, de sincérité et d’engagement et d’amour de son pays», a-t-elle souligné.* Par Fayçal Métaoui *El watan-20.09.2012.
***(article de l’Expression)=Une mise en scène marquée d’un esthétisme avéré et des hommages à nos artistes martyrs et au peuple resté toujours debout après la tragédie nationale.
Serait-ce une adaptation libre du fameux livre sulfureux La Femme de Papier de Françoise Rey? Mais non plutôt une version théâtrale de l’oeuvre Ounta Esarab de Wassini Laaredj, adaptée sur les planches par Mourad Senouci et mise en scène par la grande comédienne Sonia alias Sakina Mekiou.
Cette dernière est, contrairement à ce que nous avons émis précédemment, présidente d’honneur et non pas du jury à la 7e édition du Festival national du théâtre. La pièce a été jouée dans l’après-midi de mardi dernier dans l’enceinte de la salle Mustapha-Kateb assez bien remplie.
Un air vaporeux se dégage au lever du rideau! Ouf!Pas de chiffons en vue qui viennent serpenter le long des travers du théâtre, mais seulement un voile sur lequel sont projetées des ombres chinoises. Quand la lumière fut, on comprendra que ce qui miroitait là haut et donnait ce joli aspect esthétique au fronton du décor était un amas de feuilles accrochées ça et là formant presque une grappe de perles en papier. Sur les planches, assise par terre en robe noire, entourée de feuilles, une femme brune, cheveux attachées, s’apitoie sur son sort.
Son mari, écrivain de son état, vient d’être hospitalisé à Paris. Elle sera bientôt rejointe par une autre femme qui prétend être la maîtresse de son mari depuis des années. Puis elle lui retrace les moments forts de leurs rencontres et retrouvailles à Alger et à Oran. Son prénom est Mériem. Elle est de tout blanc vêtue. Blanchie un contraste exprimant le noir sur blanc. De la joie au drame. Un jour l’homme demande à sa femme de lui suggérer un prénom féminin pour en faire un chef-d’oeuvre littéraire et rendre hommage à la femme algérienne. Ce sera Meriem. Mais celle-ci se rebiffe après avoir eu une grande place dans la vie de l’auteur et exige une forme de reconnaissance. Elle refuse d’endosser le même que sort Zoulikha, cousine et héroïne du roman de Kateb Yacine, Nedjma, bien que son existence demeurera effacée derrière la grandeur de ce livre entré dans l’Histoire. Et si la femme en papier cachait au fond une bien réelle, dans la vie de son mari? Celle-ci ne veut pas sortir de sa tête et continue à converser avec elle. Cela se solde par une confrontation entre les deux. La jalousie les fait parler. Elle est aussi le prétexte pour se rappeler les bons et mauvais moments de notre histoire.
Meriem prétend avoir rencontré pour la première fois l’écrivain en 1985, lors de la première représentation de la pièce El Ajouad de Abdelkadar Alloula au TR d’Oran puis revu 5 mois plus tard, en décembre lors de l’enterrement du plasticien M’Hamed Issiakhem. Et de confier un peu plus loin:«On s’est revu en 1993 à Didouche-Mourad, dans un café qui tolérait encore à l’époque la mixité…»Entre narration et lamentation la pièce est souvent traversée de haltes historiques via des images de vidéos projetées sur le mur du TNA. Un hommage ainsi est rendu au peuple, notamment à travers les événements du 5 Octobre 1988. A ces artistes qui ont choisi de rester, dont Alloula qui ne se voyait pas partir avec son théâtre sur le dos!La pièce propose donc une halte sur la tragédie nationale vécue par l’Algérie et se veut un plaidoyer contre l’oubli envers ceux qui ont été victimes des assassinats ciblés au début des événements tragiques: les artistes. «On ne rend hommage à l’artiste qu’après sa mort sinon on lui reconnaît un statut et légitimité qu’à partir du moment où il part à l’étranger» dit la dame brune, cheveux défaits cette fois, dépitée et en colère après son face-à-face avec l’autre femme….l’art, la culture algérienne et son patrimoine sont évoqués. On entend le nom de Sidi Lakhdar Benkhlouf. Certains pays comme La Palestine, l’Irak sont évoqués ainsi que ceux qui ont soutenu l’Algérie durant les années 1990. «Quand le malheur nous a frappés on s’est retrouvés seul et l’amour fut banni…», entendons-nous. Alors étudiante aux Beaux-Arts, toute la famille de Meriem lui impose le mariage avec un homme d’affaires véreux et de laisser tomber ses études. Exclusivement féminine Imraa min Waraq s’appuie sur le dialogue entre les deux rivales, l’épouse de l’écrivain incarnée par Laarini Lydia et l’héroïne du roman Meriem dont le rôle a été attribué à Houari Rajaâ. Mais celle qui exhale largement de l’émotion par son jeu délicat et profond est bien Laarini Lydia qui a su relever le texte et le porter au firmament. On regrettera les quelques digressions de cette pièce tombée dans le sillage de la commémoration la faisant bousculer et basculer dans le tourbillon historique. Un instant d’égarement dramaturgiquement idéologique pour revenir à son point initial quand les deux femmes se rejoignent finalement comme dans un miroir de sérénité. Et la dame brune de retomber dans ses rêveries sur sa chaise… heureusement qu’il reste la poésie. Bel hymne à la beauté des mots qu’est finalement cette pièce, au livre, à la liberté.* L’Expression-20.09.2012.
**Représentation de -Iftiradh ma hadha faillen
Les révoltes dans le monde arabe contre les dictatures ont laissé une trace claire dans la pièce Iftiradh ma hadha failen.
Petite bouffée d’oxygène, lundi soir, à la salle du Théâtre national Mahieddine Bachtarzi à Alger. La pièce Iftiradh ma hadha failen (Hypothèse de ce qui est réellement arrivé) du Théâtre régional d’Oum El Bouaghi a été suivie d’un tonnerre d’applaudissements par le public du 7e Festival national du théâtre professionnel (FNTP) qui se déroule jusqu’au 27 septembre 2012. Mise en scène par Lotfi Ben Sbaâ à partir d’un texte de l’Irakien Ali Abdelnabi Al Zaydi, la pièce se détache par une saisissante expression contemporaine et par une tonalité rafraîchissante.
Cela se passe à l’intérieur d’un asile de fous. Là où la vie atteint son troisième parallèle. Le Maréchal, parfaitement interprété par le jeune Hicham Guergah, et son conseiller joué par Seif Eddine Berkani, montent ce qui ressemble à un jeu : chercher la dépouille du «soldat inconnu». Mais, cette fameuse dépouille n’existe pas. Comment faire pour la trouver ? Plan A : trouver un soldat vivant, bien portant, pour l’enterrer et en faire «un inconnu». «Je refuse ! Je veux être soldat sur terre pas sous terre», crie-t-il. «Tu seras condamné pour haute trahison !», réplique le Maréchal, qui, parfois, se prend pour un chien aboyant et léchant son conseiller. «La patrie qui m’accuse de trahison ne mérite pas que je la serve», reprend le soldat suscitant une petite réaction dans la salle. On passe au plan B : la guerre. Mais, là, il faut bien inventer un conflit, choisir au hasard un «pays», lui livrer bataille.
Le but ? Avoir un cadavre pour en faire… un soldat inconnu. Les pensionnaires de l’asile se prennent pour les maîtres du monde et le Maréchal qui se réveille chaque fois sous les crachats mène sa troupe comme pour maintenir «un certain» ordre.
Ceux qui nous gouvernent sont-ils tous fous ? La guerre est-elle le jeu favori des désaxés ? Très physique, la pièce est bâtie sur le principe du théâtre pauvre du dramaturge polonais, Jerzy Grotowski. Les comédiens, grâce à des habits souples et des draps, font et refont le décor par leur corps : là un lit, ici un fauteuil, là-bas une porte, une muraille. Aïssa Chouat semble avoir bien travaillé l’expression corporelle des comédiens alors que le scénographe, Rezig Ben Nacib, s’est contenté du minimum avec une scène dépouillée, plongé parfois dans de la lumière rouge avec au fond un corps désarticulé paraissant figé dans un saut périlleux. Le bassin de ce corps a disparu comme pour suggérer que l’impuissance est le véritable «moteur» des tyrans, de tous ceux qui se prennent les rois de l’univers.
Production actuelle
Durant tout le spectacle, bien servi musicalement par Rafik Belaïdi, avec des touches bluesy, les huit comédiens n’ont pas quitté la scène, faisant preuve d’un dynamisme régulier pendant 70 minutes.
Au-delà de l’aspect comique, parfois burlesque, la pièce Iftiradh ma hadha failen permet plusieurs lectures sur la situation du monde d’aujourd’hui, sur la région arabe, sur les dégâts de la mondialisation… Mais aussi sur l’ordre militaire, sur l’aveuglement des gens du pouvoir et leurs supports, sur l’entêtement de ceux qui ne prévoient pas l’arrivée des tempêtes. A l’origine, Ali Abdelnabi Al Zaydi voulait évoquer, à sa manière, la situation dramatique de l’Irak durant la dictature de Saddam Hussein et après l’occupation occidentale.
Ali Abdelnabi Al Zaydi est un nom connu dans la scène théâtrale arabe. Il est célèbre par des pièces telles que Aoudatou al rajoul aladhi lam yaghib (Retour de l’homme qui ne s’est pas absenté) et Thamin ayam al ousbou (Le huitième jour de la semaine). Il a décroché plusieurs prix au Yémen, en Irak, aux Emirats arabes unis, au Koweit et en Egypte. «J’ai réfléchi pendant deux ans au texte de Al Zaydi. J’allais le monter à Batna, mais comme j’ai été désigné directeur au niveau de Oum El Bouaghi, j’ai donc décidé de le mettre en scène au niveau de ce théâtre. Avec un peu de sémiologie et de sémiotique, j’ai donné une dimension arabe au texte. Il s’agit d’un géant qui n’arrive pas à se lever. Le texte offrait beaucoup de souplesse, de portes et de possibilités à une mise en scène que je voulais», a expliqué Lotfi Ben Sbaa après le spectacle. Le metteur en scène a travaillé avec ses comédiens pour bien concevoir la pièce et élaborer l’expression scénique. «Cela nous a pris deux mois de travail soutenu.
Avant les événements du monde arabe, j’aurais peut être laissé la pièce dans le contexte irakien. Mais, là, avec l’évolution de la situation dans le monde arabe, la pièce a pris une autre dimension», a-t-il soutenu.
La formation est pour Lotfi Ben Sbaa une priorité. Des stages ont été organisés à Oum El Bouaghi sur les arts dramatiques pour animer la scène théâtrale de la ragion. «Nous allons organiser des stages sur la mise en scène, la scénographie et la critique théâtrale en collaboration avec l’université», a-t-il noté. La pièce Iftiradh ma hadha failen sera bientôt présentée à Bordj Ménaïel, Koléa et Bouira. .* Par Fayçal Métaoui *El watan-19.09.2012.
Pour plus d’informations sur le Théâtre régional d’Oum El Bouaghi
Tel: 032477198
Fax: 032476200
Site : www.troeb.com
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La pièce Nass Mechria présentée au TNA
le train, la lune et l’amour
La pièce Nass Mechria, de Lakhdari Mansouri et de Bouziane Benachour, se veut être un réquisitoire contre «une société qui n’aime pas»…
Aimer à n’en savoir que dire», écrivait le poète. Louis Aragon appréciait, plus que d’autres, la valeur de l’amour et l’amertume qui accompagne sa douceur. Nass Mechria, pièce présentée dimanche soir au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi (TNA), à la faveur du 7e Festival national du théâtre professionnel (FNTP), tente d’explorer les terres incertaines de l’amour à travers l’histoire de Medien et Mechria. Deux «M», comme pour souligner l’unité de deux êtres séparés par la bêtise, l’interdit, le manque de courage, le regard des autres… Medien (Mohamed Yabdri) et Mechria (Fatma Zohra Hasnaoui) s’étaient aimés par le passé, s’étaient fait des promesses et avaient goûté à tous les plaisirs des fruits mûrs.
Dans la chaleur insouciante de la jeunesse, ils n’avaient fait aucun calcul. Le seul horizon qui se présentait à eux était la passion amoureuse. Mais la vie a des joies insensées et, parfois, des tristesses cachées ! Sur scène, Mohamed Yabdri et Fatma Zohra Hasnaoui ont tenté de restituer le drame de l’histoire en forçant quelque peu le trait. Leur jeu était parfois trop classique, donc inévitablement ennuyeux. Ils ont bien compris la tourmente de leurs personnages, s’y sont adaptés, en oubliant d’être souples, d’être naturels. Khalida Khelfaoui et Karim Noureddine qui ont joué Mechria et Medien jeunes, n’ont pas déçu. Tout leur jeu était bâti sur la gestuelle et l’expression corporelle.
La scénographie de Abdallah Kebiri a pu traduire la philosophie de l’histoire construite autour du passé-présent, du rêve voulu et du vécu non désiré. Au milieu, une bande rouge ramène le spectateur aux douleurs, forcément sanguinolentes de la décennie de la violence et de la contre-violence, la décennie 1990. Période qui a déchiré la société algérienne, réduit en bouillie tant d’espoirs, tant de songes et produit des monstres. Sur scène, la lune, qui jette parfois une lumière poétique, est là pour suggérer que le rêve, comme la peur et la lâcheté, est humain, bien humain. Et le train, qui passe toujours dans la même direction, symbolise ce temps qui coule comme l’eau entre les roches, sans s’arrêter, vers les abîmes ou les hauteurs.
La musique mélancolique de Rachid Hamidèche souligne les traits d’une histoire crue. Histoire qui peut être mille fois réelle. Chaque jour révèle des récits bien plus surprenants. La vie n’est pas linéaire. N’est pas faite d’amour éternel ou de haine permanente. Produite par le Théâtre régional de Tizi Ouzou, et mise en scène par Lakhdar Mansouri, d’après un texte de Bouziane Benachour, Nass Mechria qui peut être traduit (Des gens vendus) en arabe) est à inscrire dans le registre du théâtre du réel. «Notre société sur beaucoup de choses reste bloquée.
A travers le drame anodin de Mechria et Medien, il y a une dénonciation d’une société hypocrite, une société qui ne reconnaît pas l’amour, une société qui n’aime pas, une société qui ne s’aime pas, une société qui n’aime pas les gens qui s’aiment, une société qui est jalouse, qui n’admet pas que les gens puissent vivre simplement leur amour…», nous a déclaré Bouziane Benachour, après la présentation de la pièce. Selon lui, le drame des individus a été «oublié» au profit des grands principes et grandes questions. «On s’est éloigné de ce qui fonde l’humain. Il me semble que le sujet de l’amour est peu abordé dans le théâtre algérien (…) Modestement, je m’intéresse aux gens de la marge. Medien et Mechria sont des marginaux. Il s’agit de gens modestes qui n’ont pas droit au chapitre.
C’est donc le théâtre des petites gens», a-t-il ajouté. Lakhdar Mansouri, qui dit connaître le langage dramaturgique de Bouziane Benachour, a avoué que le texte mis en scène est quelque peu difficile. «Un texte qui regorge de beaucoup d’actes et d’images, plein de poésie. J’ai essayé de donner à cette poésie un peu d’esthétique. Le thème est sensible. Nous l’avons vécu et on le vit toujours», a-t-il dit.
«La société algérienne n’est pas en sommeil, mais vit des cauchemars. C’est une société qui a raté beaucoup de rendez-vous historiques. Nous sommes passés par des déchirures. J’aime le théâtre qui a une relation avec la société. Je refuse de me détacher de ma société. J’ai introduit des symboles scéniques dans la pièce Nass Mechria sans surcharge», a souligné Lakhdar Mansouri. Cet enseignant des arts dramatiques à l’université d’Oran refuse l’encombrement des thèmes dans le théâtre. «Nous n’imposons pas le goût. Nous proposons une lecture. A chacun d’apprécier ou pas», a-t-il noté. Avec Bouziane Ben Achour, Lakhdar Mansouri a monté la pièce Mara, mara en 2002. En 1993, il a mis en scène, El hawat oua al qasr (Le pêcheur et le palais) d’après le roman de Tahar Ouettar.
«Je ne crois pas qu’il existe un thème censuré par le théâtre algérien. Mais l’autocensure existe. Il y a toujours des complexes. Cela dit, le théâtre algérien est toujours majeur. Il a des racines et une esthétique», a-t-il relevé. .* Par Fayçal Métaoui *El watan-18.09.2012.
*********La pièce« El Hasla » lance le 7 eme festival national du théâtre professionnel
*Le Festival national du théâtre professionnel se déroule jusqu’au 27 septembre au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi à Alger.
Faut-il croire à « la magie » du théâtre populaire ? Difficile de trouver réponse lorsque l’on voyait, samedi au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi à Alger, lors de première soirée du septième Festival national du Théâtre professionnel (FNTP), les comédiens de la pièce « El Hasla » tenter de nous convaincre de la fraîcheur d’une dramaturgie lourde.
La pièce du Théâtre régional d’Oran restitue une atmosphère presque déjà vue pour un sujet qui va frôler l’idéologie sans y mettre les mains. Le discours est là collant, la morale envahissante. Parfois, l’humour permet à quelque jets de lumière passer et au public, déjà partagé, de rire. Il y a certes de la légèreté, mais c’est un peu trop pour une comédie qui semblait ambitieuse au départ et qui, ensuite, s’est noyée dans un verre d’eau.
Mise en scène par Habib Medjahri, à partir d’un texte de Mahi Benaamara, la pièce déroule l’histoire d’un directeur (rôle campé par un Mohamed Haimour en mauvaise forme) d’une entreprise publique qui fait face à une colère des salariés. Le syndicaliste (Ahmed Elaouani) vient défier le directeur dans son bureau pour lui demander de renoncer au projet de privatisation de l’entreprise.
Le théâtre algérien s’est rarement intéressé à ce sujet pourtant pesant dans la récente histoire sociale du pays. Dans les années 1990, des centaines d’entreprises publiques ont été bradées au su et au vu de tout le monde, y compris de l’UGTA, syndicat complice. «C’est votre gestion tordue qui nous a mené à se contenter des moitiés », a crié le représentant des travailleurs. Le directeur monte alors un stratagème pour éviter la pression : s’enfermer dans les toilettes.
La secrétaire (Bahria Zaouche), entièrement acquise à la cause de son responsable hiérarchique, tente de le délivrer. Elle fait appel à un portier ( Blaha Benziane) à double-face et à des sapeurs-pompiers qui manquent de sérieux. L’Etat est-il toujours là pour « secourir » ses citoyens ? Ces dernières années, les algériens ont constaté l’ampleur de la faillite des services publics. La fin de la pièce est presque prévisible tant la linéarité de l’histoire se laisse deviner facilement.
« Ray likoum ! (On vous la laisse ! ) », lance par dépit le portier. Simpliste ? Pour Habib Medjahri, il n’y a aucune raison de parler de « burlesque » à propos de ce spectacle. « C’est une comédie à l’ancienne avec des outils modernes. C’est un peu un retour au théâtre populaire, celui qu’a connu Oran par le passé. Il y a de la satire, des non dits. Le sujet de la privatisation des entreprises n’est qu’un prétexte pour élaborer le spectacle et revenir sur les problèmes de la société », nous a expliqué le metteur en scène, après la présentation de la pièce.
Pièce montée, selon lui, en trois mois et présentée déjà une quarantaine de fois au niveau national. « El Hasla n’est pas une pièce destinée à l’élite, mais au grand public. Les dramaturges qui nous ont précédé, comme Kateb Yacine, écrivaient leurs pièces pour ce grand public. Les gens ne sont pas sortis de la salle. Quand, le spectateurs commencent à quitter leur sièges après un quart d’heure de représentation, il faut se poser des question », a encore soulignéHabib Medjahri.
A l’ouverture du 7ème FNTP, un montage poétique, « Boubchir », de Toufik Ouamane a été présenté. Des chorégraphies, de la poésie et un petit jeu d’acteurs. Cela ne suffit malheureusement pas pour faire un spectacle élaboré, vivace et actuel. L’art de scène algérien a besoin réellement d’air frais !
Un documentaire de Ali Aissaoui revenant sur le sixième FTNP a été projeté également. Il aurait peut être été plus intéressant de présenter un documentaire, même court, sur l’expérience théâtrale algérienne depuis l’indépendance du pays et même avant.
La comédienne et metteur en scène Sonia, présidente du Festival, a, lors de l’allocution d’ouverture, évoqué « le dialogue fructueux » entre les deux générations du quatrième art algérien. « Les deux travaillent pour assurer la relève. La nouvelle génération devra prendre en charge le répertoire de cinquante ans du théâtre et réfléchir aux cinquante prochaines années », a-t-elle dit. .* Par Fayçal Métaoui *El watan-16.09.2012.
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