La Casbah d’Alger
*La Kasbah d’Alger
**La Casbah d’Alger a été inscrite sur la Liste du patrimoine mondial à la 16e session du Comité, en décembre 1992.
Est communément appelée la zone comprenant la Casbah proprement dite (forteresse) et toute la vieille ville d’el- Djazaïr située entre ce fort et le bord de mer.
en 1516, le corsaire turc Khaïr al-Din installe sa
capitale à Alger. Il en fait une ville fortifiée en construisant d’imposants
remparts, qui sont à l’origine de la Casbah. Six portes assurent la liaison
entre la vieille ville, le port et le reste du pays. L’accroissement de la ville
se traduit par un développement des espaces bâtis, notamment de maisons à étage.
Même si, à l’époque, les Ottomans sont présent le long d’une grande partie du
littoral algérien, le pouvoir turc intervient peu dans les affaires locales
d’Alger. Le bey Khaïr al-Din fait prospérer la ville en combinant la force
militaire et le développement du commerce. La ville est prospère jusqu’au XVIIe
siècle. Dans la ville se conjuguent alors les traditions turques et arabes.
pour la sauvegarde de la vieille ville. Les premières études pour la sauvegarde
du site de la Casbah d’Alger sont conduites dans les années 70. Un plan
d’aménagement de la Casbah est mis en oeuvre à partir de 1981. Il porte en
particulier sur le bâti de la période 1816-1830 pour mettre en valeur la ville à
l’époque de l’influence ottomane, 1816 étant la date à laquelle le centre
politico-administratif fut transféré à la citadelle ; ce déplacement a entraîné
un nouveau flux de population vers la haute ville. Il a été notamment suivi d’un
plan d’action-programme prioritaire en 1985 et d’un plan directeur d’aménagement
et d’urbanisme en 1992. Le plan de restauration actuellement en cours correspond
parfaitement aux besoins de la vieille ville : il s’agit notamment de restaurer
et de réhabiliter le tissu historique. en plus de sa richesse artistique, la
vieille ville est un précieux témoin de l’histoire de l’Algérie.
La Casbah s’étend en effet sur 45 hectares et
témoigne d’une forme urbaine homogène dans un site original et accidenté (118
mètres de dénivellation). La richesse de la ville se traduit par les décorations
intérieures des habitations, souvent ordonnées autour d’une cour carrée centrale
faisant atrium. Les rues tortueuses et pentues constituent aussi un élément
caractéristique de la vieille ville. elle abrite également douze mosquées dont
la mosquée Djamâa el-Kébir du XIe siècle. La citadelle qui abritait plusieurs
palais résidentiels et édifices religieux o? siégeait le pouvoir algérien avant
1830 fait l’objet depuis 1985 d’un vaste plan de restauration. *source:Algeriantourism.com
La ville haute constitue l’amont de la Casbah, elle surplombe la baie d’Alger et abrite les quartiers résidentiels des classes moyennes : baldis (campagnards) et baranya (étrangers). Les maisons construites selon la m�me architecture se suivent et se succèdent sans discontinuité. Les quartiers comprennent leurs propres boutiques ce qui évite aux résidents de se rendre à la ville basse. Dans la ville haute, une multitude de quartiers s’entrem�lent et s’entrecroisent. Certains mènent aux bas quartiers (la ville basse) par des pentes lisses, d’autres par des escaliers aux marches larges et lisses.
consulter un site sur l’algérie ses traditions et ses coutumes: azititou.wordpress.com
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**Comme l’a dit Borgès, quand vous allez dans le parc zoologique ou quand enfant, vous y êtes allés pour la première fois, vous aviez reconnu la chouette, non pas parce que vous aviez déjà eu l’occasion de la découvrir en chair et en os mais parce que vos parents vous l’ont décrite ou l’ont dessinée sur le papier. Vous aviez reconnu l’animal et peut-être même c’est vous-même en vérité que vous avez reconnu.Je me suis baladé à la Casbah d’Alger, j’ai vite reconnu la cité que d’abord des toiles, gravures et photographies de l’époque coloniale m’avaient fait connaître. Un peu plus tard des films en noir et blanc et surtout « La Bataille d’Alger » de Gillo Pontecorvo. Des souvenirs d’enfance remontent. Ayant grandi en Oranie, la langue algéroise dont je commençais à noter les inclinaisons et les inflexions, lors de mes premiers séjours dans la capitale dans les années 70, me paraissait d’une délicatesse singulière.
C’est très tard que je m’engouffrerai dans les petites venelles, ayant découvert Alger d’abord par le biais de l’ancienne ville européenne où m’emmenait mon père attiré par la marchandise dont il devait s’approvisionner pour son commerce. J’erre dans la Casbah et je note combien la langue a changé. Je prête l’oreille, les petits enfants s’interpellent par «chriqui» littéralement «mon associé», qui supplante le vocable arabe algérien «Ya kho» (mon frère) alors que le mot berbère «ghawel» tombe en désuétude cédant la place au mot français «activer». La mutation n’est pas seulement lexicale, elle est syntaxique même. Je note ce barbarisme «tqoul gaâ ma tegzistich» (on dirait qu’elle n’existe pas).Même le groupe verbal est affecté. Comment expliquer cette résurgence de la langue française dans la langue algérienne dans un pays qui a des années durant mis au point une politique d’arabisation des plus draconienne ? Pour autant, les Tunisiens et les Marocains ne connaissent pas la même évolution. Un détail qui m’amène à considérer que l’une des raisons qui a dû engendrer cette situation tiendrait à la nature de l’occupation française ? Au risque de paraître jouer au puriste de la langue, je dirais que nombre de mots algérois se sont effrités, provoquant dans la langue tantôt des trous et des fissures et tantôt des excroissances monstrueuses.En référence aux icônes coloniales les femmes ont abandonné le haïk. L’écharpe blanche encore usitée à Tunis a disparu ici au profit du hidjab de rigueur. Quant aux hommes, ils ont délaissé le saroual et le couvre-chef. Evolution me diriez-vous, oui, mais est-ce qu’elle a été normale et naturelle ? Je scrute les douira, je songe à la Grande Maison de Dib et au film de Mustapha Badie. Avant que les maisons ne tombent en ruine, elles étaient tombées en désuétude. Les trous de la Casbah font écho aux trous de l’ancien centre européen. Conséquence des effondrements, l’ancienne ville «arabe» est maintenant parsemée de trous qui violentent la syntaxe architecturale. Des villas style modernes ou «européennes», mordent sur des bâtisses de l’époque ottomane, laissant voir leur grosse carcasse sous forme de monstrueuses excroissances. Les gens ont démoli des murs construits en terre pour y mettre du béton et des balcons pour s’aligner sur les normes de la ville «moderne».La Casbah menace ruine c’est sûr, mais le fait est d’autant plus étrange que les médinas marocaines et tunisiennes se sont bien conservées. Chez nous des voix s’élèvent pour dire qu’on est à Noisy-le-Grand. Ainsi le coeur palpitant d’Al Bahdja (la Radieuse) battrait ailleurs. La Casbah, mon Dieu ne serait que la banlieue. Etrange sort d’une cité qui était le coeur de la Méditerranée. (le Cap-n° 33)
**Lecture-passion. « El Qaçba, Zemân » de Kaddour m’hamsadji
* Au cœur de l’autrefois
Lorsque le sage Kaddour M’hamsadji m’avait fait la confidence qu’il comptait écrire un livre sur La Casbah et ses traditions, j’ai été pris d’une joie immense.
Enfin, quelqu’un – et pas des moindres – allait s’intéresser à cette cité tant criée et décriée, pour l’y pénétrer avec la raison et le cœur et non pas avec la passion stérile qui fausse le regard et sclérose la mémoire. Son expérience, sa large érudition et surtout ses recherches donnent à juger cette œuvre sur La Casbah. En plus de la genèse et de l’histoire du lieu, il nous livre les résultats de ses «fouilles» sur cette médina, ses origines, son urbanisme, ses traditions, coutumes et fêtes, autant de belles choses de l’esprit puisées de l’autrefois. C’est là une joyeuse et instructive promenade à travers 528 pages, véritable labyrinthe déchiffré pour la découverte de l’immense trésor que recèle La Casbah, parfois hermétique, et qu’il faut envisager aujourd’hui comme parcelle encore vivante d’un millénaire de traditions.
Dans les livres de Kaddour
M’hamsadji, on relève cette volonté de mêler la réalité et ses précisions au souffle évocateur. L’auteur, dans un travail de miroir, avec du recul, de la pudeur et la justesse des mots, dit tout ou presque dans cette somme où les tableaux se retiennent d’humilité sur la vie des gens. Les textes accrochent par la qualité d’écriture et par leur fond urbanistique, historique et sociologique. Ici, il s’agit de la mémoire d’une ville, La Casbah tant aimée, tant chantée et aussi tant pleurée lorsque les dégradations commencèrent à la mettre à bas, paraphée par des monticules de gravas, de soupirs et de souvenirs.
Dans le premier tome, l’auteur avertit qu’il tente de retrouver «Alger, autrefois» avec les yeux d’aujourd’hui, c’est-à-dire à partir d’une mémoire exhumée. Il confesse «qu’il se fie à ses souvenirs d’enfance et à des informations pieusement glanées auprès de quelques anciens Algérois (femmes et hommes) à la mémoire encore plus ou moins bellement conservée». Il ajoute : «C’est aussi au moyen de lectures dans des ouvrages rares, dispersés, souvent superficiels et toujours de hasard qui ont plus d’une fois avivé sa curiosité jusqu’à ce qu’il y trouve quelques bonnes idées à développer davantage».
Après les explications du système de transcription qu’il juge nécessaire d’inclure pour la compréhension, l’auteur remonte à la genèse de La Casbah, se posant la question de l’origine exacte de la cité «El-Djazaïr» et l’abordant par «l’île aux mouettes», avant d’entamer une balade historique embellie par le charme de la parole humaine.
Il nous rappelle Eikosim-Icosium. Il nous raconte les péripéties de Zîrî Ibn Menad et de son fils Bologgin qui fonda trois villes, «l’une sur le bord de la mer, appelée Djazaïr-béni-
Mezghanna ; l’autre sur la rive orientale de l’oued Chlef, appelée Miliana ; la troisième porte le nom de Médéa.» Il nous mène ensuite jusqu’à Sultân Djezâïr de la période ottomane que l’on peut traduire par «Alger, la Ville sultane», qualifiée de «l’une des plus belles villes de la Méditerranée des XVIe-XVIIIe siècles».
Mais la Casbah que l’on connaît aujourd’hui, nous apprend l’auteur, a été commencée en 1516 par Aroudj et achevée, en 1590, sous le pacha Khedar. Elle a remplacé en renommée la primitive Casbah berbère, «El-Qaçba el-Qadima». Et c’est à partir de La Casbah ottomane jusqu’à celle d’aujourd’hui que l’auteur analyse le site, depuis El Ouata (la plaine) jusqu’au Djebel (le mont). Il s’étend sur son évolution en nous restituant la vie urbaine, en nous décrivant la physionomie ancienne des rues et des places, allant jusqu’aux détails des boutiques, fontaines, édifices religieux, écoles, sites caractéristiques et, bien sûr, de la maison algéroise, modèle de raffinement dans la simplicité. C’est un agréable parcours historique qui nous est offert ainsi, une intrusion urbanistique en profondeur, des arrière-boutiques d’artisanat jusqu’à la vie sociale où surgissent parfois des noms de rues oubliés. Le livre renferme une cartographie instructive et des photos judicieusement choisies, dont plusieurs inédites ou prises par l’auteur, comme celle intitulée «Le boulet turc de 1853» de Nice, preuve qu’il s’est dépensé pour que son livre soit un témoignage aux pensées claires et non pas un palimpseste d’incantations.
Dans la partie ethnologique du deuxième tome – surtout celle relative au mariage, aux fêtes et pratiques sociales –, l’auteur ne nous fait pas la morale. Il tente plutôt de percer le secret de la formation morale. Il expérimente d’abord sur sa propre conscience cette analyse pénétrante, avant de la porter sur les autres, en nous entraînant dans un extraordinaire voyage au cœur des péripéties qui ont marqué la médina.Je me souviens du jour où lui rendant visite, je le trouvai très perturbé. Il était alors en pleine écriture du livre. En réponse à mes inquiétudes, il me répondit qu’il n’arrivait pas à régler un problème. Lequel ? Il s’agissait «seulement» du texte de la chanson Abqâw âlâ khir que chantait Fadila Dziria et qu’il ne trouvait pas ! Je me proposai de lui acheter un CD. Il refusa car la chanson contenue dans ce CD ou dans les anciens disques pouvait ne pas être l’original. Il voulait un texte certifié.
Pendant plusieurs mois, il s’est démené auprès des spécialistes et dans les archives de la télévision. Il rencontra Ahmed Serri et Abdelakader Chaou en ma présence. Personne n’était sûr de l’originalité du texte jusqu’au moment où, après de minutieuses requêtes auprès de vieilles dames algéroises, des informations recueillies chez Mohammed Réda Guechoud et un ouvrage de l’ethnographe Joseph Desparmet (1905), il parvint à reconstituer valablement le texte de la populaire chanson. En intellectuel honnête, soucieux de vérité, en artisan du bel ouvrage, Kaddour a sauvé ce texte et nous le restitue dans son originalité. Je vous en transcris une partie : «Abqâw âla khir, abqaw âlâ khir/ Hadha el-ferh dîma, Allah yançar mwâlin el-khima/ Abqâw âla khir, Abqaw âla khir/ Ya el-mouâlin el-hâra, antouma chorfa ou bentkoum nouara». (Restez dans le bonheur. Que cette joie demeure toujours. Que Dieu fasse triompher les hôtes de cette maison. Ô vous qui l’habitez, nobles vous êtes et fleur est votre fille).
Qui ne se souvient pas de cette chanson de fin de fête, du départ, de toujours ? Oui, un départ heureux de fin de fête, dès la nuit tombée où les femmes lancent leurs youyous en même temps que leurs salutations, allant et venant dans le «west-eddar», se bousculant, qui pour arranger son «haïk m’rama», qui pour chercher son enfant. Ces femmes ennuagées de parfums divers et dont les yeux cernés de khol à faire fondre le plus froid des dockers à la chemla d’antan, femmes suaves et frêles mais assurées sur des chaussures noires gardées pour les belles occasions, femmes d’Alger, mais aussi de Constantine, de Tlemcen, de Béjaïa ou d’ailleurs, femmes de chez nous…
Non ! Ce n’est pas de la nostalgie. Ce sont là nos traditions, les unes éparses et d’autres enfilées comme un collier de perles, sûres et durables. Et ce qui fait le collier, ce ne sont pas les perles mais le fil qui les retient, c’est-à-dire la solidarité qui unissait les femmes. C’était l’époque où les Algériens savaient partager la misère, l’époque où l’on se soutenait dans la peine. C’était l’époque des fêtes organisées dans une cour ou dans des chambres aux matelas posés par terre et qui permettaient à la chaleur humaine et aux esprits de se transmettre par capillarité. Le bonheur d’être simple et de ne pas trop dépenser. Le plaisir des yeux à regarder des tentures bigarrées ou un sandouk, coffre à fleurs multicolores. Le plaisir aussi de goûter le café à l’eau de fleurs d’oranger, accompagné de gâteaux à base de semoule, de pâte de dattes, d’amandes et de miel. Cela suffisait pour délecter les palais quand, de nos jours, on s’empiffre de pâtisseries spongieuses dans le tohu-bohu de salons d’hôtel sans chaleur ou des garages aménagés hideusement comme des paraphes d’insultes.
Mais quittons la fête et avançons dans ce deuxième tome consacré à la vie sociale. Kaddour M’hamsadji convie le lecteur à apprécier l’art de vivre de la société citadine algéroise, jalouse de ses racines et de ses liens ancestraux et il en parle humblement en gardant le regard sur l’avenir. Dans la Qaçba zemâne, la vie n’était pas un amusement mais un langage sérieux. L’énergie narrative de l’auteur, accompagnée d’un rythme mélancolique ample, la restitue pleinement. Tout de joie et de bonheur, les textes attirent par leur accessibilité, la subtilité de leurs thèmes mais surtout par leur esprit. Ainsi, ce passage : «Avec un peu de saine naïveté et un brin de bon sens populaire, on peut comprendre que toute mémoire est mémoire ingénieuse ; en quelque sorte, elle est technicienne, elle fabrique la tradition de la tradition : un passé, repassé dans le présent qui reproduit le passé pour le futur qui déjà l’accueille.»
Et c’est ainsi que l’auteur passe de l’histoire aux coutumes en nous expliquant l’art de la tradition multiple, spécifiant ce que véhicule la parole et ce qu’exprime le geste dans leurs signifiants. Il nous amène à considérer que ce qui fait La Casbah ne réside pas seulement dans les maisons, les ruelles ou les palais, mais aussi et surtout dans l’humain. Et c’est bien dans les êtres que se construit la civilisation et que se fabrique le langage. L’auteur s’attache alors à définir les mots parmi les plus usités du parler algérois ancien, en les inscrivant dans les faits et les traits généraux de la vie d’autrefois. «Le mot, affirme-t-il, est alors saisi dans la situation même de la pensée et de la volonté du citadin de La Casbah ; pour beaucoup, il réveille des images peut-être oubliées ; pour beaucoup d’autres, il rend à la parole son charme imprévisible, si particulier et sa valeur subjective si singulière. Le mot permet alors au langage d’exprimer tout l’espace intime de La Casbah.»
Le lecteur est invité ensuite à flirter avec le «hadri» et le «barrani» dans des opinions telles que «yatakalmou bit-taçghir» ou encore «yaqadjmou bit-chkikoûni». Ainsi, une adolescente est dite une «‘aouitqa», un adolescent «‘aouizeb». Et c’est de la sorte que l’auteur nous restitue les mots et expressions du «kalam zemân», de ce vocabulaire citadin ancien, guirlande de recoupements instructifs, instantanés d’antan exprimés par des personnages incarnés en des dialogues réalistes issus de la vie d’hier, et qui se poursuivent parfois dans celle d’aujourd’hui. On pénètre ensuite dans la vie de Si Hamdane, on sera convié à «la fête aux mille vertus» et, dans le détail, on assistera, par l’esprit, à la fête d’un mariage, aux noces, à la nuit de noces et aux lendemains de la nuit de noces.
Cette œuvre de Kaddour M’hamsadji ne méritait pas de passer inaperçue. Elle devrait figurer dans toutes les bibliothèques ainsi que dans les écoles. C’est un jardin de fleurs créé sur le champ de notre culture. Et si les roses exigent d’être entretenues pour l’agrément, ces deux livres devraient agrémenter et votre esprit et votre bibliothèque.
El Qaçba, zemân de Kaddour M’hamsadji. Tome I : «Histoire, De l’île aux mouettes à La Casbah». 253 p. (2007). Tome II : «Traditions, le mariage». 275 p. (2009). Ed. OPU. Alger.
Kaddour M’Hamsadji
Né en 1933 à Sour El Ghozlane, il a fait le lycée de Boufarik où il eut Mostefa Lacheraf comme professeur, avant d’aller étudier à Alger. Ecrivain en langues française et arabe, il est l’auteur de romans, de nouvelles, d’essais, de pièces de théâtre, de poèmes. Il est aussi chroniqueur littéraire dans la presse, auteur de scénarios de films et producteur d’émissions radio (on se souvient du «Jeu de la Bouqala»).
Sa première œuvre, La Dévoilée parue en 1959 avec une préface d’Emmanuel Roblès. Il était très lié à Mouloud Mammeri et lorsque celui-ci fut élu président de la première Union des écrivains algériens, en 1963, il en fut le secrétaire général adjoint, aux côtés de Jean Sénac, secrétaire général. Il a fréquenté également Tewfik El Madani, Kateb Yacine, Moufdi Zakaria, Makek Haddad, Ahmed Azzegah… Il est l’auteur d’une vingtaine de publications diverses dont Le Silence des cendres (Ed. Subervie, Paris, 1963), porté au petit écran par Youcef Sahraoui en 1976, ainsi qu’une autobiographie, Le Petit café de mon père (OPU, 2011). (El Watan-19.03.2011.)
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****La Casbah d’Alger… Quel avenir ?
Les Casbahdjis, assistent impuissants et dépités au dépérissement de leur cité «Elle va s’effriter lentement et sûrement, il ne reste plus des hommes dans ce pays», tonne Ali H. artisan dinandier depuis 1958. Il est l’un des derniers représentants de sa corporation. Et pourtant la vieille cité est un gouffre d’argent. En 1999, la wilaya d’Alger a reçu 100 millions de dinars à l’effet de restaurer la médina. En 2001, c’est au tour de la Cellule fonctionnelle de réhabilitation, de sauvegarde et de gestion urbaine de La Casbah d’Alger, qui venait d’être créée de recevoir un budget de 100 milliards de dinars. Il s’est agi alors de rendre effectif un plan de sauvetage mis au point en concertation avec le monde associatif, le ministère des Finances et la chefferie du Gouvernement.
En février 2008, la direction de la culture de la wilaya d’Alger lance un autre plan dénommé «Plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur de la Casbah d’Alger». Ce plan a découpé le site en 17 îlots comprenant chacun 20 à 30 bâtisses. Chaque îlot est pris en charge par un bureau d’études. On a ainsi recensé 1816 bâtisses et la wilaya d’Alger a débloqué 10 millions de dinars pour l’étude de faisabilité. Quant au ministère de la Culture, il a consenti 30 millions de dinars au titre de l’étude du suivi et travaux d’urgence.
Mêmes tracasseries depuis dix ans
Après plus d’une année du lancement du plan de sauvegarde, la Casbah donne l’impression de végéter dans les mêmes tracasseries. Lisez les comptes-rendus de presse d’il y a dix, vingt ans, et vous allez voir qu’ils décrivent la situation qui y prévaut actuellement. À voir ces étaiements qui tiennent les murs pour les empêcher de chuter, cela donne le frisson plutôt qu’une sensation de quiétude. Vous êtes toujours à l’affût, assaillis par ce sentiment que vous risquez de recevoir quelque chose sur la tête. Même si à cette frayeur sourde se mêle l’ébahissement que procure la vue d’un art raffiné entrevu à travers l’entrelacs des devantures étagées sur des venelles en pente douce. Un ébahissement du reste fugace car vite dissipé par le sentiment que tout cela est voué à la mort. Les détritus s’amoncellent partout. Les lézardes courent les murs, les bâtiments éventrés attendent qu’on vienne les raser. Abdelkader Ammour, président de la Fondation Casbah, l’air fatigué, s’est retrouvé à 72 ans à la tête d’une association complètement dépourvue de moyens. Créée en 1991, la Fondation, a obtenu un siège à Bab Djedid, dans une bâtisse qu’elle partage avec 3 autres organisations associatives dont l’Association pour la préservation des cimetières de la wilaya d’Alger. «Il y a absence de l’Etat, c’est la jungle, ça effiloche, on est touché par cette usure, on ne peut lutter contre les moulins à vent», lâche le président de cette fondation. Ce natif de la Casbah a fait partie de la Zone autonome d’Alger à l’époque de la Guerre d’indépendance. Au lendemain du départ des Français, il a cofondé avec Mohamed Boudiaf -avant d’aller enseigner la sociologie à l’université en France - le PRS (Parti de la révolution socialiste) qui est l’un, si ce n’est le premier parti d’opposition en Algérie.
La mal-aimée
Il en est des villes comme des femmes a dit le poète. C’est une métaphore du même ordre qu’a choisi Abdelhamid Boudaoud, le président du Collège national des Experts- architectes (CNEA) pour résumer la situation de la Casbah qui pour rappel a été inscrite, en 1992, sur la liste du patrimoine mondial. La belle dame dit-il n’a pas trouvé son prince charmant. «L’arsenal juridique existe ajoute-t-il mais il n’y a pas d’hommes forts capables d’en user».
En 1978, Abdelhamid Boudaoud avait déposé auprès des services compétents un rapport qui contenait, selon lui, des propositions pour amorcer un véritable plan de sauvetage de la ville. Il y préconisait notamment, le recensement et l’identification des propriétaires. «Sans ce recensement, on ne peut évaluer avec exactitude l’enveloppe financière nécessaire au travail de restauration», explique-t-il.
Or, ce recensement n’a jamais été fait. Ce que confirme Abdelkader Ammour qui déplore le fait de «n’avoir pas pu identifier ces fameux propriétaires». La fondation poursuit-il avait tenté d’aider ces derniers à s’organiser en association, mais cela n’a pas marché. «La médina se lamente-t-il est devenue un centre de transit, les gens vendent et louent leur appartement à tout va, on ne sait plus qui est propriétaire et qui ne l’est pas».
D’après Abdelhamid Boudaoud, ce fait a été consigné dans le rapport qu’il avait rédigé quelques années plutôt. Le temps est passé et chaque année, l’on enregistrait 3 à 4 écroulements de bâtisses. Un climat délétère s’est entre-temps installé. «Les propriétaires des maisons et les pouvoirs publics ont commencé alors à s’échanger les accusations, les premiers reprochant aux seconds de les avoir abandonnés à leur sort et les seconds reprochant aux premiers de s’adonner à la destruction de leur propre appartement dans le but de bénéficier d’un logement social dans l’une des nouvelles zones d’habitation de la banlieue algéroise». «C’est pour mettre fin à ce jeu de ping-pong que je soulignais dans mon rapport de 1998, précise le président du CNEA, la nécessité d’engager après la phase du recensement le dialogue avec les propriétaires». «J’y proposais, ajoute Boudaoud, de laisser la latitude au citoyen de choisir entre la possibilité de restaurer de son propre chef sa maison et ce, avec le concours financier de l’Etat, ou de remettre les clés à celui-ci, si le concerné ne se sent pas en mesure ou ne désire pas y habiter, l’Etat se chargeant de le reloger ailleurs». Pour le professeur Djaâffar Lesbet (voir entretien) l’inscription de la médina sur la liste du patrimoine universel est «prématurée», il avait exprimé cette idée dans une lettre ouverte publiée en 1993 dans laquelle déjà il déclarait que «le meilleur classement pour la Casbah est, qu’un jour, elle soit classée dans le coeur de tous les Algériens comme patrimoine avec une volonté réelle de participer à sa sauvegarde». Abdelhamid Boudaoud tire la sonnette d’alarme : «Si ça continue comme ça, martèle-t-il, dans 10, 15 ans, la Casbah disparaîtra à jamais». D’ailleurs, notre interlocuteur n’a pas caché sa crainte de voir «les instances internationales retirer le classement à la vieille ville».
Menaces sur Al Mahroussa
Quoi qu’il en soit, «Al Mahroussa» (La Bien Gardée) ne s’est jamais autant sentie menacée qu’aujourd’hui. Abdelkader Ammour avait soumis aux pouvoirs publics l’idée de créer un Haut-commissariat qui sera confié l’administration de la Casbah mais sa proposition n’a reçu aucun écho. «L’administration est complètement absente, les transactions de maisons continuent à se faire dans l’ombre et on arrache la céramique et les colonnes pour les vendre au marché noir», se désole-t-il. Rencontré non loin de la mosquée Sidi Ramdane, S.D. 51 ans, qui évoquait pour nous les métiers disparus comme «Al Guerrab», le distributeur d’eau fraîche ou de thé, n’a pas manqué de nous signaler l’existence de réseaux de drogue et de prostitution rendus possibles par la mobilité de la population. S.D tente une explication : «Depuis quelques années la Casbah accueille des gens qui viennent d’autres régions que celles d’où elles avaient l’habitude de venir.
La médina n’est plus habitée par les siens. Ils cassent leur maison pour s’inscrire sur la liste des futurs bénéficiaires de logements neufs, il y en a même qui après avoir atteint leur objectif, reviennent pour réoccuper leur ancienne demeure, tout ceci analyse-t-il ne pouvait arriver sans des complicités au niveau de l’APC.» Abdelkader Ammour a eu des mots durs à l’égard du commissariat du coin qui selon lui «n’en n’est plus un».
Un projet de sauvetage loin de faire l’unanimité
Ainsi de fil en aiguille, on est acculé dans un monde kafkaïen, d’un côté, on dresse l’échafaudage pour construire et remettre en l’état et de l’autre, les bâtisses tombent en ruine. On dirait qu’une grammaire architecturale par neutralisation est en train de s’installer. «La restauration avance à un rythme très long», juge le président de la Fondation. Même les spécialistes n’arrivent pas à saisir la logique de la démarche.
Larbi Icheboudene, professeur à la Faculté des sciences humaines et sociales d’Alger, professeur associé à l’Ecole d’Architecture (EPAU) et directeur de recherche au CREAD avoue tout «ignorer des suites attendues quant à ce projet et à ses effets». Le bilan du plan de sauvetage estime-t-il n’est possible «qu’avec celui de chacun des acteurs de la sauvegarde de ce patrimoine architectural et urbain». Ce professeur qui est aussi auteur d’un livre remarquable : «Alger, histoire d’une capitale» édité en 1998 puis réédité en 2008, soulève la question de «l’existence d’une volonté politique dont les décisions donneraient les cadres juridiques et l’organisation, voire la production, de structures opérationnelles avec les moyens et les niveaux de responsabilités de pouvoirs de décision». En filigrane, les structures actuelles chargées de redonner sa santé à la Casbah sont sujettes à caution. Cela dit, nos tentatives d’entrer en contact avec la direction de la Culture de la wilaya d’Alger pour recueillir l’opinion de son responsable n’ont pas abouti. Mais un article, publié le 1er mai 2009 sur le blog internet de l’Association algérienne pour la sauvegarde et la promotion du patrimoine archéologique (AASPPA), impute le retard des travaux «aux lenteurs administratives lesquelles, poursuit le document, font qu’à ce jour, les bureaux d’étude et les entrepreneurs chargés de la restauration n’ont toujours pas été payés». «Le diagnostic ayant été établi en 2007, le stade de l’urgence est-il noté devrait être maintenant dépassé et accuse un net retard par rapport aux premières prévisions». L’AASPPA va même jusqu’à mettre en doute la compétence du CNRU (Centre national d’étude et de recherches urbanistiques), lequel se serait trompé dans l’opération relative au diagnostic de la vulnérabilité des bâtisses. Ce centre aurait affecté des croix rouges à des maisons qui devraient être cochées au vert et vice-versa.
On aurait ainsi réhabilité des maisons gravement endommagées alors que celles classées en bon état ont fini par s’effondrer. Les experts de l’UNESCO qui s’étaient rendus en automne 2008 sur le site avaient déploré la dissolution (en juillet 2008) du comité technique qui chapeautait la réalisation de la phase d’urgence soutient l’AASPPA. Ce comité permettait un fonctionnement normal et assurait une coordination optimale entre les différents services.
Le même blog croit détenir une bonne nouvelle en annonçant le doublement de la part du budget initial qui est de 30 millions de dinars. «Il faut dire, ajoute le rédacteur, que la première tranche a été dépensée ou du moins a déjà été engagée. Cette rallonge tend à confirmer la mauvaise estimation, ou du moins les tâtonnements, de départ». Les historiens, les archéologues et les urbanistes, précise AASPPA n’ont pas été associés à la seconde phase, laquelle comprend l’étude typologique et historique.
Larbi Icheboudene conseille de ne pas «se laisser piéger par le discours « critique » du climat ambiant». A ses yeux la Casbah devrait être «sauvée par l’Etat et par les siens». Il voit dans cette forme de «la participation des acteurs» quelque chose qui reflète «le niveau supérieur de collaboration pour une sauvegarde et une promotion».
Une petite expo en pleine Casbah
Si le tableau est sombre, une petite lueur d’espoir si ce n’est une exception qui confirme la règle. Le cas parait si isolé, si insulaire qu’il passe pour être une anomalie idéologique. Rue Saïd Ayadi, Une douira avec patio abrite une exposition de tableaux en cuivre repoussé de l’artiste Snoussi Nacer. Nous ne rêvons pas. La maison a été mise à la disposition de l’association «Ouled al Houma» par un particulier. (Le Cap-n°33)
**Entretien avec le professeur Djaâffar Lesbet
«La vieille cité souffre de la rançon-logement»
Natif de la Casbah d’Alger, Djaâffar Lesbet, 66 ans, est sociologue-urbaniste-architecte. Cet enseignant à la Sorbonne, est aussi consultant auprès de plusieurs organismes internationaux dont l’UNESCO et le CNERIB en Algérie (ministère de l’Habitat), Lesbet a publié plusieurs articles dans des revues étrangères ainsi que de nombreux ouvrages dont l’un d’eux porte sur notre médina: «La Casbah d’Alger : Gestion Urbaine et Vide Social», publié en 1985 par l’OPU (Alger) en coédition avec le CNRS (France). L’homme ne mâche pas ses mots. Il fait ici le point sur la médina qui l’a vu naître en laissant parler le coeur du petit Casbahdji qu’il fut et la raison du scientifique qu’il est devenu.
Le Cap : Quel bilan tirez-vous des différents programmes de sauvetage de la Casbah ?
— Djaâffar Lesbet : C’est là une question à laquelle il aurait été aisé de répondre, si les informations relatives à ce sujet ne relevaient pas du secret-défense.
Actuellement, un plan gouvernemental de sauvegarde de la casbah est en phase d’exécution, qu’en pensez-vous ?
— Effectivement, mais comment suivre l’évolution d’un programme dont l’avancement n’a, à ma connaissance, fait l’objet d’aucune communication ? Les informations obtenues par la bande, font état d’études et d’interventions ponctuelles, ne prenant pas en compte l’état des sous-sols, dont les investigations techniques ne peuvent être entreprises sans l’aval et l’adhésion des propriétaires. A cela, s’ajoute l’absence et/ou la difficile application des textes juridiques. Sans parler du manque d’architectes, d’ingénieurs et d’entreprises spécialisées. Cet ensemble d’aléas est majoré par le crucial manque de coordination entre les différents secteurs et les diverses administrations. A ce jour on peut dire que : La 1ère phase d’études a été terminée en mai 2007.
Les travaux d’étaiement et de confortement sont en cours depuis janvier 2008 et sont à 80% achevés. La 2e phase (données historiques, analyse de la situation sociale, économique, typologie, état du cadre bâti, géotechnique, VRD, environnement, mobilité, transport, etc.) a été achevée en février 2009. Reste à respecter et à appliquer la suite du traitement, sinon c’est l’éternel recommencement.
l Pourquoi les projets n’ont pas abouti ?
— Pour répondre à cette question, il faudrait que les chercheurs aient accès aux rapports et aux bilans des projets en cours ou ceux réalisés. Le ministère de la Culture, chargé des programmes de sauvegarde, ne diffuse aucune information à ce sujet, hormis les nouvelles lois et dispositions théoriques régulièrement annoncées par voie de presse et qui restent la plupart du temps sans suite concrète et efficiente, hormis les actions conçues en urgence et exécutées dans la précipitation.
l Combien, d’après vous, reste-t-il de bâtisses et quel est le nombre des habitants ? Comment les choses ont évolué depuis 1962 ?
— Le nombre de bâtisses et l’évolution de la population varient et se contredisent d’un recensement à l’autre. Les chiffres récoltés (phase I. Edition finale du PSMV Décembre 2000), indiquent que la population de la Casbah est passée de 48 311 habitants en 1987, à 39 339 en 1998. Le recensement, suite à l’enquête menée en 2005, évalue la population à 37 000 habitants. Elle est en baisse constante. Cette dernière enquête évalue le nombre de bâtisses à 1 523 (982 maisons et 541 immeubles). Or parmi elles 1 415 sont habitées, 261 en cours de réhabilitation, (prises en charge dans le cadre du séisme du 21/05/2003 et 108 sont évacuées et murées. Selon les dernières données (PSMV en cours 2009), la Casbah totalise 1816 bâtisses (maisons algéroises et immeubles de la période coloniale confondue), dont 273 en ruine. Officieusement, la population est évaluée, approximativement, à 48 et 50 000 et officiellement, à 43 000 habitants environ, en 2009. Ainsi, le nombre de bâtisses et la population résidente auraient augmenté entre 2005 et 2009 !!! Passant respectivement de 1523 à 1816 bâtisses et de 37 000 à 43 000 habitants !!!
La surdensification est régulièrement avancée comme étant l’une des causes majeures de la dégradation. Cette allégation ne résiste pas à un retour sur le passé proche. En effet durant la «Bataille d’Alger», années 57-62, la Casbah a abrité près de 100 000 personnes, sans que cela ne se traduise par des démolitions en chaîne.
l Est-il possible de bâtir de nouvelles casbahs ?
— Oui, mais ce ne sera plus la Casbah. Par contre, à court terme il est possible de sauver ce qui reste et à long terme, fort des expériences acquises, envisager la reconstruction des parcelles vides de la Casbah.
Quels sont les scénarios possibles : la Casbah sauvée? Perdue? Que peut-on espérer d’une Casbah réhabilitée ?
— A défaut d’une finalité clairement définie et acceptée par toutes les instances, nationales et internationales, responsables à titre divers, de sa sauvegarde (restauration, réhabilitation ou rénovation, selon le cas de figure et en fonction de la finalité de chaque élément architectural qui forme la Casbah), nous sommes réduits à formuler trois hypothèses et à envisager les implications de chacune :
Premièrement, sauvegarder la Casbah en maintenant sur place la population résidente actuellement. Deuxièmement, faire de la Casbah un centre touristique. Troisièmement, restaurer la Casbah pour accueillir une population nouvelle (profil à déterminer dans le cadre d’une commission ad hoc).
La première hypothèse peut être retenue, si l’on souhaite voir disparaître (dans les prochaines décennies) à moyen terme ce qui reste de la Casbah, car on peut affirmer sans risque d’erreur, que la population résidente actuellement est dans sa majorité en attente d’un relogement et que cette finalité est conditionnée par la démolition accidentelle et/ou volontaire des lieux d’habitation.
La seconde hypothèse serait de faire un centre touristique. On peut difficilement imaginer l’ensemble de la Casbah peuplée d’artisans, corporation déjà en voie d’extinction, avec des rues parcourues par une horde plus qu’hypothétique de touristes se promenant dans une ville fantôme. La troisième hypothèse nécessite diverses mesures au préalable et s’inspire des textes d’applications de la loi 98-04 du 15 juin 1998. Stopper définitivement l’hémorragie qui vide la Casbah de son patrimoine par le truchement des attributions de logements. Substituer à ce mode d’intervention, néfaste pour la Casbah et dangereux politiquement, un programme d’auto-construction-formation sur le tas, sachant que la construction d’un logement nécessite 60% de matériaux et 40% de main-d’oeuvre. Or, toutes les familles, ne disposant pas des ressources suffisantes, disposent d’un budget temps à investir dans leur futur logement. Cela permet également de mettre fin à l’inacceptable discrimination en vigueur; qui consiste à aider et à ne se préoccuper que des Algériens vivant dans l’insalubrité dans la Casbah tout en ignorant les autres, tous ceux qui vivent dans des conditions encore plus dramatiques (caves, bidonvilles, logements de fortune sur les terrasses ou carrément dans les rues, etc.). Il faut une fois pour toute mettre définitivement un terme à la prise en otage de notre patrimoine, contre l’attribution (paiement) d’une rançon-logement. La mise en oeuvre de cette troisième hypothèse, implique une transparence effective, l’émergence de l’Etat de droit, en échange, elle permet une réoccupation- recomposition, la reconstruction des parcelles vides et la sauvegarde de ce qui reste de la Casbah sans financement public, l’exploitation des parcelles libres suffit amplement.(Le Cap-n°33)
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Casbah antique: Ode d’amour pour Alger
Le haïk, patrimoine d’une symbolique mémorielle et expressive de résistance culturelle, fièrement porté par E’la Ouerdia, dans la «baraka» de ses 100 ans.
De la cîme de son siècle vécu, dont la famille a célébré l’anniversaire, superbe dans son séculaire haïk «m’rama» qu’elle a revêtu en l’heureuse circonstance, E’la Ouerdia Hamadou Amrouni nous révèle, avec amour, El Bahdja et sa cité antique El Mahroussa, «La protégée» de sa tendre enfance. Elle est toute contente de nous recevoir à son domicile pour nous conter l’histoire et la légende d’El Djezaïr qui l’a vu naître, selon son expression «un mardi 1er octobre 1912 à 10h du matin, à la rue du Chameau», dans la haute Casbah. Ironie burlesque de dérision d’une faune animale de la stratégie toponymique colonialiste pratiquée à dessein d’un processus de démantèlement culturel.
La Casbah : un creuset de citadinité et de pluralité culturelle
Elle a vécu dans la cité antique de sa naissance jusqu’à l’âge de 16 ans, quand ses parents déménagèrent pour habiter Bab El Oued et ensuite Notre Dame d’Afrique durant les années 1930. De tous ses souvenirs étonnamment vivaces et d’une mémoire phénoménalement infaillible émergent en elle des images éclatantes de sa Casbah altière, chaleureusement humaine, solidairement unie dans la cohabitation d’une mosaïque de convivialité peuplée d’une trame de communautés de toutes les régions de l’Algérie profonde.
De la proche Kabylie à Jijel, de Constantine à Sétif, de Annaba à Biskra, d’Oran à Ghardaïa, El Mahroussa, fidèle à sa vocation civilisationnelle et historique, a accueilli et bercé en son sein l’ensemble de ses enfants. Une richesse inouïe d’une pluralité culturelle qui, dans son raffinement citadin a constitué un creuset harmonieux d’épanouissement et de résistance culturelle de la personnalité algérienne, dans l’authenticité sociologique de ses éléments constitutifs et structurants. Elle se souvient de la splendeur des douérate majestueuses avec leurs colonnes ornées de sculptures d’art, des terrasses qui surplombent la plus belle baie du monde, univers des femmes pour les causeries quotidiennes et le café rituel préparé avec dextrité et le raffinement de la tradition algéroise.
La bouquala qu’elle affectionnait tant, lui rappelle, à ce jour, l’extase des rimes et des envolées poétiques qui subjuguaient un auditoire féminin envoûté par des déclamations dans le ravissement de la méditation. Le blanc immaculé de chaux des maisons éclairait harmonieusement les soubassements des murs violacés de nila, dans la féérie des magnifiques fontaines essaimées alentour et les senteurs aromatiques de jasmin, nesri, fel, menthe et basilic (h’bek) embaumaient dans la douceur l’enceinte de la vieille cité.
Les rues, ruelles venelles de la cité antique étaient d’une propreté attrayante, ses habitants y veillaient de par leur comportement et leur civisme dans un élan naturel, éducationnel et collectif de solidarité, d’amour et de respect des lieux évocateurs, chargés d’un patrimoine commun d’histoire, de mémoire et de culture.
Alger la blanche dans la légende du souvenir
Dans un long soupir, elle martèlera qu’Alger de son enfance et de sa jeunesse était un havre édénique, qui émerveillait les foules de visiteurs venus nombreux du monde entier admirer ses splendeurs. Ses fastueux boulevards, ses jardins publics luxuriants de renommée mondiale, ses immeubles imposants d’architecture d’art, ses musées, ses édifices étaient une source inaltérable d’inspiration pour les artistes qui ont immortalisé, dans leurs œuvres de renom, la fascinante beauté. Que de poèmes, de chansons, de mélodies de qacidate dédiés au charme enchanteur de cette ville de rêve, inondée d’un soleil sonore qui baigne dans le bleu turquois aux reflets argentés de la Méditerranée, mer de lumière et mère d’amour.
Elle nous conta aussi les valeurs humaines de la société incarnées par le respect, la courtoisie, la solidarité, le civisme et enfin la tendresse voués à des lieux de mémoire qui ont vu naître des générations entières affectivement attachées à leur ville. E’la Ouerdia, la centenaire, s’exprime dans la langue parlée d’Alger très riche, dans la symbolique et la métaphore qu’elle reprend avec aisance à travers la syntaxe linguistique française dans un style oratoire de talent.
Une volonté tenace pour le savoir et la connaissance
Jusqu’à une date récente où elle a été atteinte d’une déficience d’acuité visuelle, elle lisait couramment en cette langue sans jamais avoir été scolarisée ou avoir mis les pieds dans une école. Une véritable leçon de volonté humaine, d’abnégation et de performance dues à une ténacité obsessionnelle pour découvrir l’univers du savoir et de la connaissance. Ecoutons-la à ce propos dans une de ses plaisanteries dont elle est friande.
«Je ne me suis jamais assise à une table d’écolier, mais j’ai été une enseignante persévérante pour avoir contribué à l’éducation d’un élève studieux devenu plus tard un universitaire, qui a achevé ses études supérieures en France et aux Etats-Unis d’Amérique il y a de cela 40 ans. Lui, n’est personne d’autre que mon fils Rachid qui est là devant vous.» Dans un sourire attendrissant à l’adresse de sa mère, ce dernier l’a ainsi confirmé : «Oui, maman ! C’est bien vrai. Merci à l’éternité pour ce que je n’oublierai point et que j’ai avec gratitude révélé à mes enfants.»
L’art de vivre, l’euphorie de ses 100 printemps
La vie de E’lla Ouerdia s’écoule paisiblement dans son modeste appartement impeccablement entretenu et décoré avec goût de reliques et de portraits photographiques de famille à travers le cycle des âges et du temps. Un art de vivre dans sa perfection : ménage, cuisine, culture avec le relais de la télévision et de la radio ; le tout dans la plénitude d’une existence où les jours sereins ne cèdent aucun espace à l’ennui. Le meilleur moment attendu est celui de la visite que lui rend quotidiennement son fils Rachid, qu’elle rassasie souvent de plats traditionnels, de délices cuisinés par ses soins et dont il raffole à l’évocation des souvenirs d’antan. Elle a aussi un penchant de tendresse pour son cadet, Saïd, «le maâzouz» qui est venu au monde dans la symbolique commémorative de Novembre de l’année 1962, en citoyen libre dans une Algérie indépendante.
Dans une exclamation chaleureusement affective, E’la Ouerdia épanouie dans la quiétude de l’âme nous égaya par un élan d’optimisme et d’espoir en ces termes : «J’ai pleinement vécu un siècle traversé de convulsions et de tragédies, dont la plus cruelle fut celle de colonisation. Notre peuple a relevé le défi et s’est sacrifié pour la libération de notre chère patrie.»
Décembre incarné par la pensée du souvenir
Ce mois de décembre ranime en elle les souvenirs des glorieuses manifestations du 11 Décembre 1960, dont les images sont ancrées dans sa mémoire. «Je ne peux oublier ces journées bénies où j’ai vu le peuple algérien faire une démonstration de courage et de foi pour arracher l’indépendance de son pays. Cette flamme patriotique doit être perpétuée à jamais pour nos enfants dans une fidélité de pensée aux sacrifices de leurs aînés et de leurs aïeux.» Et elle ajoute avec solennité : «Au soir de ma vie, mon souhait ardent est en direction de ma descendance, la jeunesse qui doit pérenniser les repères mémoriels et les valeurs de notre société.»
Un message très fort par la voix sage d’une maman attachée aux repères d’un riche passé qui dans la «baraka» de ses 100 ans n’a, en ce cinquantenaire de l’indépendance de son pays, qu’un vœu suprême à léguer : celui d’une Algérie des martyrs radieuse et prospère dans le miroir de sa capitale redevenue Alger la blanche, orgueilleuse à l’infini du décor symbolique et fabuleux des vestiges d’histoire et de culture de son éternelle Casbah. Ce long voyage au bout de la mémoire est une leçon féconde de notre honorable aïeule centenaire, à travers les valeurs de la société ainsi revisitées et jadis prodiguées dans la rationalité de la condition humaine par l’école de morale des aînés qui est aussi celle de la vie.*Lounis Aït Aoudia : président de la l’association des Amis de Rampe Louni Arezki. Casbah.-Paru dans El Watan.13.01.2013,
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*Plusieurs palais en cours de restauration
Dans le cadre de la réhabilitation des demeures et des palais de La Casbah, plusieurs sites classés dans le patrimoine national font l’objet de restauration dans la vieille médina.
Confiés à des entreprises communales par la wilaya d’Alger, Dar Essouf et Dar Mustapha Pacha (ancien centre d’artisanat) sont sur le point d’être livrés après plus de deux années de travaux. Quant à Dar El Kadi, dont 90% des travaux sont achevés, il ne reste que le revêtement des parois avec la céramique dont les motifs anciens sont reproduits par un jeune artisan qui élit domicile à Dar Essouf, rue de l’Intendance. Un autre chantier est lancé depuis une année dans un autre palais. Il s’agit de la somptueuse bâtisse Dar Hassan Pacha mitoyenne de la mosquée Ketchaoua. D’autres palais font l’objet de ravalement comme la bâtisse néomauresque où siège la direction du TNA. Il en est de même pour la Maison du millénaire ou le quartier des Raïs dont les parois des trois Bastions (17, 18 et 23) ont été de nouveau crépis pour faire face à l’action d’usure que génère la brise de la mer. Si la livraison du mausolée Sidi Abderrahamane est pour bientôt, à Zoudj Aâyoun, les travaux de restauration concernant la mosquée Ali Bichtin – construite au XVIIe siécle par Piccinino, un corsaire vénitien – avancent pas à pas. En face, Dar El Hamra (la Maison Rouge) est cet autre monument historique dont les travaux de réhabilitation sont menés tambour battant. Une entreprise est à pied d’œuvre depuis plus d’une année pour faire renaître de ses cendres ce palais construit vers la fin du XIIe siècle. Pour l’histoire, cette demeure, connue sous le nom de Mami Arnaute, fut transformée par le dey Hussein (1818-1830) en habitation familiale durant le temps où celui-ci était hûdjat Al Khayl (ministre des Haras et des Domaines) du dey Ben Ahmed. Après la capitulation du dey Hussein le 9 juillet 1830, l’édifice lui a servi de refuge avec sa famille et son protocole, jusqu’à son départ définitif vers Livourne (Italie). A l’époque coloniale, ce somptueux palais royal connut deux mutilations pour agrandir la route. L’édifice se dresse sur cinq niveaux pourvus d’un sous-sol constitué de geôles destinées aux esclaves et d’une galerie souterraine qui menait vers la citadelle (Dar Es Soultane) et de nombreuses pièces. Ce joyau architectural présente un intérieur bordé de corridors formant le grand patio (ouast eddar), qu’embellissent des colonnes de marbre semi-torsadées, parées de balustrades au niveau de chaque étage et des décors enjolivant les murs revêtus de carreaux de delft. Les chambres se caractérisent par des voussures et des caissons sculptés enluminés de dorure. Dès lors, il devient difficile de répondre au caractère architectonique de certains ensembles architecturaux, faute d’entreprise spécialisée dans la restauration des sites et palais, nous dit un responsable au niveau de l’ANA. Tout compte fait, ces palais sont en train de reprendre leurs couleurs du passé. Reste à savoir à quel usage seront-ils destinés. Musée, centres ou tout simplement bureau d’administration abritant les futures structures issues de la restructuration de l’ANA ? (El Watan-23.09.2004.)
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**203 milliards de dinars pour moderniser la Capitale
Alger n’en sera que plus belle
La modernisation de la capitale devra inciter les grandes entreprises mondiales à investir en Algérie.
Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau, donne le feu vert de la réhabilitation de l’histoire de Mezghenna, ainsi que le lancement du projet de la modernisation d’Alger à l’horizon 2010-2029. «La célébration du Cinquantenaire de l’Indépendance nationale, devra commencer, normalement, par le lancement du projet du réaménagement de la capitale algérienne», a indiqué hier, M.Sellal, lors du lancement des travaux de réaménagement de la baie d’Alger, à Mohammadia, dont la facture globale s’élève à 203 milliards de dinars, et qui seront étalés sur 15 ans.
Accompagné de M.Mohamed El Kébir Addou, wali d’Alger et une importante délégation qui devront prendre part à la révolution de «la modernisation de la capitale»,
M.Sellal a effectué une visite de travail à travers plusieurs projets, dont le lancement des travaux d’aménagement de oued El Harrach qui s’étale sur 18,2 km. et estimé à 38 milliards de dinars, selon M.Amirouche, directeur du projet. M.Sellal a pris connaissance des conclusions de l’étude de la baie d’Alger et autre travaux de la 2e tranche de la station d’épuration de Baraki, lors de sa première halte à Mohammadia.
Par ailleurs, les travaux d’aménagement de oued El Harrach, démarreront à partir de l’embouchure en mer et s’étaleront jusqu’à la limite territoriale de la wilaya d’Alger. S’agissant des travaux
d’aménagement de la baie d’Alger, ce projet comprend entre autre, l’abaissement du lit de l’oued par un dragage sur 5 km, la réalisation de jardins filtrants, de deux stades, la réalisation d’installations de pompage pour assurer le débit d’étiage, la mise en place d’un système de contrôle et surveillance de la qualité de l’eau, la mise en place d’un système de prévision et d’alerte des crues, ainsi que la réalisation de ponts et passerelles.
Dans sa deuxième partie de visite de travail et d’inspection, le ministre des Ressources en eau, a marqué une halte à la station d’épuration pour le lancement des travaux de la deuxième tranche de cette station à l’Office national de l’assainissement (ONA) de Baraki. Le projet de la deuxième tranche, comprend l’augmentation des capacités de traitement des eaux usées, qui va de 150.000 à 300.000 m3/j. Par ailleurs, il supervisera l’ouverture de nouvelles infrastructures telle que la faculté de médecine à Ben Aknoun, des deux nouveaux sièges, à savoir celui de l’Assemblée populaire nationale (APN) et le Conseil de la Nation (CNA) à
El Hamma en 2015, en plus du port d’Alger qui sera transformé et transféré hors Alger-Centre, redonnera une dimension internationale au programme de modernisation d’Alger. Selon les responsables du projet de réaménagement de la baie d’Alger et de la capitale en général, la nouvelle politique des pouvoirs publics, constituera une nouvelle dynamique qui incitera les grands investisseurs du monde, à venir s’y installer et contribuer au développement de l’économie nationale, selon les organisateurs.
M.Sellal a, par ailleurs, procédé à la mise en service de la liaison du tramway qui devra assurer le transport des usagers entre la cité Mokhtar-Zerhouni (les Bananiers) à la station Les Fusillés au Ruisseau. L’inauguration officielle du tramway, entre Bordj El Kiffan et les Fusillés, est programmée pour demain. La prudence et la vigilance dans les circuits sont de mise d’ores et déjà. (L’Expression-14.06.2012.)
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moi aussi je suis neé a la casbah. la casbah évoque en moi plusieurs belles choses ( el harma .el 3az. ….)
mais cé dommage rien n’est reste de tous cela. tous est partie.
domage moi je suis nee a la kasbah d alger c etait les belle jour de ma vie mintenant j ai 39 ans quand je suis de passage a kasbah mon coeur pleure de trictesse
domage.