La repentance dans le monde
*Une dynamique de rapprochement et de réconciliation
« Parfois, des compensations financières sont versées aux victimes : l’Italie s’engage à verser à la Libye, sous forme de projets de développement, cinq milliards de dollars échelonnés sur une période de vingt-cinq ans ; l’Allemagne augmente son assistance financière à la Namibie ; le Japon accorde une aide supplémentaire de trois milliards de dollars à la Corée du Sud, outre les 500 millions versés en 1965 pour les milliers de filles dites « femmes de confort » soumises pendant la guerre à la prostitution par l’armée d’occupation impériale ; le gouvernement canadien accorde près de 5 milliards de dollars pour l’indemnisation des victimes des pensionnats… »Au moment où le débat sur la place de la mémoire dans l’histoire commune algéro-française remonte à la surface, avec une acuité que traduit une avalanche de lois mémorielles, force est de constater que la revendication algérienne de faire assumer à l’ancienne puissance coloniale son passé encore vivant dans les stigmates des survivants, n’est ni un cas inédit dans les relations internationales, ni l’expression d’une réaction épidermique conjoncturelle. Bien au contraire. Par son caractère permanent, quoique soumis depuis 1962 à des fluctuations selon l’état des relations entre les deux pays, cette revendication s’insère dans un mouvement planétaire déclenché à la fin du siècle dernier pour faire de l’effacement des crimes confessés, un moyen de réconciliation entre les peuples, et parfois à l’intérieur de ces peuples.
Des nations pécheresses, en endossant l’héritage colonial qui a terni leur image dans des entreprises criminelles, en sont sorties grandies. Hélas, la France, pourtant pionnière de la défense des droits de l’homme et du citoyen, semble à la traîne. Une mentalité coloniale résiduelle, influente dans certains cercles officiels, refuse encore d’admettre que les indigènes sont devenus des interlocuteurs jaloux de leur indépendance, et que l’Algérie n’est plus le prolongement de la Métropole. Il serait à cet égard utile ici de rappeler et d’analyser quelques exemples dans le monde, d’Etats ou de gouvernements dont les dirigeants ont pu se libérer des représentations héritées de l’époque coloniale ou d’erreurs d’un passé récent, pour regarder vers l’avenir.
Sans oublier ou renier ce passé, ils l’ont assumé avec courage, par des formules ingénieuses, à la satisfaction des uns et des autres que la passion avait longtemps égarés ou que le remords avait gênés. L’ouverture de la voie de la réconciliation entre la Turquie et l’Arménie, que consacrent les protocoles d’accord historiques signés à Zurich, le 10 octobre 2009, par les ministres des Affaires étrangères des deux pays, met fin à un siècle d’animosité et de tension entretenues par les divergences sur la nature et le caractère de l’opération ayant conduit au massacre de dizaines de milliers d’Arméniens au sein de l’empire ottoman, au cours de la Première Guerre mondiale.
Si cet événement historique, parrainé par de grandes puissances, s’inscrit à l’évidence dans un souci de stabilisation régionale pour sécuriser l’approvisionnement énergétique au sud du Caucase, il se rattache néanmoins à une dynamique qui s’est accélérée depuis une vingtaine d’années à la faveur de la mondialisation, celle de la remise en cause d’une certaine histoire imposée par un rapport de forces inégales à l’ère de la colonisation et des expansions capitalistes. Des événements tragiques, longtemps niés, occultés ou déformés par une histoire officielle dictée par les vainqueurs et les oppresseurs d’hier, sont revisités à l’initiative de leurs victimes, avec une nouvelle approche attachée à la recherche de la vérité et de la justice, suscitant ça et là résistance, compréhension ou soutien.
Des Etats, autrefois coloniaux ou même sans passé colonial, rejoints par l’Eglise catholique (1), sont acculés à assumer des épisodes douloureux de leur passé aussi bien à l’égard de leurs voisins, de leurs anciennes colonies que de leur opinion publique et propres autochtones ou minorités ethniques. Beaucoup se souviennent encore de la génuflexion devant le mémorial du ghetto de Varsovie, du chancelier ouest-allemand Willy Brandt, le 7 décembre 1970 devant les caméras du monde entier. « Au bord de l’abîme de l’histoire allemande, écrit-il dans ses Mémoires parus en 1989, et sous le poids des millions d’hommes et de femmes assassinés, je fis ce que font les hommes lorsque les mots manquent. » A ce jour, l’Allemagne a versé à Israël, au titre de l’indemnisation des victimes juives du nazisme, plus de soixante milliards d’euros.
Depuis, les excuses que provoque la tragédie des juifs persécutés en Europe, quoique contestée dans son ampleur, par des intellectuels et penseurs occidentaux, tels que Garaudy et Faurisson, se sont multipliées : la Pologne en 1991, la Hongrie en 1994, la France admet l’année suivante, comme siennes, les responsabilités du régime de Vichy dans l’exécution de la solution finale : « Oui, déclare le président Chirac à l’occasion de la commémoration de la rafle du Vel’ d’Hiv le 16 juillet , la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’Etat français. » Six ans plus tard, sous la pression des manifestations de rue en Guadeloupe et Martinique, le Parlement qualifie la traite négrière et l’esclavage de crimes contre l’humanité.
Mais c’est le roi d’Espagne qui est allé, en 1992, plus loin dans l’expiation des péchés de son pays, en demandant pardon aux descendants des Andalous de confession juive, expulsés cinq siècles plus tôt dès la reconquête de Grenade en 1492. Il n’a pas effectué – probablement en raison d’un rapport de force défavorable au monde arabo-musulman – un geste identique en faveur des morisques, ces Andalous musulmans persécutés dans leur patrie, certains convertis par contrainte au catholicisme au XVIe siècle, d’autres obligés de dissimuler leur identité réelle pour échapper à la persécution, voire à l’extermination. En dehors de la question juive, les pays du Sud commencent à obtenir satisfaction : l’Italie a fait un double geste : elle a présenté des excuses à la Libye qu’elle a colonisée pendant trente ans, ouvrant ainsi la voie à la conclusion d’un traité d’amitié et de coopération le 30 août 2008 : « Il est de mon devoir en tant que chef de gouvernement, de vous exprimer au nom du peuple italien, notre regret et nos excuses pour les blessures profondes que nous vous avons causées. »(2)
D’un autre côté, elle a restitué, à l’Ethiopie, l’obélisque d’Axoum, monument datant du IVe siècle avant-Jésus-Christ. Ce symbole de la civilisation africaine a été volé par l’armée italienne qui a envahi le pays en 1936, pour l’ériger sur l’une des places de Rome, ce qui relance le débat international sur les œuvres d’art pillées par la colonisation. Quant à l’Allemagne, elle a reconnu aussi sa responsabilité en tant que puissance coloniale, quoique de très courte durée, dans le génocide des Héréros namibiens qui se sont opposés à la colonisation germanique de leur pays entre 1884 et 1915. Près de 71 000 sur 85 000 membres de cette ethnie (soit 84%) ont été, en effet, exterminés en trois ans sur ordre du général Von Troha : « Tout Héréro aperçu à l’intérieur des frontières allemandes (de la colonie), avec ou sans arme, sera exécuté », écrivait cet officier supérieur, dans l’ordre d’extermination adressé à son état-major le 11 août 1904 (3) .
Cent ans plus tard, l’Allemagne accepte d’assumer la responsabilité de ce premier génocide du siècle : « Nous, Allemands, acceptons notre responsabilité morale et historique ; je vous demande de nous pardonner. » (4) D’autres pays, pour sceller leur réconciliation, ont échangé des excuses ou admis unilatéralement leurs erreurs ; ainsi, dans une déclaration commune publiée le 21 janvier 1997, l’Allemagne a exprimé à la République tchèque ses regrets pour l’annexion des Sudètes en 1938, tandis que la Tchéquie l’a fait pour l’expulsion de cette région de trois millions d’Allemands en 1945 ; le Guatemala a présenté à Cuba, le 17 février 2009, ses excuses pour avoir été impliqué dans la tentative de renversement du président Castro orchestrée par la CIA en 1961 (la baie des Cochons). « Ce n’était pas nous, a dit le président Alfaro Colom, mais c’était notre territoire. Je vous présente mes excuses en tant que chef d’Etat et commandant en chef de l’armée. » En Asie, c’est le Japon qui est harcelé par des demandes d’excuses pour le comportement régional de l’armée impériale durant la première moitié du XXe siècle.
Tokyo a achevé sa « repentance » en 1998 à l’égard de Séoul, en exprimant, par la voix de son Premier ministre, « ses remords et ses excuses sincères » pour la domination coloniale exercée sur la Corée. La Chine qui a exigé des excuses écrites, n’a pas encore obtenu satisfaction, car le Japon considère qu’il n’y a pas eu, dans son cas, comme en Corée, colonisation, mais seulement invasion. A l’intérieur de certains pays démocratiques, des gouvernements ont pu assurer plus de cohésion à leur société en mettant fin au déni de justice dont a souffert une catégorie de leur population à une époque de l’histoire : aux USA, excuses du président Clinton en 1997 aux Noirs « pour l’étude de la syphilis sur eux, à leur insu, à Tuskagee (Alabama) dans les années 1930 », et excuses du Sénat aux Noirs en juin dernier pour « le mal qui leur a été fait ainsi qu’à leurs ancêtres qui ont souffert de l’esclavage et des lois ségrégationnistes dites lois Jim Crow » ; en Equateur, les représentants des descendants de la minorité des peuples précolombiens ont réussi à faire adopter, en 1998, une Constitution qui stipule que l’Etat est composé de « peuples indigènes et noirs ou afro-équatoriens ».
En Australie, des excuses officielles sont présentées l’an dernier aux aborigènes pour les injustices subies pendant deux siècles. Cette attitude a été précédée par la reconnaissance de la légitimité des titres coutumiers de propriété qui portent sur 40% du territoire national (5) ; en Nouvelle-Zélande, le conflit séculaire entre la Couronne britannique et les Maoris spoliés de leurs terres au XIXe siècle par les colons britanniques a été tranché en 1995 par l’intervention de la Reine. Celle-ci reconnaît solennellement que « ses représentants et conseillers ont agi injustement (….) en envoyant ses forces dans le Mangataawhiri en juillet 1893, et en qualifiant inéquitablement les Waikatos de rebelles. La Couronne reconnaît que les confiscations de terres et des ressources qui ont suivi, sur la base de la loi néo-zélandaise, étaient injustifiées (6) ».
Cette position appuie celle du gouvernement néo-zélandais qui a accordé aux Maoris des compensations en terres et en argent. Même démarche du gouvernement canadien en direction des Indiens victimes d’un « génocide culturel » : entre 1874 et 1996, plus de cent cinquante mille enfants indiens ont été enlevés à leurs parents et placés dans des pensionnats religieux pour subir une assimilation forcée. En particulier, il leur était interdit de parler leur langue maternelle. L’une des victimes encore vivante résume bien ce déracinement : « A défaut de pouvoir tuer tous les Indiens, ils ont décidé de tuer l’Indien dans l’enfant. » (7) Pour tourner cette page, le gouvernement fédéral demande pardon aux survivants : « L’absence d’excuses ayant fait obstacle à la guérison », a déclaré le Premier ministre devant la Chambre des communes en juin 2008, « alors je me lève devant vous pour présenter mes excuses pour le rôle joué dans les pensionnats indiens. Le gouvernement s’excuse et demande pardon ».
Dans certains cas, des interférences étrangères ou le poids de l’opinion publique sont déterminants : le gouvernement cambodgien a vainement tenté de faire juger, par une juridiction internationale, les dirigeants des Khmers rouges, responsables de milliers de morts, et qui ont pris le pouvoir en 1975, tout comme les talibans en Afghanistan, avec le consentement américain ; en Afrique du Sud, le bourreau blanc a accepté de se soumettre à la justice en même temps que ses victimes accusées de dépassements dans leur lutte contre l’apartheid. Si l’ancien président blanc Botha a refusé de comparaître devant la Commission pour la vérité et la réconciliation, quitte à se faire condamner à la prison avec sursis, son successeur Frédéric De Klerk, prix Nobel de la paix avec Mandela en 1993, a eu le courage de reconnaître devant la commission que « l’apartheid était une erreur ».
Ce geste a assaini le climat entre la minorité blanche et les peuples africains. En Belgique, le Collectif mémoires coloniales, né en 2008, mène une campagne pour l’ouverture d’un débat public sur les aspects négatifs et meurtriers de la colonisation et réclame que l’Etat présente des excuses au peuple congolais et l’ouverture d’une enquête sur l’assassinat de son leader Patrice Lummumba. Des gouvernements ont dépassé le versant colonial de leur histoire avec des résultats différents : l’Italie a réussi à inclure la question coloniale dans l’histoire nationale, grâce à une double démarche qui institue une Journée de la mémoire au profit des juifs déportés, mais qui rend hommage en même temps aux soldats italiens tombés à El Alamein pendant la Seconde Guerre mondiale, c’est-à-dire à un moment où l’Italie fasciste était alors l’alliée de l’Allemagne hitlérienne.
Ce tour de force, le Japon ne l’a pas encore réussi, puisqu’il peine à calmer la vague de protestations soulevée chez ses voisins, et au sein même d’une partie de son opinion publique, par l’érection du sanctuaire Yasukuni à la mémoire des martyrs militaires tués pendant les deux Guerres mondiales. En Russie le président Eltsine organise, à titre posthume, des obsèques solennelles en 1998 pour le tsar Nicolas II et sa famille assassinés en 1917 par les Bolcheviks, et reconnaît : « Nous sommes tous coupables. Il ne faut pas se mentir à soi-même en tentant d’expliquer une cruauté absurde par des buts politiques. » Parfois, des compensations financières sont versées aux victimes : l’Italie s’engage à verser à la Libye, sous forme de projets de développement, cinq milliards de dollars échelonnés sur une période de vingt-cinq ans ; l’Allemagne augmente son assistance financière à la Namibie ; le Japon accorde une aide supplémentaire de trois milliards de dollars à la Corée du Sud, outre les 500 millions versés en 1965 pour les milliers de filles dites « femmes de confort » soumises pendant la guerre à la prostitution par l’armée d’occupation impériale ; le gouvernement canadien accorde près de cinq milliards de dollars pour l’indemnisation des victimes des pensionnats…
Parfois, l’absence de repentance ne constitue pas un préalable à une œuvre de rapprochement ou de développement des relations interétatiques : traité de paix et d’amitié conclu en 1978 entre le Japon et la Chine, sa principale victime tout au long de la guerre(8), coopération afro-européenne maintenue malgré le refus d’accéder à la demande de certains pays africains exigeant des Etats impliqués dans l’esclavage, excuses et réparations, échange de visites en 2009 entre les chefs d’Etat de la Turquie et de l’Arménie… Parfois cet échange de visites, même plusieurs fois répété au plus haut niveau, aboutit tout simplement à remettre à nu des positions inconciliables quant à la place du passé dans la construction de l’avenir. Tel est le cas de l’Etat français qui refuse encore de reconnaître ses responsabilités dans l’agression et le démantèlement, par une entreprise génocidaire, d’un Etat algérien indépendant, et l’asservissement de son peuple libre durant plus d’un siècle. La prochaine contribution traitera de cette question.(El Watan-21.03.2010.)
Note :
1) Dans plus de 90 textes adoptés, notamment, sous le règne du pape Jean-Paul II, l’Eglise catholique reconnaît ses « fautes historiques » dans des événements importants : traite des Noirs, Juifs, Indiens d’Amérique, Galilée, Croisades, femmes … Voir bulletin d’information du Renouveau charismatique catholique européen : n°125 du 23 mars 2005, « En répondant à l’appel de l’esprit de confesser les péchés du passé, nous contribuons de façon significative au renouveau de l’Eglise et à l’évangélisation du monde ». Mgr Peter Hocken.
2) Déclaration du chef du gouvernement italien, Sylvio Berlusconi
3) http://hgsavinagiac.over-blog.com/article
4) Déclaration de la ministre de la Coopération et du Développement, Wieczorek Zeul, à l’occasion de sa visite en Namibie (août 2004).
5) Etrange ressemblance avec l’incorporation en Algérie colonisée dès 1844, dans le domaine de l’Etat, des terres non bâties dont les propriétaires ne pouvaient justifier de titres antérieurs à 1830, et qui sont ensuite utilisées pour créer des lots de colonisation.
6) Phlippe M. Defarges : Repentance et réconciliation, la Bibliothèque du citoyen p. 84, Paris 1999
7) Agence France Presse du 12 juin 2008
8) Ce qui n’a pas empêché Pékin de protester quand le ministère japonais de l’Education a effacé des manuels scolaires, en 1982, toute mention de la politique japonaise d’agression.
Par
Dix-sept ans de mensonges pour faire plier l’Algérie!
Vérités sur l’assassinat des sept moines de Tibhirine
La deuxième repentance française
Il aura fallu 17 longues années, l’équivalent d’une génération, pour qu’enfin toute la vérité sur l’affaire dite des «sept moines de Tibhirine», cyniquement mise sur le dos de l’Etat algérien, finisse par voir le bout du tunnel, et ce suite à une enquête journalistique – et non pas une enquête judiciaire – menée par des médias français.
Dix-sept ans que la vérité restait cachée. Dix-sept ans de mensonges. Dixsept ans durant lesquels les terroristes de l’ex-GIA étaient blanchis par certaines parties françaises. Dix-sept ans de pressions sur l’Algérie et d’embargo «politique» sur l’Etat algérien.
L’affaire des sept moines de Tibhirine assassinés, faut-il le rappeler, le 26 mars 1996 par un groupe terroriste appartenant au GIA, refait surface avec de nouvelles vérités dévoilées par les médias français suite aux témoignages d’anciens membres de l’ex-GIA.
Avant la chaîne française France 3 qui a fait tout un documentaire sur les sept moines de Tibhirine, l’hebdomadaire français Mariane avait rapporté, en premier, à travers une enquête menée par ses propres soins, de nouvelles vérités.
Selon ce magazine français, les moines de Tibhirine ont été victimes d’un attentat terroriste et non pas d’une bavure de l’armée algérienne, comme avaient tenté de le faire croire certains milieux politiques et militaires français ces 17 dernières années. Les témoignages d’anciens terroristes du GIA, publiés exclusivement par l’hebdomadaire français, confirment l’implication directe du GIA dans ces odieux assassinats.
Cela dit, les partisans du «Qui tue qui ?» avaient accusé l’armée algérienne d’avoir commis une « bavure « et causé la mort des 7 moines de Tibhirine. Le film documentaire de Sevrine Labatt et Malik Aoudia, diffusé dans la soirée de jeudi dernier sur la chaîne de télévision France 3, apporte la preuve du contraire et prouve que c’est bien le GIA qui a assassiné ces moines.
Ce documentaire est le fruit d’un travail de 15 ans, dans lequel sont recueillis des témoignages de personnes, dont Hassan Hattab, ex-émir de l’ex-GSPC, et qui attestent que c’est bien le GIA qui a commis ces assassinats. La justice française avait, auparavant, ouvert une instruction judiciaire sur l’assassinat de ces sept moines.
Au final, cette enquête de Severine Labatt et Malik Aït Aoudia est venue démontrer que contrairement aux accusations proférées ça et là, ce n’est pas l’armée algérienne qui a tué ces 7 moines mais bien le GIA.
17 ans de mensonges pour faire plier l’Algérie
Cachée depuis 17 ans et instrumentalisée par certains cercles français, la vérité a donc fini par être dévoilée. «Rendre à César ce qui appartient à César», telle aura été la finalité de cette enquête.
Selon les témoignages rapportés par d’anciens terroristes du GIA, les sept moines ont été d’abord enlevés, vers la fin du mois de mars 1996, au Monastère de Notre-Dame de l’Atlas, dans la wilaya de Médéa, avant d’être lâchement exécutés deux mois après.
Ce sont là des extraits de témoignages d’anciens terroristes du GIA qui viennent, par leurs vérités, déconstruire les allégations des cercles français qui avaient, pour cela, décidé d’un véritable embargo politique contre l’Etat algérien, l’accusant d’être l’auteur de ce massacre.
A vrai dire, dans l’Histoire française, les Français accusent souvent un grand retard avant de dévoiler les vérités. C’est presque après l’épuisement de toute une génération entière que les Français dévoilent les vérités. C’est une réalité prouvée dans les anales de l’Histoire de la France.
Pour ce qui est de l’affaire des sept moines de Tibhirine, les Français ont blanchi les terroristes du GIA durant 17 ans. Pis, ils ont même brossé un tableau noir de l’Algérie, allant jusqu’à provoquer un véritable embargo en s’adressant à des instances internationales pour faire pression sur l’Etat algérien dans le cadre de cette affaire et de celle du «Qui tue qui».
Maintenant, on assiste à une séance de rattrapage française, et ce par le biais des médias de l’Hexagone, alors que tout le monde attendait le contraire, c’est-à-dire le véritable travail qui devait être mené par le juge antiterroriste français Marc Trévidic, choisi pour mener une enquête en Algérie dans le cadre de l’assassinat des sept moines. Une enquête judiciaire qui n’avait abouti à rien.
Pourtant, le juge français avait bel et bien séjourné en Algérie et y a auditionné des personnes. Et il en avait fait de même en France. Parmi les personnes auditionnées, des ex-employés de l’ambassade de France à Alger. Toutefois, son enquête est tombée à l’eau.
Il aura fallu cette enquête journalistique menée par des médias français, dans un contexte empreints de défis à relever, pour que la vérité finisse par jaillir.
Selon un expert algérien en relations internationales, «les Français utilisent la vérité là où ils veulent et dans le temps qu’ils veulent, et le temps était venu pour que la vérité soit enfin rendue publique». Et d’ajouter : «Depuis 17 ans, les Français avaient tort, et durant toute cette période, l’Algérie avait raison. Ils ont caché la vérité durant 17 ans afin d’exercer des pressions sur l’Algérie.
Ils ont sciemment exploité cette affaire. Ils nous ont mis sous embargo et nous étions doublement victimes. Victimes du terrorisme barbare du GIA, du MIA, et victimes des agissements des officiels français dans le contexte politico-sécuritaire que l’Algérie traversait alors.» La position de la France, à l’époque, consistait à soutenir le terrorisme qui sévissait en Algérie, alors que le même terrorisme avait frappé la France, dans son antre, en 1995.* Le Jeune Indépendant-27.05.2013.
La loi du 23 février 2005 a provoqué une pétition d’historiens protestant contre son article 4 qui prescrit : « Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord… » Ils refusent qu’on leur impose d’enseigner une histoire officielle centrée sur les « bienfaits de la colonisation ».
Dans ce texte intitulé Le mépris de l’histoire et des victimes, on peut lire notamment : « Cette loi est un défi à la réalité des faits, à la liberté de l’historien et à toutes les victimes des conflits coloniaux. Elle reconnaît comme dignes d’hommage est mentionne comme victimes uniquement les militaires français et les disparus et victimes civiles de l’insurrection algérienne. Toutes les souffrances de cette guerre ne méritent-elles pas d’être reconnues ? Des Algériens qui ont pris le parti de l’indépendance de leur pays et de nombreux civils algériens suspectés de les soutenir n’ont-ils pas compté aussi parmi les victimes ? N’ont-ils pas subi des crimes, que la conscience universelle réprouve, à l’instigation d’une partie des autorités de la République ? Vis-à-vis des harkis, cette loi ne reconnaît ni leur abandon et les crimes subis après le cessez-le-feu de mars 1962, ni la manière dont eux et leurs familles ont été isolés et discriminés en France pendant des décennies, dans la pure tradition coloniale. Tradition qui se poursuit, aujourd’hui, dans les différences d’indemnisation que cette loi prévoit pour eux par rapport aux autres rapatriés. Tandis qu’en instaurant dans son dernier article une indemnité en faveur d’anciens condamnés, internés et assignés à résidence, définis de telle façon que cela vise d’anciens membres de l’organisation terroriste de l’OAS, cette loi semble vouloir ranger ces derniers parmi ceux qui auraient fait « œuvre positive » en Algérie ! En dictant une vision partielle et partiale de l’histoire, le Parlement français a tenté d’exonérer la République de ses responsabilités ; Contraindre les citoyens, les enseignants et les chercheurs à adopter une interprétation des faits asservie à une telle volonté politique est une insulte à l’intelligence de chacun et un déni de démocratie. Oublier les centaines de milliers de victimes qu’a entraînées la volonté d’indépendance et de dignité des peuples que la France a colonisés, c’est nier les atteintes aux droits de l’homme qu’ils ont endurées et les traiter, ainsi que leurs descendants avec mépris. Reconnaître les blessures de toutes sortes, subies par les individus, quel que fût leur situation ou leur engagement, ne peut avoir pour effet de privilégier tel ou tel. Alors que notre pays éprouve les plus grandes difficultés à affronter la totalité de son histoire, alors que de nombreuses personnes issues des anciennes possessions françaises vivent en France depuis plusieurs générations et subissent avec d’autres des discriminations inacceptables, cette loi impose une vérité d’Etat qui traduit un affront à toutes les victimes. Elle doit impérativement être abrogée. » C’est pourquoi, en ma qualité de descendant (fils/chahid) de victime de la guerre d’Algérie, je souhaite vivement signer cette pétition énoncée ci-dessus et tiens à exprimer ma solidarité. Cette loi doit en effet être abrogée. C’est une honte. C’est une insulte envers tous les peuples colonisés. Le colonialisme passé et présent, c’est aussi la négation de l’autre, des autres. Depuis 1830, la France a imposé son empire sur la rive méridionale de la Méditerranée à coup de sabre. A Sétif, le 8 mai 1945, alors que la France fête avec ses alliés la défaite du nazisme, des dizaines de milliers de patriotes algériens qui manifestent pour plus de dignité sont sauvagement massacrés. Nous sommes tous, qu’on le veuille ou non, les fils du FLN historique et n’eût été la bravoure, l’héroïsme de Amirouche, Haouès, Mustapha Ben Boulaïd, et Bougara, les Borgeaud, les bachagas, les spahis et autre armée fantoche du colonialisme, seraient encore là à se pavaner et le fellah algérien serait encore sous le joug et le fouet à ahaner. Aujourd’hui, cette loi, dans le contexte actuel, est un reflet de la pensée unique qui détruit tout, elle s’inscrit dans la campagne menée au nom du « choc des civilisations », en reprenant l’idéologie de la « mission civilisatrice » des colonisateurs. Bush, pour des raisons semblables, ne fait pas autre chose, en Irak en important sa « démocratie » dans les conditions que l’on sait. Décidément le colonialisme, le néo-colonialisme et le racisme sont encore à combattre. Envisager les droits de l’homme comme « religion de l’humanité » permettrait d’aborder autrement ces valeurs, notamment en ouvrant les portes de l’interprétation et en considérant les droits de l’homme comme source commune de l’humanité, ce qui nous est permis via leur reconnaissance par de nombreux Etats-nations, notamment dans la déclaration universelle des droits de l’homme. Il est temps que les pays occidentaux renoncent à imposer toujours et partout leurs propres conceptions. Cette domination des pays occidentaux sur les autres a reposé sur leur puissance matérielle et non sur une quelconque supériorité morale. L’extension de la science, des techniques occidentales et de l’économie de marché repose d’une façon nouvelle la question de l’universalité des droits de l’homme.(El Watan-23.10.2005.)
Dr Zouaoui Mourad. Docteur en économie industrielle. Aïn Defla.Bibilothèque
Homme et libertés (revue de la Ligue des droits de l’homme)
Dialogue des cultures et des civilisations dans le processus de Barcelone
Quotidien Horizons du vendredi 9-samedi 10 novembre 1990************************Crimes commis par la France coloniale en Algérie
Bouteflika maintient le cap
Le président de la République a réitéré, hier, dans un message adressé aux participants au colloque international sur « Le colonialisme : entre vérité historique et polémique politique », sa condamnation au passé colonial de la France.
Ainsi, dans un message lu en son nom par M. Boughazi, conseiller auprès de la présidence de la République, M. Bouteflika a affirmé que la colonisation française de l’Algérie est « l’une des formes de colonisation les plus barbares de l’histoire, une agression injustifiée contre une nation, un Etat et un peuple ». Il a précisé que cette colonisation « est la forme la plus barbare qui soit, en ce sens qu’elle était caractérisée par la destruction et les violations flagrantes des droits naturels et civiques les plus élémentaires du peuple algérien ». Il n’a pas manqué de souligner que « plusieurs historiens français intègres ont levé le voile sur les crimes odieux commis par le colonisateur contre le peuple algérien et ont fait la lumière sur la réalité des pratiques abjectes qui demeureront un point noir dans l’histoire de la France coloniale ». Le président Bouteflika a, en outre, affirmé qu’« il est vraiment étonnant que subsiste encore aujourd’hui un amalgame, entretenu à dessein, entre le mensonge politique et la lutte pour l’influence et les vérités historiques immuables sur lesquelles se fondent les relations entre les peuples et les nations ». « Ces vérités, a-t-il-dit, doivent être explicitées en toute fidélité à l’Histoire et avec probité scientifique, avec courage et surtout avec conscience et responsabilité pour éviter qu’elles ne demeurent source d’animosité et de doute ni un terreau pour les concepts extrémistes et les desseins malintentionnés. » Le président de la République a ajouté que le colonialisme français en Algérie « a été une violation flagrante du droit international humanitaire et s’inscrit en contradiction avec les dispositions de la résolution de La Haye de 1907, la Convention de Genève de 1949 et les accords suivants ». Il a précisé, dans ce contexte, qu’« il s’agit là d’un droit historique que revendique la conscience humaine collective et non pas une affaire qui concerne les seuls Algériens ». « L’acte de colonisation est condamnable de par sa nature et révocable de par ce qu’il représente, et à juste titre lorsqu’il est empreint de cette barbarie et de cette brutalité qui sont le propre de la colonisation française en Algérie », a-t-il dit, soulignant qu’« il ne saurait y avoir de bon ou de mauvais colonialisme et que toute tentative de brouiller les cartes en tentant de le justifier ou de le glorifier ne saurait lui conférer une quelconque légitimité ni effacer ses séquelles. Toute entreprise en ce sens ne fera, bien au contraire, que rouvrir les plaies et entravera les efforts de ceux qui œuvrent pour la refondation d’une relation équilibrée entre deux Etats souverains ». « Il semble que les affres que notre peuple a vécues et continue d’endurer du fait du colonialisme, notamment les effets des expérimentations d’armes nucléaires et les dangers que représentent les mines posées sur de vastes étendues de notre territoire, n’ont pas suffi puisque certains nostalgiques de l’ »Algérie française » continuent, pour des raisons connues d’eux seuls, de glorifier le colonialisme et de le considérer comme un phénomène positif, notamment en Afrique du Nord, avec une allusion toute particulière à l’Algérie », a affirmé le président Bouteflika. « D’aucuns auront poussé leur mépris jusqu’à promulguer une loi à ce propos. Une loi qui, en dépit de toutes les mutations survenues dans le monde, de la repentance de nombreux anciens colonisateurs et leur reconnaissance officielle de leurs crimes contre les peuples colonisés, dénote de cette nostalgie qu’ils nourrissent à l’égard d’un passé colonial pourtant si abject et odieux », a-t-il dit, en allusion explicite à la loi française du 23 février 2005. Le chef de l’Etat a affirmé que toute tentative d’ignorer cette vérité ou de l’instrumentaliser en faveur d’intérêts personnels « ne fera qu’élargir le fossé et compromettre l’avenir des relations entre deux pays », en soulignant que l’écriture de l’histoire « relève de la seule compétence des historiens, des enseignants spécialisés et des chercheurs et il revient aux peuples et aux nations de façonner cette histoire ».(El Watan-03.07.2006)
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**L’historien français Olivier Le Cour Grandmaison au SILA : « Spectaculaire retour en grâce de la colonisation »
Il faut abroger toute la loi du 23 février 2005 sur les bienfaits de la colonisation », a appelé, jeudi, au 14e Salon international du livre d’Alger (SILA), l’historien français Olivier Le Cour Grandmaison lors de la présentation de son dernier ouvrage, La République impériale, politique et racisme d’Etat, paru aux éditions Casbah.
L’abrogation de l’article 4 de cette loi controversée n’a, selon lui, pas annulé toute la philosophie du législateur sur « l’entreprise civilisationnelle » de la colonisation. « L’article premier de la loi du 23 février précise que ”la nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d’Algérie, du Maroc, de Tunisie, d’Indochine ainsi que dans les territoires placés ultérieurement sous la souveraineté française”. Par quelle grâce ces territoires ont-ils été placés sous cette souveraineté ? », s’est-il interrogé. Nul besoin, selon lui, d’être grand spécialiste de la langue pour comprendre que le terme « œuvre », utilisé dans le texte de loi, est porteur de connotation positive. « La France est le seul Etat démocratique et la seule ancienne puissance coloniale européenne où existe une loi qui sanctionne officiellement une interprétation particulière du passé. C’est pour cela qu’il ne faut pas se contenter de la suppression de l’article 4 de la loi du 23 février », a-t-il précisé. Ce texte de loi est, selon lui, le signe d’une réhabilitation coloniale sans précédent depuis la fin de la guerre d’Algérie, en 1962. Il en veut pour preuve le discours de Nicolas Sarkozy (alors candidat à l’élection présidentielle en 2007) fait à Toulon, ville conquise pendant longtemps par le parti raciste du Front national (FN) de Jean-Marie le Pen. « Sarkozy avait dit qu’il allait chercher les militants du FN un par un. Il a tenu parole ! Cela passe par la réhabilitation du passé colonial de la France. L’autre problème est la mise en place d’un ministère de l’Identité nationale, une première dans l’histoire de la République et de l’Europe ! », a expliqué l’historien. Dans son ouvrage, Olivier Le Cour Grandmaison a repris un passage du discours de Nicolas Sarkozy à Toulon dans lequel il appelait à engager « une politique de civilisation » comme le voulaient les philosophes des lumières et les républicains du temps de Jules Ferry.
« Faire une politique de civilisation pour répondre à la crise d’identité, à la crise morale, au désarroi face à la mondialisation. Faire une politique de civilisation, voilà à quoi nous incite la Méditerranée (…). La source n’est pas tarie. Il suffit d’unir nos forces et tout recommencera », avait déclaré Nicolas Sarkozy. Olivier Le Cour Grandmaison a qualifié ces propos d’« apologétiques » de la colonisation. « Guerre des mémoires » et « repentance » sont, pour lui, des pseudo-concepts grossiers inventés par les nostalgiques du passé colonial pour défendre « l’unité et la fierté nationales ». « Il y a là un spectaculaire retour en grâce de la colonisation », a-t-il soutenu. Selon lui, les partisans de l’Empire sont plus nombreux aujourd’hui qu’hier. « Nous sommes dans une situation régressive qui affecte modérément l’université. Il y a toujours possibilité d’écrire autrement sur le passé colonial de la France », a-t-il relevé. Il n’a pas manqué de souligner que certains académiciens commencent à entrer dans le jeu de la réhabilitation du colonialisme. Il a évoqué le cas de Max Gallo, écrivain et historien, membre de l’Académie française depuis 2007 (il avait échoué lors d’une précédente élection en 2000). « Max Gallo se pense un grand historien. Il est devenu une sorte de plume officielle du régime. Il soutient toute une série d’initiatives relatives à la restauration d’un passé prestigieux afin, dit-il, de rétablir la fierté d’être français », a observé Olivier Le Cour Grandmaison. M. Gallo est auteur de plusieurs biographies comme celles sur Napoléon, de Gaulle, Victor Hugo et Constantin le Grand.
Pierre Rosanvallon, qui a écrit sur l’histoire de l’Etat français depuis la Révolution de 1789 a, selon le conférencier, négligé le caractère impérial de la République. « Les effets de la construction de l’Empire m’ont plus intéressé dans l’ouvrage que je viens de publier. Les républicains, favorables aux conquêtes coloniales, ont réussi à faire de la France la seconde puissance impériale après la Grande-Bretagne à partir de 1871 », a-t-il noté. Selon lui, le code algérien de l’indigénat, qui était l’un des plus durs, a servi de matrice pour les autres codes au fur et à mesure que l’expansion coloniale se poursuivait en Afrique et en Indochine. « Dans les colonies, les colons jouissaient de leurs droits démocratiques. En même temps, les indigènes, comme on les appelait à l’époque avec mépris, avaient un traitement particulier.
Ils étaient considérés comme des sujets français privés de leurs droits, comme celui de voter. A cela s’ajoutent toutes les dispositions répressives », a-t-il relevé comme pour mieux expliquer le caractère impérial de la République, née pourtant pour assurer l’égalité de tous et pour faire oublier les injustices de la monarchie. D’après Olivier Le Cour Grandmaison, Nicolas Sarkozy va continuer à puiser dans le même registre du « passé glorieux » pour entretenir son électorat d’extrême droite. « Il va poursuivre ses déclarations sur la fierté d’être Français », a-t-il prévu. Il a évoqué l’ouverture prochaine d’un musée sur l’histoire de France. « On peut penser que ce musée aura pour fonction de mettre en scène le passé glorieux de la France, des croisades jusqu’à nos jours », a-t-il noté.
Selon Mohamed El Korso, qui a modéré les débats, Olivier Le Cour Grandmaison fait partie d’une minorité dérangeante en France. « L’université française est divisée en deux tendances qui s’affrontent. La première qui fait œuvre d’histoire positive telle que la République impériale et telle que l’actuelle République le voulaient. La deuxième, à laquelle appartient Olivier et Gilles Manceron, qui a une vision sur le colonialisme », a-t-il précisé. « La République impériale, politique et racisme d’Etat » se veut une suite de Coloniser, exterminer. Sur la guerre et l’Etat colonial, sorti en 2005. Olivier Le Cour Grandmaison est enseignant de philosophie politique à l’université d’Evry-Val-d’Essonne et au Collège international de philosophie. Il a dirigé récemment un ouvrage collectif sous le titre de Douce France. Rafles. Rétention. Expulsions, sur la migration. Mohamed El Korso a souhaité la traduction en arabe de 17 octobre 1961, un crime d’Etat à Paris, autre ouvrage collectif auquel a participé Olivier Le Cour Grandmaison.(El Watan-07.11.2009.)
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**Gilles Manceron. Historien :
« La plupart des Français veulent tourner la page coloniale »
Gilles Manceron, historien et vice-président de la Ligue des droits de l’homme, a notamment publié D’une Rive à l’autre. La guerre d’Algérie de la mémoire à l’histoire, avec Hassan Remaoun (Syros, 1993) ; Marianne et les colonies (La Découverte, 2003) ; La gauche et la colonisation (in Histoire des gauches, dir. Jean-Jacques Becker et Gilles Candar, 2004) ; La Colonisation, la loi et l’histoire, avec Claude Liauzu (Syllepse, 2006).
En tant qu’historien mais aussi en tant que défenseur des droits de l’homme, comment interprétez-vous le projet de loi de parlementaires algériens sur la poursuite des crimes de la colonisation ? Serait-ce une réplique à la loi du 23 février 2005 ?
Il y a probablement, de la part de ses initiateurs, une volonté de répliquer à la loi française du 23 février 2005, ainsi qu’au discours actuel des gouvernants de ce pays qui cherchent, en agitant des thèmes comme « la fierté d’être français » et « l’antirepentance », ou encore en lançant le débat sur « l’identité nationale », à flatter les secteurs de l’opinion les plus nostalgiques de la colonisation. Chacun peut pourtant comprendre qu’étant donné le souvenir que le peuple algérien a gardé de la colonisation et de la guerre, ces discours autosatisfaits sont pour lui insupportables à entendre. Mais cette proposition de loi, en Algérie, est-elle la réponse la plus appropriée ? C’est aux Algériens d’en débattre.
Le pays est souverain, y compris dans le domaine judiciaire. Pour ma part, puisque je crois que les responsabilités françaises dans les politiques coloniales et dans les crimes coloniaux passés ont été partagées par de nombreux individus, dont la plupart sont morts, maintenant, je ne pense pas que le travail de vérité et de reconnaissance, qui est indispensable en France, puisse être aidé par des procédures judiciaires devant des tribunaux algériens, telles que cette proposition de loi cherche à favoriser. Ceux qui s’opposent à ce travail en France risquent, au contraire, d’en tirer argument pour le refuser. Par ailleurs, les Accords d’Evian, à tort ou à raison, ont exclu les poursuites, dans les deux pays, pour des faits antérieurs au cessez-le-feu. Je trouve regrettable que cela ait empêché la justice de se prononcer, même sur les cas les plus graves et les plus emblématiques. Mais ces Accords font aussi partie de l’histoire. Est-ce qu’on peut revenir sur ce point, un demi-siècle plus tard ?
La loi du 23 février 2005 ne traduit-elle pas l’arrogance d’un Etat qui, plutôt que d’adopter la démarche qui consiste à assumer son passé colonial, souffle sur les braises et le glorifie ?
Cela me paraît évident. La loi du 23 février 2005 était scandaleuse car elle opérait un retour en arrière complet en réhabilitant l’idéologie coloniale d’autrefois sur « les bienfaits de la colonisation ». Elle témoignait aussi, à mon avis, d’une volonté de réagir et de s’opposer aux progrès réalisés en France, dans les années 1990, dans les études historiques et dans l’enseignement de ces questions. La majorité politique du moment a voulu donner satisfaction à une frange réactionnaire et vieillissante de la population. Or, cela allait à l’encontre d’un devoir élémentaire de vérité et d’un souci de cohérence par rapport aux principes que la France invoque par ailleurs. C’était intenable. Et cela a suscité de vives réactions de la part des populations qui avaient été colonisées, comme de la part de la grande majorité des historiens et des enseignants en France. D’où le fait que le président Chirac a dû reculer.
La même logique continue avec l’annonce, le 25 septembre 2009, par le secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens combattants, de la création d’une « fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie », contestée par les historiens.
C’est l’article 3 de la loi du 23 février 2005 qui prévoyait la création d’une fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie. Le président Chirac a non seulement fait retirer, en janvier 2006, la phrase la plus controversée de l’article 4 sur « le rôle positif de la présence française outre-mer », mais il a aussi choisi, jusqu’à la fin de son mandat, de ne pas mettre en œuvre cet article 3. Son successeur a commis l’imprudence, lors de sa campagne électorale de 2007, de promettre à des lobbies nostalgiques de la colonisation dont il voulait capter les suffrages que lui, il le mettrait en œuvre. Depuis, bien qu’il sache que cette fondation risque de susciter les mêmes oppositions que la loi, bien qu’il n’ignore pas que la grande majorité des historiens lui est hostile – ce qui explique peut-être que, pendant trois ans, il ne l’ait pas créée –, il persiste dans le sens de cette promesse. La part de financement de l’Etat a même été fixée à sept millions d’euros, somme considérable quand les universités manquent de moyens, en particulier pour promouvoir les nécessaires travaux historiques croisés entre les deux pays. Les défenseurs de cette fondation, comme le député UMP président du groupe d’études parlementaires sur les rapatriés, Elie Aboud, qui avait fait parler de lui en se joignant à une manifestation devant une stèle « en l’honneur » d’assassins de l’OAS à Béziers, ou encore qui a dénoncé récemment le prochain film de Rachid Bouchareb, Hors la loi, parce qu’il serait « un véritable plaidoyer pro-FLN », affirment sans rire que cette fondation « favorisera les liens entre les deux pays »… Je crains qu’elle soit au contraire perçue par les Algériens comme une nouvelle provocation.
N’est-ce pas là une vision erronée de l’histoire et qui hypothèque l’avenir des rapports entre la France et l’Algérie ?
A mon avis, ce qui entrave encore, près d’un demi-siècle après la fin de la colonisation, la normalisation des relations franco-algériennes, c’est la tendance des autorités françaises à vouloir ignorer ce que j’appellerais « le contentieux historique » entre les deux pays, qui résulte des injustices et des violences de la colonisation. Or, on ne peut pas faire comme si ce passé n’avait pas existé. Cet aveuglement ne fait qu’attiser les difficultés entre les deux pays. Cela encourage aussi, en Algérie, des intrumentalisations politiques partisanes des sentiments antifrançais, qui sont contestables, mais cela alimente aussi une vraie incompréhension générale de la part de l’opinion publique algérienne qui ne supporte pas ce déni dans lequel s’enferment les autorités françaises.
Ne serait-ce pas plutôt une reconnaissance symbolique par l’Etat français de son passé colonial et des méfaits de la colonisation qui contribuera à la cicatrisation des plaies et à l’apaisement des mémoires ? De tourner enfin une page douloureuse et ouvrir la voie à des relations mutuellement bénéfiques ?
En effet, si on peut dire, la balle est avant tout dans le camp français. C’est bien à l’ancienne puissance coloniale de déclarer que sa conquête et sa domination étaient contradictoires avec les principes des droits de l’homme auxquels elle se référait par ailleurs. Personnellement, je ne reprends pas à mon compte le terme de « repentance », car le repentir est une posture individuelle et morale qui ne convient pas dans ce domaine. Les nouvelles générations ne sont pas responsables des choix de leurs aînés et il serait absurde de demander à ceux des Français, certes peu nombreux, qui ont combattu le colonialisme de s’excuser de l’avoir fait…
Ce qu’il faudrait, de la part de la France, ce sont des gestes forts de reconnaissance. Cela seulement pourrait apaiser l’affrontement des mémoires et permettre de tourner la page. Et ne pourrait que favoriser l’effort de vérité par rapport à sa propre histoire qui, à mon avis, est aussi nécessaire en Algérie. C’est avant tout cette absence de reconnaissance par la France qui fait qu’on se trouve bloqué devant cette page et qu’on n’arrive pas à la dépasser.
Le poids de ce passé non reconnu et non assumé marque aussi les débats de société comme celui, très controversé, sur l’identité nationale ou celui sur la place des Français d’origine maghrébine appelés abusivement « Français musulmans » comme étaient appelés leurs parents et grands-parents algériens par l’administration coloniale ?
Bien sûr, cette question empêche aussi la société française de rejeter, conformément à ses principes, les discriminations contre ses citoyens musulmans. Ça l’empêche d’appliquer vraiment ses principes. La vieille conception coloniale, celle des deux catégories d’habitants, les citoyens et les non-citoyens, qui subsistait dans les têtes, resurgit dans les discours politiques et les pratiques administratives. On continue à désigner par leur religion les Français d’origine maghrébine, comme on désignait autrefois les indigènes. On réutilise l’expression « Français de souche » qui faisait partie du langage de l’armée coloniale. Ces conceptions n’avaient jamais disparu, mais on n’osait plus les exprimer ouvertement. Le débat sur l’identité nationale leur a donné l’occasion de réapparaître dans le langage public. Mais, en même temps, la majorité des Français l’a compris et en est venue à rejeter ce débat nauséabond qui, finalement, a été un fiasco.
Je suis persuadé que la plupart des Français, notamment la grande majorité des plus jeunes, veulent tourner la page coloniale de notre histoire. La société française, en proie à ces deux forces contradictoires, se trouve comme à une croisée des chemins. Et je suis sûr que, tôt ou tard, elle obligera ses gouvernants à faire les gestes forts qui permettront de tirer vraiment un trait sur ce passé.(El Watan-23.02.2010.)
Par
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